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Fondations philanthropiques et recherche médicale en France au
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Fondations philanthropiques et recherche médicale en France au
23 mai 2019 Histoire économique histoire des sciences
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![Fondations philanthropiques et recherche médicale en France au Fondations philanthropiques et recherche médicale en France au](https://pdfprof.com/Listes/20/20374-20TRUFFINET.pdf.pdf.jpg)
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne
IDHES - Institutions et dynamiques historiques de l'économie et de la société (UMR 8533)École doctorale d'histoire (ED 113)
Nicolas Truffinet
Fondations philanthropiques et recherche médicale en France au tournant des XX e et XXIe sièclesSous la direction de Michel Margairaz, professeur d'histoire économique à l'Université de Paris I
Panthéon Sorbonne
Membres du Jury :
Dominique Barjot, professeur d'histoire économique contemporaine, Université Paris IV Clotilde Druelle-Korn, maîtresse de conférence HDR en histoire contemporaine, Université deLimoges
Anne Rasmussen, professeure d'histoire des sciences, Université de Strasbourg Matthieu Hély, professeur de sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines Marc Tardieu, professeur de médecine, Université Paris-SudVolume 1 : Texte
Remerciements
Je tiens d'abord à remercier l'ensemble des personnes qui m'ont reçu, parfois longuement, et ont
bien voulu répondre à mes questions : dirigeants de fonds et fondations, je pense en particulier à
l'équipe de la Fondation Paralysie Cérébrale, à la famille Chatelin, mais aussi médecins chercheurs
et responsables politiques et administratifs. Trop nombreux pour être cités ici, on trouve leurs noms
dans les sources et en annexe, dans la partie consacrée aux entretiens : ce mémoire n'aurait pas été
le même sans leur participation.Il a aussi bénéficié de l'aide de membres d'organisations consacrées à la philanthropie : Laurence de
Nervaux et Frédéric Bérard, de la Fondation de France, Suzanne Gorge, du Centre français des
fonds et fondations, François Rubio, de France Générosité, Emmanuelle Faure, de l'European
Foundation Center, et Charles Sellen, de l'Agence française de développement, qui fut présent à
plusieurs moments de mes recherches, même jeune papa. Tous ont su m'apporter une précision ouune rectification, me diriger vers telle enquête, telle étude, et me transmettre des documents utiles.
De même que Véronique Varoqueaux, du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche,
F. Ristori, de la Direction de l'information légale et administrative, Samira Koutabi et Benoît
Chapuis, de la préfecture d'Île-de-France, et Dominique Lemaitre, de celle de la Côte-d'Or.La thèse a beau être un travail largement solitaire, je suis heureux d'avoir croisé la route de
chercheurs sur des sujets en lien avec le mien, dans le cadre de l'European Research Network on Philanthropy ou de la Chaire Philanthropie de l'ESSEC. Je me souviens aussi du séminaire del'EHESS sur la philanthropie américaine dirigé par Ludovic Tournès, et de tous les travaux qui
m'ont nourri depuis. Je suis reconnaissant à Dominique Barjot, Clotilde Druelle-Korn, Anne Rasmussen, Matthieu Hélyet Marc Tardieu d'avoir accepté de faire partie du jury. Histoire économique, histoire des sciences,
sociologie du tiers-secteur et médecine : je n'aurais pu espérer meilleurs profils et suis impatient
d'échanger avec tous. Merci évidemment à Michel Margairaz pour son encadrement, son accompagnement depuis 2012.J'ai été heureux de son accord initial, heureux depuis de sa présence aux moments importants, de
ses réponses toujours adaptées aux questions qui se posaient, et de son encouragement aujourd'hui.
