[PDF] [PDF] UNIVERSITÉ PARIS-EST École Doctorale Lettres Sciences - Thèses





Previous PDF Next PDF



[PDF] Les formes du pouvoir à lépoque des premiers rois Lagides

3 1 Les pharaons de la Deuxième Période Intermédiaire: les Hyksôs 9 G Husson et D Valbelle L'État et les institutions en Égypte des premiers 



[PDF] Egypte Une civilisation multimillénaire - Cliofr

Née du Nil l'Egypte pharaonique a produit une « civilisation première » qui -278 Célébration des premières Ptolemaia en l'honneur de Ptolémée I



[PDF] UNIVERSITÉ PARIS-EST École Doctorale Lettres Sciences - Thèses

24 juil 1997 · 5 J -M André et M -Fr Baslez Voyager dans l'Antiquité Paris 1993 contemporainistes à ceux des « chefs d'Etat » – au premier rang 



[PDF] Lidéologie et les pratiques monarchiques des rois grecs en - CORE

28 avr 2016 · Médailles de Paris nous devinons sa puissance : première monnaie antérieure des cités-états mais comment les rois hellénistiques se 



[PDF] le discours géographique à lépoque hellénistique dÉratosthène à

Perçu dans l'historiographie moderne comme la première géographie l'œkoumène chez les Grecs a été transformée avec la montée en puissance de Rome

UNIVERSITÉ PARIS-EST

École Doctorale Lettres, Sciences Humaines et Sciences Sociales

Thèse de Doctorat en Histoire grecque

Emerik FLAMMENT

LES VOYAGES OFFICIELS ET LES DÉPLACEMENTS DES PERSONNAGES PUBLICS

EN ORIENT

DE LA MORT D'ALEXANDRE LE GRAND AU DÉBUT DE L'EMPIRE ROMAIN (323-30 av. J.-C.) Entre cérémonial politique et pratique culturelle

Sous la direction de Marie-Françoise BASLEZ

2008

UNIVERSITÉ PARIS-EST

École Doctorale Lettres, Sciences Humaines et Sciences Sociales

Thèse de Doctorat en Histoire grecque

Emerik FLAMMENT

LES VOYAGES OFFICIELS ET LES DÉPLACEMENTS DES PERSONNAGES PUBLICS

EN ORIENT

DE LA MORT D'ALEXANDRE LE GRAND AU DÉBUT DE L'EMPIRE ROMAIN (323-30 av. J.-C.) Entre cérémonial politique et pratique culturelle

Sous la direction de Marie-Françoise BASLEZ

Professeur à l'Université de Paris-Est

Président du jury : Roland Etienne, Professeur à l'Université de Paris 1 Rapporteurs : Ivana Savalli-Lestrade, Chargé de recherche au CNRS Michel Molin, Professeur à l'Université de Paris 13 2008
Je tiens, au seuil de cette étude, à adresser mes remerciements à ma Directrice de recherches, M e Marie-Françoise Baslez qui, depuis la maîtrise jusqu'à ce jour, a suivi avec la plus grande attention l'évolution de mes travaux et de ma réflexion ; sans le soutien qu'elle

n'a cessé de me témoigner tout au long de ces années parfois difficiles, cette thèse n'aurait pu

aller à son terme. Ma reconnaissance s'adresse également à toute l'équipe du Centre Jean-Charles

Picard de l'Université Paris-Est, notamment à sa directrice, Me Françoise Prévot, à qui je dois

d'avoir pu séjourner à l'Ecole Française de Rome, ainsi qu'à M Philippe Blaudeau qui m'a permis de pouvoir développer certaines de mes analyses et les soumettre à la critique de la communauté scientifique dans le cadre d'un colloque organisé par ses soins. 1

Introduction

Qu'il s'agisse des souverains hellénistiques ou des imperatores romains des deux

derniers siècles de la République, il apparaît clairement, au travers de la documentation

disponible, notamment littéraire, que l'acte de voyager occupait une place tout à fait centrale

dans la carrière et l'existence de ces personnages : les Vies des hommes illustres comme les

histoires générales de la conquête romaine sont ainsi scandées par leurs déplacements

incessants. John Ma l'a exprimé avec force : " A l'époque hellénistique, le perpétuel

mouvement du souverain représente un élément constituant du royaume et de la royauté.

Toute l'histoire politique de la haute époque hellénistique, l'âge des rois, est marquée par les

rois en mouvement »

1. L'élargissement géographique du monde grec induit par l'expédition

d'Alexandre le Grand, puis sa fragmentation politique à l'époque des Diadoques en

royaumes souvent immenses et hétérogènes eurent en effet pour corollaire le développement

voire l'explosion de la pratique du voyage royal. Sans aller jusqu'à parler de nomadisme royal comme Pierre Briant a pu le faire au sujet du roi perse2, force est ainsi de constater

l'extraordinaire mobilité des souverains hellénistiques à l'intérieur de leurs royaumes, mais

aussi, en certaines occasions - militaires, diplomatiques voire touristiques -, à l'échelle de l'ensemble du bassin méditerranéen oriental

3. Même les Lagides, longtemps considérés

comme particulièrement sédentaires, effectuèrent de nombreux déplacements dans la chôra

égyptienne

4. A Rome, c'est évidemment l'extension de l'empire par la conquête de l'Orient

grec qui imposa la mobilité des imperatores dans le cadre de leurs carrières militaires et

1 J. Ma, " Dans les pas d'Antiochos III : l'Asie Mineure entre pouvoir et discours », dans Fr. Prost (dir.),

L'Orient méditerranéen de la mort d'Alexandre aux campagnes de Pompée. Cités et royaumes à l'époque

hellénistique, Actes du colloque international de la SOPHAU, Rennes, 4-6 avril 2003, Rennes-Toulouse, 2003,

p. 243 ; plus généralement voir J. Ma, Antiochos III et les cités d'Asie Mineure occidentale, trad. fr. Paris, 2004

(2001²).

