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Les mŽthodes graphiques dans lÕhistoire et dans lÕenseignement 1

Chapitre

LES MƒTHODES GRAPHIQUES DANS

LÕHISTOIRE ET DANS LÕENSEIGNEMENT

Dominique TOURNÈS

Les figures sont souvent mal vues des mathŽmaticiens et enseignants actuels. Si elles sont, ˆ la rigueur, reconnues pour leur valeur heuristique, elles sont plus difficilement acceptŽes en tant quՎlŽment constitutif dÕune dŽmonstration. Les constructions gŽomŽtriques auraient-elles donc moins de rŽalitŽ mathŽmatique que les expressions algŽbriques formelles ? Ë travers lՎtude de quelques exem- ples tirŽs de lÕhistoire, je souhaite mettre en Žvidence la tension, la dialectique, les que les praticiens des mathŽmatiques, entre preuves gŽomŽtriques et preuves algŽbriques, entre mŽthodes numŽriques et mŽthodes graphiques. JÕexaminerai ensuite la situation dans les programmes en vigueur au lycŽe et je prŽsenterai le projet de recherche en cours ˆ lÕIREM de la RŽunion pour mettre au point, dans sur des mŽthodes graphiques. Pour ne pas me disperser, jÕillustrerai mon propos en me limitant ˆ deux sujets autour desquels on peut organiser une grande partie de lÕenseignement ˆ ce niveau : 1) la rŽsolution des Žquations du second et du directeurs pour dŽvelopper, en fait, des considŽrations de portŽe plus gŽnŽrale. PREMIéRE PARTIE : QUELQUES CONSIDƒRATIONS HISTORIQUES SUR LA DIALECTIQUE ENTRE PENSƒE GƒOMƒTRIQUE ET PENSƒE

ALGƒBRIQUE

doctorat intitulŽe Images, écritures et espace de médiation : étude anthropolo-

2 Chapitre

gique des pratiques graphiques dans une communauté de mathématiciens 1 avoir constatŽ que les figures Žtaient nombreuses dans les brouillons des mathŽ- maticiens et au tableau lors des sŽminaires, mais quasiment absentes dans les publications finales, elle a interrogŽ 41 mathŽmaticiens pour en savoir plus sur le statut des figures. Une rŽponse typique est la suivante 2 " B : Les mathématiques arrivent au moment où on s'affranchit des images. C'est-à-dire qu'on sort de l'activité psychique personnelle pour rentrer dans l'activité socialement échangeable sous la forme la plus conventionnelle, c'est-à-dire écrite, par rapport à ce qui est des mathématiques, au moment où précisément, ça prend sa forme symbolique, et donc on s'est affranchi des images. Et en fait, c'est une forme, pour moi, de libération. [...] Beaucoup de choses peuvent se dessiner, et puis, il y a très peu de choses qui finalement deviennent des maths à partir du dessin. Donc l'épreuve de vérité, c'est quand c'est devenu une formule. » Cette citation me semble assez caractŽristique de lՎvolution historique gŽnŽ-

rale des mathŽmatiques depuis lÕAntiquitŽ, Žvolution qui va dÕune pensŽe gŽomŽ-

trique vers une pensŽe algŽbrique. Chez Euclide et les mathŽmaticiens grecs, la primautŽ revient aux figures. Alors que, chez les ƒgyptiens et les Babyloniens, la figure Žtait un simple schŽma servant de guide ˆ des calculs portant sur des nombres ou des grandeurs liŽs ˆ des ŽlŽments de cette figure, chez les Grecs, la figures portent en elles davantage de sens que le discours qui tente de dŽcrire leur construction et leurs propriŽtŽs. La diagonale du carrŽ existe : tout le monde la voit comme rŽsultat dÕune construction ŽlŽmentaire incontestable. Pourtant, aucun nombre ne peut la dŽcrire, son rapport au c™tŽ du carrŽ est irrationnel, contraire ˆ la raison, Ç indicible È au-delˆ du simple programme de construction qui lÕa lorsquÕil sÕagit de construire un triangle ŽquilatŽral sur un segment donnŽ, Euclide utilise, sans dŽmontrer leur existence, les points dÕintersection des deux cercles tracŽs. LÕexistence de ces points fait partie de la figure : cÕest ce que lÕon voit, qui va de soi et quÕon ne dit pas. Les grandeurs et les lignes sont implicitement des objets continus. Tout repose sur ce principe de continuitŽ. LA CONSTRUCTION DES ƒQUATIONS PAR INTERSECTION DE LIGNES Jusque vers 1750, les mathŽmatiques vont tre dominŽes par cette pensŽe formulŽs en langage gŽomŽtrique. Les rŽsoudre consistera ˆ obtenir leurs 1