Je vous souhaite le meilleur et espère rester en contact les prochaines années. Je remercie bien sûr l'ensemble de ma famille. Mes parents pour leur soutien ces dernièressemaines, dans une période pourtant difficile, mes frères et soeur, son mari, ainsi que mes grands-
parents. Je pense en particulier à Christiane Durandin, disparue en septembre : je sais que cettethèse comptait pour elle. Et à Guy Durandin, décédé en 2015, qui valorisait aussi mon activité
universitaire. Je suis heureux que Jean et Janine Truffinet soient présents, eux, et leur redis mon
immense affection.Enfin les amis, qui ont toléré une moins grande disponibilité ces derniers mois, et que j'espère ne
pas avoir trop ennuyés avec les fondations en soirée, et Anna, bien entendu, et toute la famille
Marmiesse, pour son soutien sans faille tout ce temps. Merci Anna d'avoir embelli plus que je ne saurais dire ces cinq ans. 3Liste des abréviations
AERES : Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (désormais Haut Conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur Hcéres)ANR : Agence nationale de la recherche
ANRS :Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites viralesANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ex-Agence française
de sécurité sanitaire des produits de santé Afssaps) AP-HP : Assistance publique - Hôpitaux de Paris CEA : Commissariat à l'énergie atomique (et désormais aux énergies alternatives)CHU : Centre hospitalo-universitaire
CNRS : Centre national de la recherche scientifique CTRS : Centres thématiques de recherche et de soins (supprimés en 2013) EHESP : École des hautes études en santé publiqueENS : École normale supérieure
EPST : Établissement public à caractère scientifique et technologique EHESS : École des Hautes Études en Sciences SocialesERNOP : European Research Network on Philanthropy
FdF : Fondation de France
FRM : Fondation pour la recherche médicale
IBPC : Institut de biologie physico-chimique
ICM : Institut du cerveau et de la moelle épinièreIdF : Institut de France
IGAENR : Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
IGAS : Inspection générale des affaires socialesIGF : Inspection générale des finances
IHU : Institut hospitalo-universitaire
INCa : Institut national du cancer
INED : Institut national d'études démographiques INH : Institut national d'hygiène (1941-1964, succédé par l'INSERM) INRA : Institut nationale de la recherche agronomique INRIA : Institut national de recherche en informatique et en automatique INSEE : Institut national de la statistique et des études économiques INSERM : Institut national de la santé et de la recherche médicale IRCL : Institut pour la recherche sur le cancer de Lille IRD : Institut de recherche pour le développementJO : Journal Officiel
LFM : La Fondation Motrice (devenue La Fondation Paralysie Cérébrale en 2018) MERRI : Missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation MIGAC : Missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation MIRES : Mission interministérielle Recherche et Enseignement supérieurNIH : National Institutes of Health
OMS : Organisation mondiale de la santé
ONDAM : Objectif national des dépenses d'assurance maladie PRES : Pôles de recherche et d'enseignement supérieur (supprimés en 2013) RTRA : Réseaux thématiques de recherche avancée (supprimés en 2013)ULB : Université libre de Bruxelles
UPMC : Université Pierre et Marie Curie (elle a fusionné avec Paris Sorbonne, donnant lieu à
4Sorbonne Universités le 1er janvier 2018)UVSQ : Université de Versailles Saint-Quentin-en-YvelinesAinsi que les huit formes de fonds et fondation :FRUP : Fondation reconnue d'utilité publique FA : Fondation abritéeFE : Fondation d'entreprise FCS : Fondation de coopération scientifique FU : Fondation universitaire FP : Fondation partenarialeFDD : Fonds de dotationFH : Fondation hospitalière