2 P. Briant, " Le nomadisme du Grand Roi », Iranica Antiqua, 23, 1988, p. 267-269.

3 Voir en ce sens I. Savalli-Lestrade, " L'élaboration de la décision royale dans l'Orient hellénistique », dans Fr.

Prost (dir.), L'Orient méditerranéen de la mort d'Alexandre aux campagnes de Pompée. Cités et royaumes à

l'époque hellénistique, Actes du colloque international de la SOPHAU, Rennes, 4-6 avril 2003, Rennes-

Toulouse, 2003, p. 28-31.

4 W. Clarysse, " The Ptolemies visiting the Egyptian Chora », dans L. Mooren (éd.), Politics, Administration

and Society in the Hellenistic and Roman World, Proceedings of the International Colloquium, Bertinoro, 19-

24 July 1997, Louvain, 2000, p. 29-53.

2

administratives5, même s'il convient de ne pas négliger le rôle joué par le philhellénisme de

ces personnages 6. Dans un ouvrage de synthèse sur le voyage dans l'Antiquité, le premier en langue

française, Jean-Marie André et Marie-Françoise Baslez prennent le parti d'appliquer à ces

déplacements la terminologie du " voyage officiel », dont l'image est aujourd'hui

particulièrement médiatisée et dont l'usage comme concept à part entière du langage

politique moderne est désormais répandu, sans que son contenu en soit forcément précisé7.

Or, l'emploi de ce concept pour désigner des réalités antiques ne va pas sans poser

problème : en établissant un rapide bilan historiographique de cette pratique, Jean-Marie

André et Marie-Françoise Baslez constatent et déplorent d'ailleurs l'absence d'étude

d'ensemble consacrée à celle-ci

8. On ne peut, il est vrai, que s'étonner de la rareté des

travaux relatifs aux déplacements des souverains hellénistiques et des magistrats romains,

alors même que ceux-ci occupent une place primordiale dans les sources littéraires et

jouaient un rôle capital dans la vie politique de l'époque.

Jusqu'à une date récente, le voyage dans l'Antiquité n'a que très peu suscité l'intérêt

des historiens. Il a fallu attendre 1974 pour que soit publiée la première tentative de synthèse

sur le voyage antique : celle-ci est à mettre au compte de Lionel Casson, dont l'ambition

affichée était précisément de proposer le premier ouvrage traitant intégralement de ce sujet9.

La déception du lecteur est à la hauteur des espoirs suscités par les intentions de l'auteur tant

l'ensemble se révèle sommaire

10. Si, dans une perspective sociologique, Lionel Casson

distingue certes les déplacements effectués pour le compte de l'Etat des voyages à vocation professionnelle, religieuse ou culturelle, il ne leur consacre aucune analyse spécifique, se concentrant davantage sur les techniques et l'infrastructure du voyage11. C'est également le

5 J.-M. André et M.-Fr. Baslez, Voyager dans l'Antiquité, Paris, 1993, p. 95-118.

6 Voir notamment J.-L. Ferrary, Philhellénisme et impérialisme. Aspects idéologiques de la conquête romaine

du monde hellénistique, Rome, 1988, p. 497-615.

7 J.-M. André et M.-Fr. Baslez, 1993, p. 103-114 (pour les imperatores) et p. 167-172 (pour les souverains

hellénistiques). Avant eux, déjà, Jean Rougé avait cru pouvoir user d'une telle dénomination pour qualifier les

déplacements des empereurs romains et des monarques orientaux : J. Rougé, " Voyages officiels en

Méditerranée orientale à la fin de la République et au premier siècle de l'Empire », REA, 55, 1953, p. 294-300.

8 J.-M. André et M.-Fr. Baslez, 1993, p. 552.

9 L. Casson, Travel in the Ancient World, Londres, 1974.

10 Voir en ce sens le compte rendu de Chr. Le Roy, " Voyageurs et marins de l'Antiquité », REG, 88, 1975, p.

178-181.

11

L. Casson, 1974, p. 76-85 et 128-137.

3 cas dans l'ouvrage de Raymond Chevallier publié en 1988 et intitulé Voyages et déplacements dans l'empire romain

12 : derrière ce titre prometteur, l'étude proposée

s'apparente en fait à un catalogue de sources ; la typologie esquissée par l'auteur se révèle en

outre très artificielle et ne fait, en tout état de cause, jamais intervenir le concept de " voyage

officiel »

13. On n'en trouve pas non plus trace dans un recueil d'articles sur le voyage antique

publié à Gênes en 1991

14. Depuis l'ouvrage de Jean-Marie André et Marie-Françoise Baslez,

les travaux sur la mobilité dans l'Antiquité se sont, toutes proportions gardées, multipliés15,

sans que les déplacements des souverains hellénistiques et des imperatores romains ne soient

pour autant envisagés à nouveau sous l'angle du " voyage officiel ». L'application à

l'Antiquité du concept moderne semble donc montrer ses limites. En élargissant la perspective aux autres périodes historiques, il apparaît que cette

catégorie, largement utilisée par les historiens de l'époque contemporaine au sujet des

déplacements des chefs d'Etat et de gouvernements, a aussi eu tendance à se répandre dans

l'historiographie médiévale et moderne pour désigner les voyages des rois de France à

l'intérieur du royaume

16. Là encore toutefois, le concept n'a jamais été clairement défini17.

12 R. Chevallier, Voyages et déplacements dans l'empire romain, Paris, 1988.

13 Vraisemblablement à des fins d'organisation de son catalogue, l'auteur distingue notamment déplacements

administratifs (p. 153-173), voyages diplomatiques (p. 205-237) et campagnes militaires (p. 239-271) ; or, ces

catégories ne rendent que très imparfaitement compte des réalités antiques.