Muriel Lefebvre, Images, écritures et espace de médiation : étude anthropologique des pratiques

Pasteur, Strasbourg, 2001.

2 Les mŽthodes graphiques dans lÕhistoire et dans lÕenseignement 3 solutions comme intersection de lignes tracŽes dÕun mouvement continu. de Descartes en 1637, ne change rien de fondamental ˆ cette conception. Au XI e 3 sa construction par lÕintersection de deux courbes gŽomŽtriques (en gŽnŽral deux rellement. Chez al-Khayyam, comme chez la plupart de ses successeurs jusquՈ Bolzano, toutes les tentatives pour prouver cette existence reviennent ˆ montrer toutes deux Žtant supposŽes tracŽes dÕun mouvement continu. Encore et toujours ce principe implicite de continuitŽ !

Chez Descartes

4 , lՎquation dÕune courbe appara"t clairement comme un outil dÕanalyse au service de la gŽomŽtrie, une sorte de programme codŽ permettant de rŽaliser la construction de la courbe par points ˆ partir de sous-programmes ŽlŽ- mentaires de construction pour lÕaddition, la soustraction, la multiplication, la naire et des compas cartŽsiens conus pour lÕinsertion de n moyennes proportion- nelles 5 . CÕest dÕailleurs lÕune des raisons pour lesquelles une Žquation ne suffit pas fournit quÕune construction par points, par opposition au tracŽ dÕun mouvement formule algŽbrique pour exprimer les racines dÕune Žquation nÕest pas considŽrŽ comme satisfaisant : cela ne suffit pas ˆ prouver lÕexistence de ces racines, ni ˆ

dŽterminer leur grandeur, tant quÕon nÕa pas Ç traduit È cette formule en une

construction gŽomŽtrique. des coefficients de lՎquation (on y reviendra dans la seconde partie), Descartes se penche sur les formules de Cardan et, loin de suggŽrer que lÕon puisse sÕen servir pour un calcul numŽrique par extraction ˆ la main des racines carrŽes et des racines cubiques, il transforme ces formules en programme de construction tionnelles lorsque lՎquation a une seule racine rŽelle, ˆ la trisection dÕun angle constructions de base Ð lÕinsertion des deux moyennes et la trisection de lÕangle Ð 3 Roshdi Rashed & Bijan Vahabzadeh, Al-Khayyam mathématicien, Paris : Blanchard, 1999. 4

RenŽ Descartes, La Géométrie, appendice au Discours de la méthode, Leyde, 1637 ; rŽŽd., New

York : Dover, 1954.

5

Op. cit., p. 297-298 et p. 370-371.

4 Chapitre

rentrent dans son schŽma gŽnŽral de lÕintersection dÕune parabole fixe et dÕun cercle 6

Depuis Descartes jusque vers le milieu du XVIII

e lution des Žquations algŽbriques va se faire ainsi par intersection de deux courbes choisies parmi les plus simples possibles, la notion de Ç simplicitŽ È variant dÕailleurs dÕun auteur ˆ lÕautre suivant les points de vue adoptŽs. Avec le dŽveloppement du calcul infinitŽsimal, la situation se complexifie, mais ne change pas fondamentalement de nature. DÕun c™tŽ, lÕoutil algŽbrique se perfectionne et se gŽnŽralise, au point que lÕon en vient ˆ accepter des expressions par ailleurs, on cherche toujours ˆ construire par des mouvements continus siens Ð les nouvelles courbes transcendantes qui apparaissent en grand nombre dans les applications. Parmi les nouveaux procŽdŽs de construction, on peut citer, par exemple, le mouvement tractionnel, ˆ partir duquel Leibniz conoit lÕidŽe plus gŽnŽralement, de tracer les courbes intŽgrales des Žquations diffŽrentielles 7 Mme dans ce domaine du calcul infinitŽsimal en pleine expansion, on