5IntroductionAu départ, il y a notre intérêt pour la philanthropie, à laquelle nous avions déjà consacré notre
mémoire de Master 2, dans le cadre états-unien1. On pouvait en effet avoir l'impression, pendant la
deuxième moitié de la décennie 2000, d'un essor des organisations et des programmes de typecharitable, généralement très médiatisés, à l'initiative de milliardaires célèbres. La Fondation Gates,
dirigée par le fondateur de Microsoft et sa femme, en était alors, et en demeure probablement,l'incarnation la plus évidente. Il ne s'agissait pourtant pas d'en rester aux figures, aux structures, les
plus emblématiques. Bien plutôt, on souhaitait décrire le secteur philanthropique dans sa diversité :
ses acteurs, fondations et associations, ses pratiques, à différents échelons, ainsi que les débats et
parfois controverses les entourant. Tout cela donnait à voir la société de ce pays avec beaucoup de
ses caractéristiques, comme l'importance qui demeure du sentiment religieux, mais aussi lavalorisation de l'efficacité et des méthodes de l'entreprise. Au-delà de la description, une question
sous-jacente guidait notre enquête : la philanthropie est-elle considérée, aux États-Unis, comme une
sorte de substitut aux politiques publiques ? Les donations des riches américains sont-elles lecorollaire d'une faible redistribution par l'impôt touchant les grosses fortunes ? Existe-t-il ou a-t-il
existé, au sommet de l'État, une volonté délibérée d'encourager la charité privée, dans un contexte
de désengagement pouvant tenir à des raisons idéologiques, la fameuse révolution conservatrice des
années 1980, ou à des impératifs budgétaires ? Ces questions doivent s'entendre dans uneperspective comparative aussi bien qu'historique. D'un côté, il s'agit d'interroger une possible
idiosyncrasie états-unienne au regard du modèle ouest-européen, marqué par un poids de l'État plus
important, et peut-être une certaine défiance envers une immixtion des acteurs privés dans les
domaines d'intérêt général. De l'autre, on questionne une évolution qui a pu toucher, à des degrés
divers, l'ensemble de ces pays au cours des 30 ou 40 dernières années.Le travail exercé dans le cadre de notre doctorat est le fruit d'un double déplacement : il a d'abord
été décidé de travailler sur la philanthropie française plutôt qu'états-unienne, puis de resserrer sur un
domaine en particulier, la recherche médicale, à l'exclusion des activités de soins. Les questions s'en
trouvaient déplacées d'autant : il s'agissait de comprendre les raisons du poids de la philanthropie de
l'autre côté de l'Atlantique, il faut à présent expliquer pourquoi elle est jugée faible en France. La
philanthropie dans ce pays doit-elle être considérée comme le produit d'une transposition ? Ou bien
tire-t-elle ses racines d'une histoire qui lui est propre ? Il conviendra de nuancer l'idée, fréquemment
1 Nicolas Truffinet, " Les mutations de la philanthropie aux États-Unis des années 1990 à aujourd'hui », mémoire de
Master 2, Centre de recherche d'histoire nord-américaine CRHNA, Université Paris I, 2008. 6exprimée, selon laquelle ce secteur souffrirait ici d'un " retard ». Et par ailleurs d'introduire une
dimension historique en rappelant que celui-ci n'est pas immobile : les incitations fiscalesbénéficiant aux fondations, jugées faibles au début des années 1980, et encore 1990, sont
aujourd'hui plus généreuses que dans beaucoup de pays voisins. Des évolutions législatives
importantes ont pris place pendant la décennie 2000 et, à considérer l'augmentation du nombre
d'organisations reconnues d'utilité publique les dix années suivantes, il semble que les acteurs aient