14 G. Camassa et S. Fasce (éd.), Idea e realtà del viaggio. Il viaggio nel mondo antico, Gênes, 1991.

15 H. Duchêne (éd.), Voyageurs et Antiquité classique, Dijon, 2003 ; Cl. Moatti (éd.), La mobilité des personnes

en Méditerranée de l'Antiquité à l'époque moderne. Procédures de contrôle et documents d'identification,

Rome, 2004 ; M. G. Angeli Bertinelli et A. Donati (éd.), Le vie della storia. Migrazioni di popoli, viaggi di

individui, circolazione di idee nel Mediterraneo antico, Atti del II Incontro Internazionale di Storia Antica,

Gênes, 6-8 octobre 2004, Rome, 2006 ; Cl. Moatti et W. Kaiser (dir.), Gens de passage en Méditerranée de

l'Antiquité à l'époque moderne : procédures de contrôle et d'identification, Actes des colloques " Gens de

passage dans les villes et les ports de la Méditerranée, de l'Antiquité à l'époque moderne » , Aix en Provence,

23-24 mai 2003 et " La mobilité des personnes en Méditerranée, de l'Antiquité à l'époque moderne : formes

d'identification et de falsification », Naples, 2-4 décembre 2004, Paris, 2007.

16 Voir les différentes contributions réunies dans J. W. Derymez, O. Ihl et G. Sabatier (dir.), Un cérémonial

politique : les voyages officiels des chefs d'Etat, Paris, 1998. Sur les déplacements officiels des présidents de la

République française, voir N. Mariot, Bains de foule. Les voyages présidentiels en province, 1888-2002, Paris,

2006 et pour un exemple de voyage royal, voir J. Boutier, A. Dewerpe et D. Nordman, Un tour de France royal.

Le voyage de Charles IX (1564-1566), Paris, 1984.

17 J. W. Derymez, O. Ihl et G. Sabatier, " Introduction », dans J. W. Derymez, O. Ihl et G. Sabatier (dir.), Un

cérémonial politique : les voyages officiels des chefs d'Etat, Paris, 1998, p. 10-14, se contentent de souligner

4 Ce bilan historiographique, aussi succinct soit-il, permet en tout cas de mettre en

lumière le caractère problématique de la question du " voyage officiel » antique : il suggère

en premier lieu la nécessité de réfléchir sur le contenu de ce concept et incite, dans un second

temps, à s'interroger sur la validité et l'intérêt historique de son usage pour caractériser les

déplacements des souverains hellénistiques et des magistrats romains. C'est ce qui constitue l'objet de cette recherche, dont il convient de préciser maintenant les limites. Le choix qui a été fait de se limiter aux rois et aux imperatores appelle en effet

quelques explications. Ce choix, progressif et délibéré, tient d'abord à l'importance de la

documentation disponible : si les voyages des souverains hellénistiques et des imperatores romains sont, du fait même de l'importance de ces personnages, relativement bien informés

par les auteurs anciens, les renseignements relatifs aux déplacements des représentants

royaux ou des magistrats romains de second rang sont plus rares et on ne dispose guère à leur

sujet de récits développés dans les sources littéraires, base d'une histoire des représentations.

D'autre part, certaines catégories de personnages qui effectuaient des déplacements

fonctionnels et pourraient, à ce titre, être considérées comme des " voyageurs officiels » ont

déjà fait l'objet de travaux et même de synthèse auxquels il paraît difficile d'apporter des

éléments réellement novateurs : c'est notamment le cas des ambassadeurs grecs et romains qui n'ont donc pas été retenus ici 18.

combien le " voyage officiel » apparaît comme une réalité complexe, hétérogène et changeante selon les lieux,

les époques et les hommes ; à aucun moment les auteurs ne cherchent à définir ce concept.

18 Aujourd'hui encore, les principales références concernant les ambassadeurs grecs de la période classique

demeurent D. J. Mosley, Envoys and Diplomacy in Ancient Greece, Wiesbaden, 1973 et F. Adcock et D. J.

Mosley, Diplomacy in Ancient Greece, Londres, 1975 ; on peut y ajouter, plus récemment, L. Piccirilli,

L'invenzione della diplomazia nella Grecia antica, Rome, 2002. Pour les trois derniers siècles de notre ère, la

pratique diplomatique grecque a surtout été étudiée dans le contexte romain : voir, principalement, F. Canali De

Rossi, Le ambascerie dal mondo greco a Roma in età repubblicana, Roma, 1997 (qui rassemble les sources) ;

M. Coudry, " Contrôle et traitement des ambassadeurs étrangers sous la République romaine », dans Cl. Moatti

(éd.), La mobilité en Méditerranée de l'Antiquité à l'époque moderne. Procédures de contrôle et documents

d'identification, Rome, 2004, p. 529-565 ; J. Linderski, " Ambassadors go to Rome », dans E. Frézouls et A.

