[PDF] De lafricanité à la transculturalité : : éléments dune critique littéraire





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Tous droits r€serv€s Les Presses de l'Universit€ de Montr€al, 2001 This document is protected by copyright law. Use of the services of 'rudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. This article is disseminated and preserved by 'rudit. 'rudit is a non-profit inter-university consortium of the Universit€ de Montr€al, promote and disseminate research.

Volume 37, Number 2, 2001La litt€rature africaine et ses discours critiquesURI: https://id.erudit.org/iderudit/009012arDOI: https://doi.org/10.7202/009012arSee table of contentsPublisher(s)Les Presses de l'Universit€ de Montr€alISSN0014-2085 (print)1492-1405 (digital)Explore this journalCite this article

critique litt€raire d€politis€e du roman. 37
(2), 133...156. https://doi.org/10.7202/009012ar

Article abstract

This study proposes to reevaluate African criticism by emphasizing the relationship between the role enjoyed by the novel in opening up literary genres and the basic principle of literary writing. After having defined the notion of transcultural and transgeneric esthetics advocated by the great African novelists, I will show how this notion shapes the meaning of some novels. I will try to demonstrate how African criticism is characterized by the ideological thinking of africanity and europeanity and then describe how some African novelists abolish the borders that criticism usually erects between African texts and those of other areas in the world. My hypothesis is that, because African novels are polyphonic, like many others produced throughout the world, it seems more accurate to approach these texts by placing them in the more general context of the beginning of this third millennium, which is characterized by transcultural and transgeneric writing.

De l'africanité

à la transculturalité:

éléments d'une critique littéraire

dépolitisée du roman Les abeilles pilotent deçà delà les fleurs, mais elles en font après le miel qui est tout le leur. Rien de plus original, rien de plus soi que de se nourrir des autres. Mais il faut les digérer. Le lion est fait de mouton assimilé. Parmi les nombreuses difficultés que rencontre une critique plus soucieuse d'analyser les oeuvres que de célébrer la nation, il y a celle d'évaluer les multiples rapports existant entre le phénomène de l'écri- ture, ou de la création esthétique de façon générale, et la réalisation des oeuvres particulières. À partir de cette interrogation, je voudrais iden- tifier, dans la mesure du possible, les différents mécanismes de l'écri- ture littéraire que convoque chaque texte pris isolément et déterminer l'effet littéraire qu'il valorise, en posant ainsi l'hypothèse que c'est dans ces rapports que se situe l'acte d'écrire. Et je partirai de l'idée de base que toute oeuvre d'art prend position sur les mécanismes de la création esthétique à partir de ses nombreuses relations avec les genres. C'est-à- dire qu'à travers l'histoire qu'il raconte tout récit, en l'occurrence le roman, tient d'une certaine façon un discours sur le processus de la création littéraire lui-même et comporte une dimension de valorisa- tion (jugements de conformité ou de non-conformité, de positivité ou de négativité, etc.) des genres littéraires. Et comme tout texte se présente comme une unité basée sur des règles syntaxiques et sémantiques, à la fois autonomes et dépendantes du genre duquel procède ledit texte, on peut dire que le travail de l'écri- vain consiste à savoir comment réaliser un texte nouveau par rapport aux prescriptions génériques existantes. Une critique soucieuse de l'oeuvre cherchera donc à montrer comment le processus d'écriture vise à résoudre cette ambiguïté voulant qu'une oeuvre renouvelle les formes stéréotypées du genre tout en gardant la marque de ce même genre. Ambiguïté qui, selon Roland Barthes, se trouve pénétrée de l'ambivalence même du mot poétique, qui est à la fois un ensemble de lois, de règles, de recettes, et un processus de renouvellement des prin- cipes d'écriture 1 . Il est donc possible de montrer par exemple com- ment, dans certains romans africains, la signification s'organise à partir des topoï généraux du roman par l'intégration qu'en fait l'écrivain à d'autres genres littéraires comme le conte, la légende ou la chanson. C'est également par là que l'écrivain brasse et oppose dans son texte nombre de systèmes de valeurs différents en posant son propre point de vue sur l'écriture. C'est dire que, dans son déploiement figuratif et syntaxique, tout texte de création porte en lui-même une dimension évaluative - critique - de sa valeur littéraire. Dans la même foulée, je voudrais revenir sur quelques difficultés auxquelles se sont heurtés les travaux récents en littérature africaine pour esquisser ensuite une réflexion sur la question de l'écriture et de son rapport avec la dynamique des genres dans le roman africain. En déplaçant ainsi le débat de l'africanité des textes vers l'écriture romanes- que, il s'agit d'élargir le cadre de leur réception en les situant dans l'ensemble des productions symboliques du monde. On pose l'hypo- thèse que, dans le cas du roman africain, une telle prise de position sur le processus de création esthétique s'appuie tantôt sur les motifs des récits oraux, tantôt sur ceux du roman de type européen 2 , tantôt sur les deux ou alors sur les motifs d'autres genres artistiques. Ces diffé- rents modèles ont été souvent notés dans le discours de la critique littéraire africaine. Et pour mieux situer le sujet, rappelons brièvement les grands moments de cette critique ainsi que sa relation avec le pro- cessus transtextuel et transgénérique de l'écriture romanesque. ?. Roland Barthes, S/Z, Paris, Seuil, ????, p. ???. ?. Ce terme, emprunté à Milan Kundera, désigne un type de roman transnational dont l'entreprise historique a commencé à l'aube des Temps modernes en Europe: "[... je] ne veux pas dire par là romans créés en Europe par des Européens, mais romans faisant partie de l'histoire de l'Europe» (Les testaments trahis, Paris, Gallimard, ????, p. ??).

