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Cette dynamique d'expansion des transferts de politiques publiques est imputée a priori à trois facteurs principaux : l'émulation résultant de la concurrence accrue entre les nations du fait de la globalisation économique et financière ; les mouvements d'harmonisation dans le cadre de processus d'intégration régionaleC'est quoi la mondialisation PDF ?
Mondialisation est un mot fréquemment utilisé de nos jours, que ce soit pour qualifier les rela- tions denses et exigeantes entre les États ou l'énorme mouvement des capitaux et des échanges commerciaux.- L'une des conséquences négatives les plus constantes du phénomène est cette polarisation de la société, qui se traduit par une précarité accrue de tous ceux qui, comptant déjà parmi les plus vulnérables, ne disposent pratiquement d'aucune source de revenus publique ou privée et d'aucun moyen de pression économique ou
1 http://www.asmp.fr - Académie des Sciences morales et politiques
ASPECTS DE LA MONDIALISATION POLITIQUE
rapport établi sous la direction deJean Baechler et Ramine Kamrane
SOMMAIRE
Pour atteindre les pages souhaitées, cliquer sur les mots soulignésPrésentation
par Ramine Kamrane p. 2La mondialisation politique
par Jean Baechler p. 5 Le problème de l'émergence de l'Europe dans un monde multipolaire, " Europe- puissance » ou collaboration transatlantique par Georges-Henri Soutou p. 16 Peut-on intégrer la Russie dans un ordre mondial oligopolaire ? par Alain Besançon p. 28Un nouveau rôle pour l'Inde ?
par Christiane Hurtig p. 49La mondialisation du droit
par Mireille Delmas-Marty p. 60L'humanité et les guerres de la mondialisation - considérations réalistes sur l'éthique et
le droit international par André Tosel p. 732 Retour au sommaire
PRESENTATION
Ramine KAMRANE
Un nouvel ordre international est indispensable et inévitable. Sera-t-il défini par l'hégémonie américaine, par un chaos incontrôlable ou par un ordre rappelant le concert européen des nations. Le premier de deux cahiers explore la troisième issue, en déduit la logique, saisit des acteurs plausibles et repère des indices de l'émergence de la solution. Jean Baechler, propose une analyse conceptuelle de la mondialisation axée sur le problème du nombre des acteurs de la politique internationale. Le monde dipolaire ayant pris fin avec la chute de l'empire soviétique, deux voies s'ouvrent devant l'humanité. Ou bien unesituation unipolaire où une seule politie, hégémonique ou purement impériale, s'érigerait
comme acteur ultime ou unique. Ou bien une situation oligopolaire, où des pôles régionaux émergeraient pour cadrer le jeu des relations internationales, en créant de fait une situationsemblable au concert des nations européennes. C'est cette seconde solution qui est considérée
comme la plus probable et la plus souhaitable, car elle serait à même de permettre laréalisation d'une paix durable. Mais la réalisation de cette paix requiert d'une part l'équilibre
de la puissance entre les acteurs peu nombreux qui resteraient en lice, ce qui exclue de trop grandes disparités mais aussi l'assimilation par les acteurs de la logique objective d'un système oligopolaire faite de concurrences et d'alliances changeantes. L'Europe jouerait ainsiun double rôle dans ce monde oligopolaire, elle offrirait - à travers son histoire - le schème
du jeu international à venir et proposerait en même temps un modèle d'intégration des unités
politiques par une voie ni impérial ni hégémonique, une première dans l'histoire de l'humanité. La situation de l'intégration européenne constitue l'objet de l'article de Georges-HenriSoutou, qui y décèle deux tendances, l'élargissement et l'approfondissement. Tendances qui ne
sont pas contradictoires en théorie, mais qui ne peuvent être poursuivies au niveau historiquede manière parallèle et indifférente aux contingences politiques. Tendances qui dessineront la
place de l'Europe entre les États-Unis, qui souhaitent un maintien et une augmentation de son influence en Europe, et la Russie qui cherche à étendre son influence au niveau de celle de l'URSS. Le grand choix qui s'offre ainsi à l'Europe et qui fait l'objet de nombreusesdiscussions est celui de se limiter à être une zone de libre-échange, qui s'accommoderait d'un
élargissement souple et rapide, ou de franchir le pas vers le fédéralisme, où l'identité
européenne en matière de défense constitue le point nodal. Le choix entre la poursuite des buts de nature purement économique et la mise en place d'un programme politique ambitieux se complique en raison de la présence de l'OTAN, qui remplit effectivement le rôle de lagrande alliance militaire en Europe et où les États-Unis gardent une place prépondérante. Si la
réduction de l'Europe à une simple zone de libre-échange paraît non souhaitable et lafédération improbable, deux solutions intermédiaires s'offrent aux acteurs politiques. Ou bien
la création d'un noyau dur au sein de l'Europe, où les pays les plus intéressés mettraient en
place des structures de coopération ad hoc, ou bien le retour à la pensée des pères fondateurs.