Jacquemin (éd.), Les relations internationales, Actes du colloque de Strasbourg, Strasbourg, 15-17 juin 1993,

Paris, 1995, p. 453-478 et J.-L. Ferrary, " Les ambassadeurs grecs au Sénat romain », dans J.-P. Caillet et M.

Sot (dir.), L'audience. Rituels et cadres spatiaux dans l'Antiquité et le Haut Moyen-Age, Paris, 2007, p. 113-

122. Sur la diplomatie romaine, voir essentiellement Cl. Auliard, La diplomatie romaine de la fondation de

Rome à la fin de la République, Lille, 1992 (Thèse sous forme de microfiches), dont une partie à été récemment

publiée : Cl. Auliard, La diplomatie romaine : l'autre instrument de la conquête. De la fondation de Rome à la

fin des guerres samnites (753-290 av. J.-C.), Rennes, 2006. 5 Les limites fixées à cette enquête tiennent également au fait que, dans le langage

politique et médiatique moderne, le qualificatif d'" officiel » est clairement réservé aux

déplacements des personnages les plus éminents, chefs d'Etat et de gouvernements principalement, princes héritiers des familles royales éventuellement, ministres plus rarement : déjà l'on pointe que dans l'acception contemporaine du terme, les conditions de l'accueil du voyageur et le retentissement médiatique du voyage participent largement de la reconnaissance de l'" officiel ». Il semble donc plus cohérent et plus pertinent d'axer ce

travail sur des personnages antiques d'importance équivalente. Si, du côté grec, les

souverains hellénistiques paraissent tout désignés, le problème se pose de manière

éminemment plus complexe du côté romain où les nombreux magistrats élus par les comices

peuvent, dans une large mesure, être considérés comme des représentants de l'Etat romain

dès lors qu'ils étaient amenés à se déplacer dans le cadre de leurs fonctions. Parmi ceux-là,

les imperatores de l'époque républicaine méritaient d'être privilégiés : ce titre - car il

s'agissait bien d'un titre - désignait spécifiquement les généraux victorieux et acclamés

comme tels par leurs troupes

19, mais s'appliquait aussi plus largement, dans le langage

politique, à tous ceux qui étaient investis d'un pouvoir de commandement

20. On réservera ici

le terme aux magistrats et promagistrats romains qui possédaient l'impérium, c'est à dire les

(pro)consuls et les (pro)préteurs dont même les populations grecques étaient en mesure de

percevoir l'importance particulière puisque leur pouvoir était marqué extérieurement par des

signes distinctifs tels que les haches des licteurs ou encore les vêtements de pourpre. Ce sont

précisément ces (pro)magistratures cum imperio qui ont constitué le cadre privilégié des

voyages fonctionnels de l'époque républicaine puisqu'elles impliquaient principalement le commandement des expéditions militaires et le gouvernement des provinces. Au contraire, de

par leurs fonctions mêmes, les édiles et les censeurs n'étaient normalement pas amenés à se

déplacer hors d'Italie, tandis que les questeurs ne le faisaient qu'en tant que collaborateurs de magistrats supérieurs. Se limiter aux (pro)consuls et aux (pro)préteurs permettait en outre de travailler sur des personnages publics romains d'importance politique sensiblement égale à celle des souverains hellénistiques et facilitait donc la mise en parallèle et la comparaison.

C'est précisément en étudiant cette même pratique dans le cadre de deux types d'Etat et de

régimes politiques distincts, mais aussi dans deux sphères culturelles différentes, qu'il

19 Voir R. Combès, " Imperator ». Recherches sur l'emploi et la signification du titre d'imperator dans la Rome

républicaine, Paris, 1966.

20 Voir la définition du terme imperator dans F. Gaffiot, Dictionnaire Latin-Français, Paris, 2000 (nouvelle

édition revue et augmentée sous la direction de P. Flobert). 6 apparaît possible d'évaluer et de saisir au mieux la pertinence de la catégorie du " voyage officiel antique ». On pouvait envisager de nombreuses manières, aussi différentes que stimulantes, pour définir et analyser les voyages des souverains hellénistiques et des imperatores romains. La

première, qui est certainement la plus évidente, consiste à les étudier pour ce qu'ils étaient

fondamentalement : des déplacements dans l'espace dont on pourrait s'attacher à déterminer les modalités, qu'il s'agisse des moyens financiers et matériels mis en oeuvre, de

l'infrastructure d'accueil utilisée, des itinéraires empruntés, des étapes ou escales effectuées,

ou bien encore des difficultés et dangers rencontrés. C'est ce qu'a fait par exemple Helmut Halfmann dans son ouvrage de référence consacré aux déplacements des empereurs romains :

celui-ci s'est en effet particulièrement intéressé à la logistique du voyage impérial, en

étudiant longuement son organisation, sur terre comme sur mer, à travers la question des

trajets et des routes, celle des destinations et des étapes, ou bien encore à travers le problème

du ravitaillement et de l'hébergement pour lesquels l'auteur a montré que l'on recourait non seulement aux services de l'Etat, mais aussi aux réquisitions et aux contributions plus ou moins volontaires des communautés locales

21. Il s'agit cependant là d'une démarche plus

descriptive qu'analytique que l'on ne reprendra pas ici pour les souverains hellénistiques et

les imperatores romains. Si les réalités matérielles de leurs déplacements seront certes prises

en compte dans le cadre de cette étude, elles ne le seront cependant pas pour elles-mêmes,

mais seulement dans la mesure où elles peuvent être évaluées comme des éléments

discriminants dans la pratique du voyage et donc constitutifs de l'" officiel ». Dans la perspective d'Helmut Halfmann, qui a aussi cherché à établir une typologie

des voyages impériaux, en distinguant notamment les expéditions militaires, les tournées

d'inspection et les opérations de propagande

22, on pourrait se pencher plus particulièrement

sur les principaux motifs qui présidèrent aux déplacements des rois hellénistiques et des

imperatores romains : la guerre et la diplomatie d'abord, l'administration des territoires et

des populations ensuite. Cependant, il s'agit là de domaines déjà bien connus des historiens.