algŽbrique ne suffit pas ˆ prouver lÕexistence dÕune intŽgrale dÕune Žquation dif-

fŽrentielle tant quÕon nÕa pas tirŽ une construction gŽomŽtrique de cette expres- sion. CÕest le tracŽ de la courbe, autrement dit la figure, qui est le but recherchŽ, pas la formule algŽbrique ! On rencontre un excellent exemple de cette dŽmarche dans un traitŽ de Vincenzo Riccati 8 , paru ˆ Bologne en 1752, dont on pourrait traduire le titre par Ç De lÕemploi du mouvement tractionnel pour la construction

des Žquations diffŽrentielles È. Riccati sÕintŽresse ˆ lՎquation diffŽrentielle

abdq (f"q)b 2 +q 2 =dx Elle est intŽgrable par quadratures. Pour Žquation dÕune courbe intŽgrale, il trouve x="logz"a b f 2 +b 2 ( +logz+a b f 2 +b 2 o lÕon utilise le logarithme de sous-tangente ab f 2 +b 2 . Cette formule obtenue, la rŽsolution nÕest pas du tout, contrairement au point de vue qui serait adoptŽ 6

Op. cit., p. 397-401.

7 Gottfried Wilhelm Leibniz, Ç Supplementum geometri¾ dimensori¾ seu generalissima omnium tetragonismorum effectio per motum : similiterque multiplex constructio line¾ ex data tangentium conditione È, Acta eruditorum, sept. 1693. 8 Vincenzo Riccati, De usu motus tractorii in constructione aequationum differentialium commen- tarius, Bononi¾ : Ex typographia L¾li a Vulpe, 1752. Les mŽthodes graphiques dans lÕhistoire et dans lÕenseignement 5 aujourdÕhui, considŽrŽe comme achevŽe. Dans un esprit encore cartŽsien, Riccati

Žcrit

9 expose une construction par points de la courbe intŽgrale ˆ partir de la courbe logarithmique. Par ailleurs, il compare cette solution avec une seconde construction, de type tractionnel, beaucoup plus simple et, surtout, conduisant au

tracŽ de la courbe dÕun trait continu, ce qui met en Žvidence que lÕapproche

algŽbrique nÕest pas forcŽment la meilleure ! UN BASCULEMENT SOUDAIN DE LA GƒOMƒTRIE VERS LÕALGéBRE

sŽe par les traitŽs dÕEuler, premiers traitŽs qui sont centrŽs sur les fonctions plut™t

que sur les courbes, sur les algorithmes algŽbriques plut™t que sur la construction des figures. RŽsoudre une Žquation algŽbrique ou une Žquation diffŽrentielle, cela ne se fait plus par le tracŽ et lÕintersection de lignes, mais par le calcul dÕexpres- sions algŽbriques reprŽsentant les solutions en des sens de plus en plus larges : on accepte dŽsormais une expression algŽbrique infinie, un algorithme infini tel une sŽrie, un produit infini ou une fraction continue, comme dŽcrivant parfaitement la solution cherchŽe tout en assurant son existence, sans quÕil soit nullement besoin de revenir ˆ la gŽomŽtrie. Le support des figures et de lÕintuition gŽomŽtrique Žtant soudain ŽvacuŽ, les discussions vont dŽsormais porter sur le sens de ces algorithmes infinis dont on peut douter de la validitŽ dans la mesure o ils sont, doutes, exprimŽs notamment par Abel, conduiront Cauchy, puis Weierstrass, ˆ Žlaborer une thŽorie des limites et de la convergence permettant lÕacceptation en mathŽmatiques, sous certaines conditions, de ces processus infinis. se fier ˆ lÕintuition gŽomŽtrique. Il reste quand mme la question des imaginaires, un peu ˆ contre-courant, pour laquelle la reprŽsentation gŽomŽtrique et le retour ˆ des figures sont le seul moyen convaincant trouvŽ pour lŽgitimer ces Žcritures formelles un peu mystŽrieuses contenant des racines carrŽes de nombres nŽgatifs. Mais lՎvolution dÕensemble est irrŽversible et tout cela trouvera sa conclusion dans les dŽbats sur les fondements de la fin du XIX e refondation des mathŽmatiques sur lÕarithmŽtique plut™t que sur la gŽomŽtrie. Les objets premiers sont ˆ nouveau les nombres entiers, et non plus les figures, dans une sorte de curieux retour ˆ lÕancienne conception pythagoricienne selon laquelle Ç tout est nombre È. CÕest sur ce schŽma que nous vivons encore aujourdÕhui : dans nos Žtudes universitaires, on part de lÕensemble des entiers naturels, introduit par les axiomes de Peano, puis, ˆ partir des entiers naturels, on construit successi- 9