Cette dernière solution est fondée sur un progrès par secteurs fonctionnels avec des autorités
supra-nationales sans la remise en cause de l'existence et l'autorité des États. Progrès qui serait
pondéré par un triple équilibre, entre les grands pays, entre les grands et les petits et enfin
entre les institutions.3 L'analyse d'Alain Besançon est une incursion dans l'histoire russe et soviétique afin
de souligner les différences de ce passé historique avec celui de l'Europe et d'évaluer lespossibilités que la Russie remplisse le rôle de pôle régional. Il distingue dans cette histoire
deux voies de modernisation, celle autoritaire et volontariste de Pierre Ier qui passe par le renforcement et l'activation des moyens qui sont à la disposition du souverain et celle de Catherine II qui vise la mise en place d'une structure sociale comparable à celle de l'Europe etle développement de la société civile. L'échec de la solution libérale et celui consécutive du
communisme posent de nouveau le problème de la cohérence et de la force de la société civile
russe. Sa faiblesse est largement causée par le fait que le partage des biens à la suite de la fin
du communisme s'est fait selon un pur rapport de forces où une fraction du parti et une couchetrafiquante ont pu s'attribuer la part du lion et où l'absence du droit a renforcé les distorsions
ainsi créées. Dans cette situation, la Russie est confrontée à un triple choix, user de son
pouvoir de nuisance au niveau international, ce dont il n'a pratiquement plus les moyens; s'associer à l'Europe occidentale et dans ce cas c'est l'Allemagne qui jouera un rôle clef ; accepter son rang de moyenne puissance et s'européaniser. Paradoxalement, la Russie ne pourra jouer le rôle de puissance oligopolaire qu'en se repliant sur son rôle de grande puissance, à la fois artificiel et ruineux. Les difficultés de l'émergence de l'Inde comme puissance régionale font l'objet del'étude de Christiane Hurtig. Le problème principal qui se pose à l'Inde étant le fait qu'avec la
fin du monde bi-polaire le credo principal de la politique étrangère de ce pays, à savoir le non-
alignement, n'a plus d'objet. La nouvelle situation exige une redéfinition radicale de la position du pays au niveau international, avec toutes les difficultés et les incertitudes qu'une telle entreprise peut comporter. L'Inde détient des avantages économiques notables, mais n'arrive pas à les transformer en avantages politiques. La situation géopolitique de l'Inde etson émergence éventuelle comme pôle régional requièrent une redéfinition des relations avec
la Chine, le Pakistan, le Népal et le Bangladesh. Mais le poids d'un passé historique récent, où
l'Inde a contrebalancé son relatif retrait avec une alliance soviétique, ne facilite pas cetteredéfinition, d'autant moins que le problème nucléaire vient compliquer la situation. Dans ces
conditions une solution négative, une sorte de non-alignement entre les États-Unis et la Russie
et la Chine peut paraître la solution politiquement la plus rentable et passer pour une redéfinition et une remise à niveau de l'ancienne politique. Le droit international étant à la fois le vecteur et l'expression de la mondialisation les deux derniers articles du recueil le prennent pour objet d'analyse. Mme Mireille Delmas-Marty commence par une évaluation de la situation actuelle du droit international. Elle constate l'existence de dynamiques internationales et trans- nationales à ce niveau ainsi que la variété des acteurs et examine à la lumière de deuxlogiques et de deux traditions théoriques conséquentes : la logique moniste avec une primauté
entière des normes internationales sur les normes étatiques et la logique dualiste où les normes étatiques ne seraient mises en question par aucune autorité supérieure. Elle tientcompte de la situation historique effective où la première voie - requérant une unification
normative hiérarchique, elle est entravée par des réticences de nature diverse - semblelointaine et la seconde est déjà dépassée par le jeu des acteurs non étatiques. Elle place
l'évolution actuelle dans une logique pluraliste, intermédiaire entre les deux autres et à même
d'éviter l'hégémonie juridique d'un seul État. Cette logique pluraliste serait réalisable à travers
la concession d'une marge nationale d'appréciation, qui viserait à assouplir l'aspect hiérarchique du monisme en remplaçant l'obligation de conformité par une obligation de4 compatibilité, et en encourageant une "corégulation", qui pourrait relier horizontalement des