Envisager ces types de déplacements à travers le prisme du " voyage officiel » n'a pas paru de nature à permettre de les éclairer sous un jour nouveau, pas plus d'ailleurs que leur prise

en compte n'a semblé susceptible d'apporter des éléments véritablement utiles à la

1986, essentiellement p. 65-89, auxquelles on ajoutera le dernier chapitre, p. 157-244, dans lequel l'auteur

établit, pour chaque empereur, la liste des déplacements.

22 H. Halfmann, 1986, p. 15-64.

7

compréhension de la catégorie du " voyage officiel ». Ainsi, il a déjà été démontré que si les

voyages des souverains hellénistiques et des imperatores romains mêlaient les objectifs et prenaient la forme de déplacements mixtes, à la fois guerriers, diplomatiques et

administratifs, ils consistaient le plus souvent à la base en une expédition militaire23. Il a dès

lors paru de peu d'intérêt de refaire l'histoire événementielle et militaire de la période24.

Helmut Halfmann consacre encore un long développement aux rapports qui

s'établissaient entre l'empereur et les cités qu'il visitait, soulignant combien le prince aimait

à se poser en bienfaiteur des communautés locales qui n'en étaient pas moins astreintes à un

certain nombre d'obligations et de contraintes d'accueil envers le voyageur et son entourage

25. On aurait donc pu faire une place dans cette enquête à l'évergétisme des

souverains hellénistiques et des imperatores romains au cours de leurs déplacements en

Orient et aux honneurs que leurs bienfaits ont suscités de la part des communautés civiques.

Là encore cependant, l'évergétisme est apparu comme sujet largement étudié26. De plus, la

23 Voir en ce sens J.-M. André et M.-Fr. Baslez, 1993, p. 104-109 (pour les imperatores romains) et W.

Clarysse, 2000, p. 33-39 (pour les souverains hellénistiques).

24 Les déplacements militaires des souverains hellénistiques et des imperatores romains dans l'Orient

méditerranéen sont répertoriés et analysés par E. Will, Histoire politique du monde hellénistique, 2 tomes,

Nancy, 1979

2 et 19822 ; les conditions matérielles des expéditions ont été étudiées, pour le monde hellénistique,

par M. Holleaux, " Ceux qui sont dans le bagage », REG, 39, 1926, p. 355-366 (repris dans Etudes d'épigraphie

et d'histoire grecques, Tome III, Paris, 1968 (1942), p. 15-26), M. Austin, " Hellenistic Kings, War and the

Economy », CQ, 36, 1986, p. 450-466 et M. Launey, Recherches sur les armées hellénistiques, 2 tomes, Paris,

1987 (réimpression avec addenda et mise à jour par Y. Garlan, Ph. Gauthier et Cl. Orrieux) et, pour le monde

1999.
25

H. Halfmann, 1986, p. 90-110 (sur l'entourage de l'empereur) et p. 124-142 (sur l'évergétisme impérial et les

munera des communautés locales).

26 Voir, essentiellement, P. Veyne, Le pain et le cirque, sociologie historique d'un pluralisme politique, Paris,

1976 ; Ph. Gauthier, Les cités grecques et leurs bienfaiteurs (IVème-Ier s. av. J.-C.). Contribution à l'histoire des

institutions, Paris, 1985 ; J. L. Ferrary, " De l'évergétisme hellénistique à l'évergétisme romain », dans M.

Christol et O. Masson (éd.), Actes du Xème congrès international d'épigraphie grecque et latine, Nîmes, 4-9

octobre 1992, Paris, 1997, p. 199-225 et J. Ma, 2004. Les bienfaits des souverains hellénistiques aux cités et

sanctuaires grecs ainsi que les honneurs qu'ils leurs ont valu ont par ailleurs fait l'objet de catalogues de

und Heiligtümer, Berlin, 1995 et H. Kotsidu, Timè kai doxa. Ehrungen für hellenistische Herrscher im

Berlin, 2000. Au sommet de la hiérarchie des honneurs, le culte du souverain qui a pu commémorer et

8 nature et le sens de ce phénomène ne changent pas fondamentalement selon que la relation