Op. cit., p. 26.

6 Chapitre

vement les nombres relatifs, rationnels, rŽels et complexes. La gŽomŽtrie plane appara"t alors en tant quՎtude de lÕensemble des couples de nombres rŽels, cÕest- ˆ-dire comme un produit dŽrivŽ. La position la plus extrŽmiste, exprimŽe par Jean

DieudonnŽ ˆ lՎpoque des mathŽmatiques modernes, a consistŽ ˆ sՎcrier Ç Ë bas

Euclide ! È et ˆ publier, en guise de provocation, un livre de gŽomŽtrie sans

aucune figure 10 . On aboutit ainsi ˆ la conception exprimŽe par le mathŽmaticien citŽ au dŽbut : " Les mathématiques arrivent au moment où on s'affranchit des images. [...] l'épreuve de vérité, c'est quand c'est devenu une formule. » Plus de figures, plus de courbes, mais des nombres, des coordonnŽes, des fonctions et des formules ! LE CAS DE LA MƒTHODE DÕEULER POUR LES ƒQUATIONS DIFFƒRENTIELLES penchons-nous sur le cas de lÕexpression et de la justification de la mŽthode celui de la rŽsolution des Žquations algŽbriques. Ždition, celui consacrŽ au calcul intŽgral, a paru en 1798 11 . CÕest un traitŽ lÕanalyse par Cauchy. Voyons comment Lacroix prŽsente lՎvolution du calcul infinitŽsimal 12 " On découvrit le Calcul différentiel pour mener des tangentes aux courbes, c'est-à-dire, pour résoudre le Problme direct des tangentes. On s'occupa ensuite du Calcul intégral, pour parvenir aux équations primitives des courbes par les propriétés de leurs tangentes ; mais les progrès et les nom- breuses applications de ce Calcul ont fait abandonner la dénomination de mŽthode inverse des tangentes qui ne convenait qu'à un seul de ses usages. Dans les premiers tems on chercha à déterminer par les aires ou même par les arcs de quelques courbes connues, l'ordonnée de la courbe demandée ; depuis on a laissé ces constructions de côté, parce que, quelqu'élégantes qu'elles fussent dans la théorie, elles étoient toujours moins commodes et sur- tout moins exactes dans la pratique, que les formules approximatives qui ont pris leur place. » Ainsi, il est clair que le contexte et le vocabulaire de la gŽomŽtrie (courbes, tangentes, aires et arcs, cÕest-ˆ-dire quadrature et rectification des courbes, constructions...) sont en voie progressive de disparition. Ë la suite dÕEuler, on 10

Jean DieudonnŽ, Algèbre linéaire et géométrie élémentaire, Paris : Hermann, 1964.

11

Sylvestre-Franois Lacroix, Traité du calcul différentiel et du calcul intégral, vol. 2, Paris :

Duprat, an VI (1798).

12

Op. cit., p. 296.