ensembles internationaux autonomes à travers un rapprochement des points de vue. Le dernier article exprime une critique des conceptions juridiques et éthiques de lamondialisation. La première, dans une version moniste objectiviste a été exprimée par Hans
Kelsen. La seconde dans une version éthique cosmopoliste a été proposée par Jürgen Habermas. André Tosel soumet ces deux conceptions à l'épreuve de la situation effective du jeu de pouvoir au niveau international. Elle est marquée par la mise en question théorique des fondements de légitimité de la pluralité étatique, par l'affirmation d'une puissance hégémonique, par la faiblesse des organisations internationales, notamment l'ONU, et par le caractère oligarchique de la distribution du pouvoir au sein de cette organisation. Cettenégation de la pluralité, d'un côté au nom de valeurs globales et universelles et de l'autre au
nom de l'individu abstrait, loin de présager une aire de paix, légitime des "guerres justes"menées par des puissances hégémoniques, guerres qui déshumanisent l'ennemi en le mettant à
la fois hors la loi internationale et en marge des obligations éthiques.Retour au sommaire
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LA MONDIALISATION POLITIQUE
Jean BAECHLER
Comment débarrasser le thème de la mondialisation de son vague, de sa banalité et de ses résonances idéologiques ? Une issue part du constat qu'elle désigne, en fait, la rencontre de deux lignes évolutives distinctes, d'une part la marche lente et obstinée deshistoires humaines vers une histoire unique, commune à l'humanité entière, et, d'autre part,
l'extension à l'humanité unifiée de traits émergés dans une civilisation particulière, celle de
l'Europe. Une question décisive pour la compréhension de l'état présent de l'humanité dépend
de l'interprétation que l'on retient de la modernité, soit comme un développement culturel d'une civilisation particulière, soit comme l'émergence, à l'occasion de particularitéseuropéennes, d'une matrice inédite de possibles culturels proposés au génie humain. Retenons
la seconde hypothèse, comme plus plausible et plus féconde. De là, il est permis de poser que
la mondialisation est l'entrée de l'humanité dans un stade inédit de son aventure millénaire.
Que découvre-t-on, une fois le seuil franchi ? L'enquête rationnelle ne prédit pas l'avenir,
radicalement inconnaissable, elle porte exclusivement sur le passé et, avec des précautionsinfinies, sur le présent. Dans ce présent, les germes du futur proche sont déjà semés, si bien
qu'il doit être possible de les repérer et d'en tirer certaines conséquences. L'exercice neconsiste pas à prédire l'avenir, mais à repérer, dans le présent et à la lumière du passé, les
indices de futurs possibles et à peser leurs probabilités respectives de se réaliser. L'exercice se
réserve des chances de ne pas échouer complètement, à condition de porter sur les indications
les plus générales et de refuser d'entrer dans des détails, qui ont des chances infinies d'être
démentis par les événements. Le passage de l'humanité entière à une économie de type
capitaliste, d'ici une ou deux générations, est un pronostic que l'on peut tirer d'indices actuels,
avec des chances raisonnables de toucher juste. Il serait tout à fait déraisonnable de chercher à
décrire à l'avance les épisodes par lesquels le passage s'effectuera, et encore plus de construire
un tableau des activités économiques pays par pays. La première ligne évolutive, celle de l'unification des histoires humaines, dont lemoteur principal et presque exclusif a été politique, indique le point de vue qu'il est judicieux
d'adopter en premier, si l'on veut aborder ces questions délicates avec prudence et efficacité. Il
faut commencer par supputer la structure politique de la mondialisation. Pour ce faire, deuxconcepts doivent être retenus, qu'il vaut mieux désigner par des mots inédits, pour éviter toute
ambiguïté et tout malentendu. Convenons d'appeler - politie un groupe humain, dont les membres s'entendent entre eux, pour résoudre lesconflits inévitables entre eux par le recours à des dispositifs et des procédures efficaces, et
- transpolitie le système d'interaction défini par au moins deux polities, qui, faute dedispositif et de procédures " politiques ", courent le risque de voir leurs conflits dégénérer en
guerres. Des définitions plus ramassées désignent la politie comme un espace social de pacification tendancielle et la transpolitie comme un espace social de guerre virtuelle. Tenter de lire dans le présent une structure politique probable de la mondialisationrevient à examiner la planète définie comme transpolitie. Celle-ci dépend, pour sa constitution