évergétique s'établissait indirectement, par la voie épistolaire et par le biais d'ambassadeurs,

ou directement, à l'occasion du passage du bienfaiteur. l'ouvrage de Helmut Halfmann en indique finalement bien l'orientation générale autant que

les limites. Il s'agissait pour l'auteur de faire l'histoire des voyages impériaux et d'en

déterminer les finalités autant que les modalités. On l'aura compris, cette étude s'inscrit dans

une perspective tout à fait différente. Au regard des principaux apports de la documentation disponible et en tenant compte des travaux déjà conduits, elle ambitionne d'explorer une voie

plus novatrice en cherchant à proposer une définition phénoménologique et non pas

conceptuelle ou seulement typologique du " voyage officiel ». Il s'agit donc moins ici d'une étude sur la pratique du voyage que d'une réflexion sur la manifestation et la perception de

l'" officiel » qui s'inscrit dans le cadre d'une réflexion plus large menée aujourd'hui sur la

pertinence des notions de public et de privé dans l'Antiquité

27. Un chapitre liminaire propose

tout d'abord une première définition du " voyage officiel » antique fondée, notamment, sur le

critère déterminant du statut du voyageur et sur le rôle discriminant de l'infrastructure du

voyage. Au fil de l'enquête, l'importance du cérémonial politique, protocolaire ou rituel,

s'est imposée : il est analysé à travers l'étude de quelques cas de convois funèbres et de

cortèges nuptiaux consistant en de véritables voyages d'apparat. Mais la dimension

cérémonielle du voyage ressort particulièrement, à la faveur d'une documentation beaucoup

plus abondante, des modalités de l'entrée solennelle des rois et des imperatores dans les

cités. L'interaction entre la sphère du public et celle du privé, c'est à dire le rapport entre le

voyage fonctionnel et le déplacement personnel, est analysée à partir des voyages de jeunesse

des souverains hellénistiques et des aristocrates romains, ainsi qu'au travers de la pratique du tourisme culturel auquel se livraient les imperatores en déplacement en Orient. Enfin, un

chapitre conclusif consacré au voyage d'exil et à sa représentation littéraire vise à dessiner,

en négatif, l'image conventionnelle du " voyage officiel ».

pérenniser le passage du roi, à lui aussi été bien étudié : voir, à ce sujet, les remarques de J.-M. André et M.-Fr.

Baslez, 1993, p. 170-172.

27
Public et privé en Grèce ancienne : lieux, conduites, pratiques, Ktéma, 23, 1998. 9

Chapitre 1

Essai de définition phénoménologique :

les critères déterminants du " voyage officiel » antique L'expression " voyage officiel » est devenue usuelle et nul ne songerait aujourd'hui à

en remettre en cause l'usage ou à en contester la validité. Pourtant, à y regarder de plus près,

elle risque fort d'apparaître comme l'une de ces pré-notions que dénonçait Durkheim en son

temps, à savoir l'un de ces concepts que l'on emploie couramment et dont le sens semble implicitement connu et accepté de tous, mais dont la définition et le contenu ne sont jamais clairement explicités

1. Un rapide sondage historiographique réalisé dans le seul champ de la

recherche française montre ainsi que le concept ou, à tout le moins, la catégorie de " voyage

officiel » traverse toutes les périodes historiques et tous les contextes socio-politiques : tandis

que certains historiens de l'Antiquité y ont recours pour désigner les déplacements des

souverains hellénistiques ou des imperatores et des empereurs romains2, les médiévistes et les modernistes quant à eux l'appliquent aux déplacements des rois de France3, les contemporainistes à ceux des " chefs d'Etat » - au premier rang desquels figurent évidemment les présidents de la République française -

4 ; à aucun moment, pourtant, le

voyage officiel ne semble avoir fait l'objet d'une tentative de définition phénoménologique5.

C'est la raison pour laquelle il paraît nécessaire, en bonne méthode, d'établir

préalablement un certain nombre de critères de définition de cette pratique et de déterminer

1 E. Durkheim, Les règles de la méthode sociologique, Paris, 1995 (1895), notamment p. 15-34.

2 J. Rougé, " Voyages officiels en Méditerranée orientale à la fin de la République et au premier siècle de

l'Empire », REA, 55, 1953, p. 294-300 ; J.-M. André et M.-Fr. Baslez, Voyager dans l'Antiquité, Paris, 1993, p.

167-206.

3 G. Sabatier, " Les voyages des rois de France » et C. Laborde, " Les voyages du roi : les représentations du

pouvoir royal sous la restauration », dans J. W. Derymez, O. Ihl et G. Sabatier (dir.), Un cérémonial politique :

les voyages officiels des chefs d'Etat, Paris, 1998, p. 15-44 et 101-112.

4 Voir les contributions de P. Niéto et P. Harismendy, " Sadi Carnot, un président voyageur », O. Ihl, " Sous le

regard de l'indigène. Le voyage du président Loubet en Algérie », J. W. Dereymez, " Le maréchal et son

royaume : les voyages du chef de l'Etat français (septembre 1940-octobre 1942) », A. S. Clacys, " La

symbolique de la hauteur dans les voyages du Général de Gaulle en Afrique noire. 1958-1959 », dans J. W.

Derymez, O. Ihl et G. Sabatier (dir.), Un cérémonial politique : les voyages officiels des chefs d'Etat, Paris,

1998, p. 113-168 ; 169-242 ; 243-270 ; 271-292.

5 Ainsi, ni J. Rougé, 1953, p. 294-300, ni J.-M. André et M.-Fr. Baslez, 1993, p. 167-206 ne proposent de

définir préalablement le phénomène qu'ils entendent étudier. 10

dans quelle mesure la catégorie de " voyage officiel » est-elle opératoire pour l'Antiquité

gréco-romaine, notamment pour qualifier et caractériser les déplacements des souverains

hellénistiques et des imperatores romains ? De l'" officiel » au " public » : la difficile identification du voyage d'Etat Il convient tout d'abord de se pencher sur le problème, crucial, du vocabulaire.