Les mŽthodes graphiques dans lÕhistoire et dans lÕenseignement 7

sÕintŽresse de plus en plus ˆ des formules approximatives, cÕest-ˆ-dire ˆ des

dŽveloppements en sŽrie, mieux adaptŽs, plus fŽconds, tant pour les questions thŽoriques que pour les questions numŽriques. Le calcul infinitŽsimal nÕest plus liŽ ˆ une figure gŽomŽtrique, une courbe quÕil faudrait construire ou dont il fau- Pourtant, la gŽomŽtrie est encore solidement ancrŽe chez Lacroix. LorsquÕil parle de la mŽthode dÕEuler, il Žcrit 13 " Ce qui précède fait voir que les équations différentielles à deux variables sont toujours possibles [...] : la même chose se prouve aussi par des considé- rations géométriques. [...] On voit, qu'en continuant ce procédé, on tracera un polygone qui différera d'autant moins de la courbe à laquelle appartient l'équation proposée, qu'on en multipliera les côtés. Il résulte aussi de cette construction qu'une équation différentielle du premier ordre représente une infinité de courbes, puisqu'on peut prendre le premier point M où on voudra. » Rien nÕa changŽ ici par rapport ˆ la conception originelle leibnizienne selon laquelle une courbe est un polygone ayant une infinitŽ de c™tŽs infiniment petits. Ayant rŽalisŽ une construction qui nÕest rien dÕautre que la mŽthode dÕEuler dans dŽjˆ affirmŽ, en 1694 14 " Nous obtiendrons de la sorte un polygone [...] remplaçant la courbe incon- nue, c'est-à-dire une courbe MŽcanique tenant lieu de courbe GŽomŽtrique, du même coup nous voyons bien qu'il est possible de faire passer la courbe Géométrique par un point donné [...], puisque une telle courbe est la limite où en définitive sÕeffacent progressivement les polygones convergents. »

Avec Euler

15 , puis Cauchy 16 , il nÕy aura plus ce support gŽomŽtrique. La mŽthode dÕEuler-Cauchy sera dŽfinie par des formules algŽbriques et prŽsentŽe dÕemblŽe comme une mŽthode dÕapproximation numŽrique dont la prŽcision dŽpend du pas de la subdivision choisie. Chez Cauchy, il y aura mme une preuve de la convergence assortie dÕune Žvaluation de lÕerreur commise. Lˆ encore, on glisse insensiblement du cadre gŽomŽtrique vers le cadre algŽbrique, du cadre 13

Op. cit., p. 287.

14 Gottfried Wilhelm Leibniz, La naissance du calcul différentiel, introduction, traduction et notes par Marc Parmentier, Paris : Vrin, p. 304. 15 Leonhard Euler, Institutionum calculi integralis volumen primum, Saint-Petersbourg, 1769,

sectio secunda, caput VII : Ç De integratione ¾quationum differentialium per approximationem È.

16

Augustin-Louis Cauchy, Équations différentielles ordinaires. Cours inédit (fragment), intro-

duction de Christian Gilain, Paris : ƒtudes vivantes & New York : Johnson Reprint Corporation, 1981.

8 Chapitre

graphique vers le cadre numŽrique. Le traitŽ dÕEuler et le cours de Cauchy ne sÕappuient plus sur le support dÕune figure. Alors que, auparavant, on construisait une figure par des procŽdŽs gŽomŽtriques afin de mesurer sur elle les valeurs numŽriques dont on avait besoin pour la pratique, de nos jours, cÕest le contraire : on fait calculer par nos ordinateurs des valeurs numŽriques qui servent ensuite ˆ Žtablir des reprŽsentations graphiques, non pour calculer, mais pour visualiser les rŽsultats du calcul. Le graphique a changŽ de place et de fonction.

SECONDE PARTIE : LES MƒTHODES GRAPHIQUES DANS

LÕENSEIGNEMENT

Actuellement, avec lÕapparition des calculatrices graphiques, des grapheurs et enseignement organisŽ de logique formelle et lÕaffaiblissement continu de la place mŽthodes graphiques soit, de fait, inŽluctable. Il y a lˆ, dÕune part, une faon dÕexploiter pleinement les outils modernes et de former les jeunes ˆ leur utili- sation, dÕautre part, la possibilitŽ de favoriser lÕapprentissage dÕautres types de raisonnement, davantage fondŽs sur lÕinduction, lÕexpŽrimentation, lÕobservation. dans les classes de lycŽe : en lÕabsence dÕune construction rigoureuse des nombres continuitŽ, de dŽrivŽe et dÕintŽgrale, il nÕy a plus aucun moyen de dŽmontrer