su s'en emparer. Même si l'on entend encore (mais moins que par le passé) déplorer des" rigidités », ou une insuffisante culture philanthropique, et s'il reste des revendications insatisfaites,
touchant à la réserve successorale, qui en réservant une part jugée trop importante de la succession
aux héritiers directs, freinerait la possibilité d'une transmission du patrimoine à des organismes
d'intérêt général, ou à l'essor considéré comme trop timide des fondations actionnaires, permettant
de se rendre propriétaire d'une entreprise industrielle ou commerciale et ce faisant d'éviter une prise
de contrôle hostile, formule en vogue dans les pays d'Europe du Nord.La décision de nous intéresser à la recherche, médicale en particulier, nous a conduit à denouveaux
questionnements. Comment ont évolué son organisation ainsi que ses sources de financement ? Etquel rôle jouent ici les fondations, à côté des acteurs publics et privés à but lucratif ? Dans une
perspective quantitative, que représente le montant de leurs subventions, comparées aux crédits
publics d'une part et aux investissements dans la recherche et le développement de l'industrie d'autre
part ? Et sur un plan qualitatif, observe-t-on des particularités en matière de fonctionnement, de
choix scientifiques, qui les distinguent, voire les légitiment ? De premières réponses viennent
spontanément à l'esprit : les entreprises pharmaceutiques seraient en charge de la production de
médicaments, la recherche fondamentale étant plutôt du ressort d'organismes publics. Mais l'on
aurait tort d'en conclure à un partage des tâches définitivement admis, non-évolutif. On verra
notamment que la répartition des crédits entre différents types de recherches, de projets (quelle part,
par exemple, réserver aux programmes blancs?), fait l'objet de débats intenses, et d'arbitrages
difficiles, lors des débats parlementaires précédant le vote des lois de finance. Revenant aux
fondations, faut-il les considérer comme des acteurs secondaires, attribuant des subventions qui ne
peuvent constituer qu'un appoint marginal pour les laboratoires ? Ou bien certaines, disposant d'uneimportante force de frappe financière, sont-elles en mesure de jouer un rôle significatif dans la
définition de politiques scientifiques ? Voici les deux hypothèses opposées entre lesquelles il faudra
naviguer. 7Une littérature inégalement fournie
Quel est l'état de la recherche sur le sujet ? Le fait qui nous a frappé est qu'on est présence de deux
champs bien distincts, celui de l'histoire de la recherche, et notamment de la recherche médicale, et
de l'histoire de la philanthropie, de cet acteur qu'est la fondation en particulier. Deux champs qui, à
ce jour, nous paraissent inégalement documentés : sur la mise en place d'une politique de recherche
publique les années suivant la Libération, les évolutions de ce modèle par la suite, et ses prémisses
au XIXeet au début du XXe siècles, il semble que les historiens ont beaucoup travaillé. On a moins
d'informations sur l'histoire des organisations philanthropiques, peut-être parce que beaucoup des
événements marquants les concernant sont plus récents ? Les études sur le sujet ont en outre
souvent l'inconvénient de provenir d'organismes comme la Fondation de France, ou le Centrefrançais des fonds et fondations, ou leEuropean Foundation Centerdans le cadre européen, dont la
vocation de défense du secteur peut sans doute être un obstacle à la production de travaux possédant
une dimension critique. Cela ne nous empêchera pas de les exploiter (certains sont excellents), mais
en les recoupant, quand la chose est possible avec des analyses menées dans des situations d'extériorité a priori plus favorables à la neutralité.Contribuer à enrichir cette historiographie touchant aux fondations est donc notre premier objectif.