L'expression française " voyage officiel », dont on ignore à quel moment elle fut forgée pour

la première fois

6, ne possède, semble-t-il, aucun équivalent antique : les sources, littéraires

comme épigraphiques, n'établissent pas de distinction claire entre les déplacements qu'un

moderne considérerait comme " officiels » et ceux qui n'entreraient pas dans cette catégorie

particulière. Cela ne signifie cependant pas que la pratique n'existait pas. Ainsi, les traducteurs de

la Collection des Universités de France rendent souvent par " officiel » les termes démosios

ou koinos en grec et publicus en latin7. Littéralement, il conviendrait de les traduire par

" public » : étymologiquement en effet, démosios vient de démos, tandis que publicus dérive

de populus ; ces mots renvoient donc au " peuple »8, mais également, s'agissant de l'Antiquité gréco-romaine, à l'" Etat »

9. Pour Alain Fouchard, démosios est en effet le terme

grec qui exprime le mieux la notion moderne d' " Etat »

10, tandis qu'en latin, l'Etat constitue

la res publica, c'est-à-dire la " chose publique »11. Si l'emploi du concept d'Etat pour

6 Des deux termes, le second est le plus récent : alors que " voyage », dans son acception moderne apparaît au

XV

ème siècle, " officiel » n'est attesté pour la première fois dans la langue française qu'en 1778 : J. Dubois, H.

Mitterand et A. Dauzat, Dictionnaire étymologique et historique du français, Paris, 2005, article " officiel », p.

678.

7 Fr. De Polignac et P. Schmidtt-Pantel, " Introduction », dans Public et privé en Grèce ancienne : lieux,

conduites, pratiques, Ktéma, 23, 1998, p. 5-13.

8 L'étymologie de koinos est plus incertaine mais ce terme renvoie lui aussi à la notion de communauté, c'est à

dire, dans le langage politique grec, au peuple : P. Chantraine, Dictionnaire étymologique de la langue grecque.

Histoire des mots, Paris, 1998, (nouvelle édition mise à jour), article " koinos », p. 552-553.

9 P. Chantraine, 1998, article " démos », p. 273-274 et article " koinos », p. 552-553 ; A. Ernoult et A. Meillet,

Dictionnaire étymologique de la langue latine. Histoire des mots, Paris, 2001 (retirage de la 4ème édition de

1959 augmentée d'additions et de corrections), article " publicus », p. 542.

10 A. Fouchard, " Démosios et démos : sur l'Etat grec », dans Public et privé en Grèce ancienne : lieux,

conduites, pratiques, Ktéma, 23, 1998, p. 59-69.

11 Voir par exemple le texte de Cicéron, Des Lois, III, 8, 18, cité infra, p. 15.

11 caractériser certaines formes d'organisation socio-politique antiques ne va pas sans poser problème

12, les historiens modernes s'accordent cependant depuis longtemps à en reconnaître

la validité tant pour désigner les royautés hellénistiques que la République romaine13. On

peut dès lors considérer comme " officiel » ou " public » tout ce qui concerne l'Etat ; la

terminologie diplomatique française et britannique substitue d'ailleurs souvent l'expression " voyage d'Etat » à celle de " voyage officiel ». Ainsi, dans le monde grec, un homme public est un individu qui détient un pouvoir ou exerce une charge au nom d'un Etat

14. On retrouve là l'étymologie du terme français

" officiel » : ce mot a en effet été emprunté à l'anglais " official », lui-même pris au latin

officialis, dérivé de officium15. Or, dans la langue latine, officium désigna d'abord une charge

publique avant de renvoyer plus précisément aux devoirs, aux obligations liés à celle-ci16.

D'ailleurs, parmi les nombreuses catégories de voyageurs qu'ils envisagent, les juristes du Digeste distinguent notamment ceux qui voyagent pour " le service de l'Etat », rei publicae causa : il s'agit des voyageurs officiels17. Il semblerait donc que le statut du voyageur constitue un premier critère de définition

probant : pour justifier le qualificatif d' " officiel », un voyage doit d'abord être accompli par

un personnage public, investi d'une fonction par un Etat et pouvant, à ce titre, être considéré

12 Sur le problème de la définition et de l'usage de ce concept moderne en histoire ancienne, on lira avec profit

l'ouvrage de M. H. Hansen, Polis et Cité-Etat. Un concept antique et son équivalent moderne, trad. fr. Paris,

2004 (2001²) ; rien dans la manière dont l'auteur définit l'Etat (notamment p. 55-77) ne paraît s'opposer à

l'emploi de ce terme pour désigner tant les monarchies hellénistiques que la République romaine.

13 Pour le monde grec, voir V. Ehrenberg, L'Etat grec, trad. fr. Paris, 1976, p. 225-373 et plus récemment A.

Fouchard, Les Etats grecs, Paris, 2003, p. 71-134 ; plus précisément, sur le royaume séleucide envisagé comme

un Etat, voir J. Ma, " Les rois », dans A. Erskine (dir.), Le monde hellénistique. Espace, sociétés, cultures, 323-

31 av. J.-C., Rennes, 2004, p. 248. Pour le monde romain, voir L. Homo, Les institutions politiques romaines.

De la cité à l'Etat, Paris, 1970 (1927), p. 35-227 et plus récemment B. Lançon, L'Etat romain. Quatorze siècles

de modèles politiques, Paris, 1995, p. 21-48.