et son fonctionnement, de deux paramètres principaux et presque exclusifs : le nombre des polities incluses dans le système et leur poids respectif les unes par rapport aux autres en6 termes de puissance mobilisable et/ou mobilisée. En combinant les deux paramètres, on
parvient a définir trois systèmes transpolitiques, dont les jeux et les logiques sont très différents : - un système dipolaire - dont la logique est la même dans les jeux à trois et quatre polities - réunit deux polities de puissance comparable et ne connaît aucune positiond'équilibre stable : à terme, il conduit irrésistiblement à l'unification impériale de la
transpolitie - un système polypolaire, rassemblant plusieurs dizaines de polities, estintrinsèquement instable, faute de règles du jeu et de la possibilité de les faire respecter :
chaque politie a intérêt à attaquer pour ne pas l'être, dont résulte une guerre sauvage perpétuée
et la marche irrésistible à l'unification politique par la guerre - un système oligopolaire unit et oppose de cinq à dix polities, dont aucune n'est assez puissante, pour l'emporter sur la coalition de toutes les autres, ce qui les conduit ensemble vers des positions successives d'équilibre stable à très long terme. La question de la " transpolitie planétaire " se précise. Quelle sera sa configuration laplus probable : di-, tri-, tétrapolaire, polypolaire ou oligopolaire ? La question peut paraître
inactuelle, puisque la situation présente ne répond à aucune de ces trois figures. La fin du jeu
dipolaire de la Guerre Froide a couronné l'hégémonie américaine. Une hégémonie ne définit
pas une transpolitie, mais une situation par nature transitoire. De deux choses l'une. Ou bien la politie hégémonique fonde un empire en bonne et due forme : en termes techniques, elle transforme la transpolitie en politie. Ou bien l'hégémonie se dissipe et un nouveau système transpolitique se met en place. La mondialisation, entendue comme l'intégration de la planèteet de l'humanité dans une politie américaine unique, doit être réputée impossible. Les
Américains n'en veulent pas et leur régime politique leur rendrait l'entreprise impraticable. Les autres n'en veulent pas et ont tous les moyens de s'y opposer avec succès, en portant lecoût d'une domination impériale à des niveaux prohibitifs. Le fait inédit d'une hégémonie
éclatante empêchée de toutes parts de s'achever en emprise impériale est une bonne clef, pour
comprendre et expliquer l'état présent du monde, mais elle est inutile pour pressentir l'avenir.
Une transpolitie mondiale reposant sur deux, trois ou quatre polities est possible et plausible. Une transpolitie polypolaire n'est pas impossible, mais peu probable. Une solutionoligopolaire est possible, plausible et probable. À l'horizon d'une ou deux générations, les
candidats pressentis sont connus : les États-Unis, la Chine, l'Inde, la Russie, l'Europe, le Brésil, l'Asie Antérieure. L'Afrique paraît devoir s'exclure du jeu pour une durée indéfinissable. L'issue n'est pas certaine, tant s'en faut, car la Russie est bien mal en point, l'Europe n'est pas une politie, le Brésil semble avoir dans son génie de toujours tromper lesespérances placées en lui, l'Asie Antérieure ne semble pas en état de produire prochainement
un oligopôle capable de faire figure sur la scène mondiale. Mais nous n'avons pas à prédire
l'avenir, une entreprise impossible et inutile. Nous décidons de retenir l'hypothèse oligopolaire, de manière à en tirer des enseignements pouvant servirà deux usages très
différents. Un usage pratique serait de prendre toutes mesures efficaces, pour favoriser la miseen place d'une transpolitie planétaire oligopolaire, si, du moins, cette issue apparaît comme la
plus souhaitable pour le genre humain. Un usage cognitif consisterait à tâcher de repérer dans
l'histoire en train de se faire les symptômes de l'émergence plausible de cette structure.I. La logique oligopolaire
7 Une analyse par modèle, qui réduit la réalité à ses composantes essentielles et
l'exempte de toute perturbation extérieure, révèle les trois caractères fondamentaux d'un jeu à
cinq-dix joueurs : leur stratégie dominante est défensive ; la distinction est tranchée entre la
guerre et la paix ; la paix repose sur l'équilibre. Par définition, un jeu n'est oligopolaire que si aucune politie n'est assez puissante, ni actuellement ni virtuellement, pour l'emporter sur la coalition de toutes les autres. Si l'on postule des joueurs informés et rationnels, la situation est telle que pas un d'eux ne doit viserl'hégémonie et encore moins l'empire, puisque c'est impossible. Une politie ne peut assigner à
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