Le second est de la lier à l'histoire de la recherche médicale, autrement dit de croiser ces deux
champs, programme qui a peu été pris en charge jusqu'à présent. Il convient pour cela de présenter
successivement la littérature consacrée à ces deux objets, avant d'avancer, déjà, les premières
passerelles qui existent entre eux. L'histoire de la recherche médicale en France : un champ d'études riche déjà bien défrichéLe caractère crucial de la période de l'après-guerre, des vingt ans suivant la Libération, peut servir
de point de départ. On citera à ce sujet les travaux d'Alain Chatriot et Vincent Duclert, en particulier
l'ouvrage collectif qu'ils ont dirigé Le gouvernement de la recherche : Histoire d'un engagementpolitique, de Pierre Mendès France au général de Gaulle (1953-1969). Y est évoquée notamment
l'importance du colloque de Caen, en 1956 : organisé à l'initiative de Pierre Mendès France,
l'événement, qui a réuni pendant trois jours 250 intervenants, scientifiques, industriels,administrateurs..., a débouché sur les " 12 points de Caen », programme de modernisation qui, il est
8vrai, eut peu de répercussions immédiates, mais influença plusieurs des orientations prises les
décennies suivantes. À côté de propositions touchant à l'enseignement supérieur, à l'attractivité des
carrières scientifiques, et de revendications d'ordre statutaire, concernant le personnel du CNRS, le
voeu d'une planification de la recherche, en particulier, est clairement exprimé, etdeviendra une réalité au début des années 19602. Vincent Duclert revient sur la naissance en 1961 de la Délégation
générale à la recherche scientifique et technique (DGRST), qui a vocation à coordonner les actions
dans le champ de la recherche, avec ses 22 programmes d'actions concertées, dont celui concernantla biologie moléculaire - quatre ans plus tard, le prix Nobel de médecine reviendra à André Lwoff,
Jacques Monod et François Jacob pour leurs travaux dans ce domaine3. C'est la DGRST, ajoute
l'historien dans un autre article plus axé sur les modalités de son administration, qui est à l'origine
de plusieurs nouveaux établissements comme le Centre national d'études spatiales CNES oul'Institut de recherche en informatique et en automatique IRIA, cette réorganisation générale
permettant au CNRS, dont les effectifs et le budget explosent au cours de ces années, de se recentrer
sur la recherche fondamentale 4.En forçant le trait, on pourrait dire que les propositions faites au colloque de Caen ont été, d'une
certaine manière, l'équivalent pour la recherche du programme du Conseil national de la Résistance
pour les questions de politique générale : un repère, chargé d'une forte dimension symbolique
encore (en particulier) cinquante ans plus tard alors qu'est crainte, à tort ou à raison, une remise en
cause de ce modèle d'interventionnisme d'État modéré. La mise en avant d'acteurs de cette période
alors encore vivants, jouissant d'une aura susceptible de faire contrepoids aux politiques mises enoeuvre au cours de la décennie 2000, s'observe dans les deux cas : on se rappelle le statut qu'a eu
Stéphane Hessel pendant la présidence de Nicolas Sarkozy. Quelques années plus tôt, alors que le
gouvernement Raffarin est accusé de préparer un démantèlement de la recherche française, c'est
Jean-Louis Crémieux-Brilhac, ancien conseiller de Pierre Mendès France considéré comme le
véritable organisateur, au moins sur le plan logistique, du colloque de Caen, qui remplissait cette
fonction. Il existe certes des différences entre les deux hommes : mendésiste restant attaché à la
figure du général de Gaulle, Crémieux-Brilhac est moins marqué à gauche que Stéphane Hessel,
s'aventurant moins en outre dans la politique générale, cantonnant ses interventions au domaine de
la recherche - ainsi qu'à l'histoire de la Résistance, à travers plusieurs gros ouvrages rédigés
2 Vincent Duclert, " Le colloque de Caen, second temps de l'engagement mendésiste », dans Alain Chatriot et Vincent
Duclert (dir.), Le gouvernement de la recherche : Histoire d'un engagement politique, de Pierre Mendès France au
général de Gaulle (1953-1969), Paris, La Découverte, 2006, p. 81-100.3 Vincent Duclert, " L'invention d'une haute institution gouvernementale. La délégation générale à la recherche
scientifique et technique », dans Alain Chatriot et Vincent Duclert, op. cit., p. 132-149.4 Vincent Duclert, " La naissance de la délégation générale à la recherche scientifique et technique. La construction
d'un modèle partagé de gouvernement dans les années soixante », Revue française d'administration publique, vol.
112, n° 4, 2004, p. 647-658.