lÕexistence des solutions des Žquations algŽbriques et diffŽrentielles rencontrŽes ˆ

mme que lÕexistence des primitives des fonctions continues. Dans ces conditions, il est assez ridicule de se livrer ˆ des simagrŽes comme celle induite par le docu- ment dÕapplication des programmes de sŽrie S qui prŽcise 17 " Dans la rédaction de la solution à un problème, une simple référence au tableau de variation suffit pour justifier l'existence et l'unicité d'une solution d'une équation du type f(x)=k sur un intervalle. Il n'est pas besoin d'évoquer la continuité. » Un autre exemple est fourni par les querelles qui ont divisŽ les professeurs de terminale S pour savoir sÕil Žtait possible de prouver rigoureusement lÕexistence de la fonction exponentielle ˆ partir de la mŽthode dÕEuler ou celle de la fonction logarithme ˆ partir de la quadrature de lÕhyperbole. Quelle preuve pourrait-on envisager, dans lÕun ou lÕautre cas, alors quÕon ne dispose dÕaucun fondement solide sur lequel b‰tir ? 17 Inspection gŽnŽrale de mathŽmatiques, Application des programmes de mathématiques (seconde, premières ES et S, terminales ES et S), 2005, p. 10. Les mŽthodes graphiques dans lÕhistoire et dans lÕenseignement 9 Ne serait-il pas moins hypocrite de revenir ˆ une intuition gŽomŽtrique de la continuitŽ et de lÕintersection des courbes dans le cas de la rŽsolution des Žqua- tions algŽbriques, du polygone dÕEuler-Cauchy dans le cas des Žquations diffŽ- rentielles, conformŽment ˆ ce que nous avons vu plus haut dans notre panorama de lՎvolution historique de ces notions ? PuisquÕon ne dispose pas, au lycŽe, dÕune thŽorie des nombres rŽels et des limites, ne serait-il pas plus formateur de XIX e de faon cohŽrente et productive ? Les programmes actuels vont dans ce sens, le disent plus ou moins dans leurs introductions, mais nÕosent pas franchir vŽritablement le pas dans le dŽtail de leurs contenus, sans doute au nom dÕune certaine orthodoxie quÕil serait mal vu de transgresser. Voici, par exemple, ce quÕon peut lire dans lÕintroduction du cycle terminal STI 18 " Les représentations graphiques tiennent une place importante : en effet, outre leur intérêt propre, elles permettent de donner un contenu intuitif et concret aux objets mathŽmatiques étudiés dans les différentes parties du pro- gramme ; leur mise en oeuvre développe aussi les qualités de soin et de préci- sion et met l'accent sur des réalisations combinant une compétence manuelle et une réflexion théorique. Plus largement, on développera une vision gŽo- service de l'intuition et de l'imagination son langage et ses procédés de représentation. » CÕest dans cet esprit que jÕai entrepris une recherche-action dans une classe de terminale S afin dՎlaborer et dÕexpŽrimenter une progression accordant une large place aux mŽthodes graphiques 19 . Il sÕagit, en quelque sorte, de faire revivre aux cadre dans leurs recherches et leurs raisonnements. Ë titre dÕexemples, je vais prŽsenter ici deux des activitŽs que jÕai mises au point. RƒSOLUTION DES ƒQUATIONS AVEC DES DROITES, DES CERCLES ET UNE

PARABOLE FIXE

dÕun compas et dÕune parabole fixe, donnŽe par son tracŽ sur une feuille de papier ou sur un transparent, ou matŽrialisŽe par un dŽcoupage dans du carton ou du 18 " Sciences et technologies industrielles », 2002, p. 7. 19

LÕexpŽrimentation sÕest dŽroulŽe au lycŽe Le Verger (Sainte-Marie, La RŽunion), dans la classe

de M. Jean-Claude Lise, que je remercie pour son accueil et sa collaboration.

10 Chapitre

ˆ lÕaide de droites, de cercles et dÕune parabole donnŽe (qui dŽtermine lÕunitŽ de

longueur et qui a pour Žquation y=x 2 ). Globalement, jÕai suivi les conseils de Joseph-Balthazar BŽrard, qui, dans ses Opuscules mathématiques de 1810,

Žcrivait

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