14 M. Casevitz, " Note sur le vocabulaire du privé et du public », et P. Ceccarelli, Fr. Létoublon et M. Steinrück,

" L'individu, le territoire, la graisse : du public et du privé chez Homère », dans Public et privé en Grèce

ancienne : lieux, conduites, pratiques, Ktéma, 23, 1998, respectivement p. 39-45 et 47-57.

15 J. Dubois, H. Mitterand et A. Dauzat, 2005, article " officiel », p. 678.

16 A. Ernoult et A. Meillet, 2001, article " officium », p. 459-460.

17 C. Wolff, " Le voyage et les juristes du Digeste », dans M. G. Angeli Bertinelli et A. Donti (éd.), Le vie della

storia. Migrazioni di popoli, viaggi di individui, circolazione di idee nel Mediterraneo antoci, Atti del II

incontro Internazionale di Storia Antica, Gênes, 6-8 octobre 2004, Rome, 2006, p. 319-339, notamment p. 320-

321.
12

comme un représentant de cet Etat. Pourtant, ce critère, en apparence simple, se révèle

problématique et doit être affiné en tenant compte notamment des spécificités des royautés

hellénistiques et de la République romaine dans lesquelles se pose, pour des raisons

différentes, le problème des frontières entre public et privé, entre démosios/publicus et

idios/privatus. Entre public et privé : des limites brouillées

Sans revenir en détail sur le problème toujours très discuté de la royauté hellénistique,

il n'est pas inutile d'en rappeler quelques unes des principales caractéristiques susceptibles d'éclairer la pratique et, par là même, la définition du " voyage officiel ».

On le sait, le roi hellénistique était, avant toute autre chose, un chef de guerre

victorieux : la victoire au combat, signe de la bienveillance divine, révélait la nature royale et

légitimait l'exercice du pouvoir suprême ; l'idéologie et la propagande monarchiques

s'articulaient très largement autour du thème de la victoire

18. Partant de là, la royauté

hellénistique était fondamentalement un régime politique personnel

19. Le titre

traditionnellement porté par les souverains hellénistiques est, à cet égard, significatif : dans

leurs lettres ou sur leurs monnaies, les rois eux-mêmes employaient pour se présenter une formule simple mais révélatrice, à savoir le terme de basileus suivi de leur nom20 ; on ne trouve donc dans cette titulature aucun élément territorial ou ethnique

21. Outre cette

dimension personnelle, la monarchie hellénistique se distinguait aussi par son caractère

absolu. Du fait de sa nature royale, reconnue par les dieux, mais également en raison des

multiples qualités qui s'attachaient traditionnellement à sa fonction, le roi hellénistique se

trouvait placé au dessus du commun des mortels et exerçait un pouvoir souverain et absolu ;

18 Cl. Préaux, Le monde hellénistique. La Grèce et l'Orient de la mort d'Alexandre à la conquête romaine. 323-

146 av. J.-C., Tome I, Paris, 2003 (1978), p. 183-185 ; M. Austin, " Hellenistic Kings, War and the Economy »,

CQ, 36, 1986, p. 450-466 ; B. Virgilio, Lancia, diadema e porpora. Il re e la regalita ellenistica, Pise, 2003², p.

45-87 ; A. Chaniotis, War in the Hellenistic World. A Social and Cultural History, Blackwell publishing, 2005,

p. 57-77. 19

M. Austin, 1986, p. 451.

20 Les lettres royales sont commodément réunies par C. B. Welles, Royal Correspondence in the Hellenistic

Period, New Haven, 1934 ; sur les monnaies royales, voir H. Nicolet-Pierre, Numismatique grecque, Paris,

2002, p. 207-232.

21

Cl. Préaux, 2003, p. 186.

13

non seulement il faisait la loi, mais il était la loi22. Tous ces éléments font que, dans un tel

système politique, la dichotomie moderne entre public et privé n'a évidemment plus aucune valeur en ce sens que le roi ne devait sa fonction et son pouvoir à personne sinon à lui-

même : il n'était donc pas seulement le représentant de l'Etat, il en était l'incarnation vivante.

On a parfois proposé d'établir une distinction entre les royautés dites " personnelles »,

lagide, séleucide et attalide pour ne citer que les plus célèbres, et les royautés " nationales »,

notamment la monarchie antigonide

23. Cette bipartition doit aujourd'hui être abandonnée24.

quotesdbs_dbs23.pdfusesText_29
[PDF] Les nombres décimaux

[PDF] Procédure transfert parcours d 'Openrunner vers GPS

[PDF] fabrication de papier recycle - Les petits débrouillards

[PDF] CHAPITRE 4 : FACTORISER UNE EXPRESSION LITTERALE 1

[PDF] MacBook Air Guide de l utilisateur

[PDF] Analyse de marché - Innovation 02

[PDF] Les brûlages domestiques de printemps - Ministère de la Sécurité

[PDF] COMMEnT EnREgISTRER unE CERTIFICATIOn Au RÉPERTOIRE

[PDF] 25 conseils pour faire connaitre son site internet - ConseilsMarketingfr

[PDF] Effet photoréfractif dans les cristaux d 'oxyde de bismuth et de - Hal

[PDF] Fabrication d 'une farine de manioc de haute qualité

[PDF] Il existe plusieurs façons de « faire de la - Le monde politique

[PDF] SE FAIRE CONNAITRE SUR INTERNET GRATUITEMENT

[PDF] 101 idées futées - Energie Wallonie

[PDF] Agrodok-07-L 'élevage de chèvres dans les zones tropicales,pdf