9pendant sa retraite qui lui valent aujourd'hui l'essentiel de sa réputation5. Des points communs n'en
existent pas moins, à commencer donc par leur participation à la Résistance et le rôle de sage qu'ils
ont endossé à un âge avancé. De manière révélatrice, chacun signe un chapitre du livre d'Alain
Chatriot et Vincent Duclert cité plus haut, les deux sur l'expérience mendésiste, à laquelle
Crémieux-Brilhac consacrera un ouvrage complet quelques années plus tard6, comme témoin et
historien à la fois.Cette idée du caractère décisif du colloque de Caen relève-t-elle d'une vue de l'esprit ? Si oui, elle
est en tout cas partagée par une pluralité d'acteurs. Lors de la fronde des chercheurs en 2003,
épisode sur lequel nous reviendrons plus longuement, la référence revient fréquemment, les états
généraux organisés alors se rêvant à l'occasion en un nouveau Caen - l'original est évoqué dans le
rapport final, dès le troisième paragraphe de l'introduction7. L'ouvrage d'Alain Chatriot et Vincent
Duclert est publié dans ce contexte, issu d'un programme de recherche de l'EHESS. Plus étonnant
peut-être, la majorité alors UMP s'y réfère aussi, à l'image du député Jean-Michel Dubernard au
cours des débats parlementaires précédant le vote de la loi de programme pour la recherche de
2006, suite à trois années de débats parfois houleux. Signe que ce point de repère est devenu
largement consensuel, mobilisable par les deux parties. Toujours sur les décennies 1950 et 1960, concernant la recherche médicale spécifiquement,plusieurs travaux viennent compléter utilement ceux qui viennent d'être cités. Jean-François Picard,
historien des sciences au CNRS, revient sur l'évolution de son établissement au cours de ces années8, sur la naissance de l'INSERM, étudiant en particulier l'Institut national d'hygiène (INH) qui
l'a précédé9, d'autres auteurs se penchant eux sur la création des Centres hospitaliers universitaires
(CHU) par l'ordonnance du 30 décembre 1958 : Sophie Chauveau rappelle que la réforme a fait entrer l'enseignement et la recherche à l'hôpital10 tandis que Jean-Marie Clément souligne le rôle
5 Mentionnons les deux tomes des Français de l'an 40, ainsi que La France libre : de l'appel du 18 juin à la
Libération, parus respectivement en 1990 et 1996 chez Gallimard.6 Jean-Louis Crémieux-Brilhac, La politique scientifique de Pierre Mendès France, Paris, Armand Colin, 2012.
7 États Généraux de la Recherche, Rapport, La Documentation française, novembre 2004, p. 2.
8 Jean-François Picard, La République des savants : la recherche française et le CNRS, Paris, Flammarion, 1992.
9 Jean-François Picard, " Aux origines de l'Inserm : André Chevallier et l'Institut national d'hygiène », Sciences
Sociales et Santé, vol. 21, n° 1, mars 2003, p. 5-26. L 'exemple soulève par ailleurs la question suivante : peut-on
parler de manière neutre, voire en en soulignant les aspects positifs, d'une institution née dans le cadre de Vichy ?
commentaire à la suite de cet article : peut-on interroger l'efficacité de l'INH de manière abstraite, sans référence au
contexte dans lequel ses politiques ont été décidées ? L'auteure reconnaît que les études sur Vichy ne doivent pas se
réduire aux questions politiques, et par ailleurs que les recherches conduites par l'INH, par exemple en matière de
lutte contre l'alcoolisme ou la tuberculose, pouvaient poursuivre des objectifs légitimes. Pour autant, insiste-t-elle, la
dimension politique de la santé publique ne saurait être négligée. C'est une question pour l'historien, qui se reposera,
d'autres réformes, touchant par exemple au contrôle de la composition des médicaments, ayant été mises en place
pendant la même période.10 Sophie Chauveau, " Quelle histoire de l'hôpital au XX
e et XXIe siècles ? », Les Tribunes de la Santé, vol. 33, n° 4,2011, p. 81-89.
10dans l'affaire du professeur Robert Debré, qui a su convaincre son fils Michel alors premier ministrede s'inspirer du modèle anglais, en vigueur depuis la mise en oeuvre du National Health Service en
1943, consistant à former des médecins hospitaliers à temps plein, partageant leur activité entre
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