Parcours de la critique africaine du roman

Ces réflexions me conduisent à m'interroger sur l'existence d'un dis- cours critique littéraire africain susceptible d'être, à la fois, un objet d'étude auquel il est possible d'appliquer une grille de lecture pour analyser les positions des sujets critiques et un moyen pour proposer une autre façon de lire le roman africain. À travers cette double pers- pective méthodologique, cette réflexion va d'abord être centrée sur l'analyse de la critique africaine pour finalement aboutir à une proposi- tion de lecture du roman africain. Et le choix du roman s'explique par le fait que ce genre occupe, plus que tout autre, une place dominante aussi bien par le nombre des oeuvres produites que par la multiplicité esthétique adoptée par les écrivains africains. Depuis une quarantaine d'années, le discours de la critique littéraire africaine suit globalement trois tendances: la critique afrocentriste, la critique eurocentriste et la critique "scientifique».

Le discours critique afrocentriste

3 s'édifie selon une double stratégie: démonstration de l'africanité des oeuvres et réfutation d'une thèse ad- verse de la critique eurocentriste. Cette thèse de l'africanité projette une vision téléologique et essentialiste dont l'aspect pratique débouche sur la valorisation des cultures et civilisations du monde noir. Soutenue par de nombreux critiques, cette thèse a donné lieu à des ouvrages si nom- breux qu'on ne saurait les analyser de façon exhaustive. Même en se limitant à une seule année, on ne peut présenter en quelques pages les nombreuses recherches qui ont tenté de mettre en relation les oeuvres africaines modernes avec les thèmes et les motifs de la littérature orale traditionnelle ou les thèmes sociologiques de l'engagement politique. Je m'en tiendrai donc à celles qui, à mon avis, ont le plus marqué le débat actuel sur le sujet. Représenté de façon magistrale par Janheinz Jahn avec son ouvrage Muntu. L'homme africain et la culture néo-africaine 4 , le courant en question utilise des méthodes variées allant de l'anthropologie à la philosophie ?. Il existe de nombreux travaux portant sur les rapports entre l'idéologie panafricaniste et l'évolution de la critique africaine. On peut consulter avec profit certains d'entre eux qui, à mon avis, me semblent représentatifs de l'ensemble: Locha Mateso, La littérature afri- caine et sa critique, Paris, Karthala/ACCT, ????; Noureini Tidjani Serpos, Aspects de la critique africaine, Paris/Lomé, Silex/Haho, ????; Michel Hausser, Essai sur la poétique de la négritude, ????; Belinda Elizabeth Jack, Negritude and Literary Criticism, Westport, GP; Michel Jean-Claude, Les écrivains noirs et le surréalisme, Sherbrooke, Naaman, ????; Christopher Miller, Blank Darkness. Africanist Discourse in French, Chicago/Londres, ????. ?. Janheinz Jahn, Muntu. L'homme africain et la culture néo-africaine, Paris, Seuil, ???? (????). Dorénavant désigné à l'aide du sigle M, suivi du numéro de la page. en passant par la thématique et l'histoire. Son point de focalisation est l'originalité des textes africains. Vers la fin des années cinquante, alors que la littérature africaine en était encore à ses débuts, Jahn précisait déjà le devoir-faire du critique et le devoir-être d'une oeuvre africaine: "La science littéraire doit découvrir en quoi consiste cette africanité [...]. Il faut chercher quels topoï, quelles idées et quelles caractéristiques de style ont ou n'ont pas leur origine dans des traditions et des civilisations strictement africaines [...]» (M, ??-??). De l'étude de Jahn, retenons trois brèves remarques à propos de la relation entre l'analyse d'une oeuvre et la célébration d'une nation. Premièrement, en magnifiant l'originalité africaine, l'auteur a ouvert la piste de la comparaison des oeuvres afri- caines avec les récits de la tradition orale. Mais, ce faisant, il a fermé celle de la comparaison de ces oeuvres avec les autres littératures en érigeant une barrière entre la littérature orale et la littérature écrite: "[...] une littérature qui ne témoigne d'aucune influence européenne et qui n'est donc pas écrite n'appartient pas à la littérature néo-africaine mais à la littérature africaine traditionnelle. La frontière entre les deux est facile à tracer: c'est la frontière entre la littérature orale et la littérature écrite» (M, ??). De plus, sa méthode critique, qui est un mélange d'ethnologie, de philosophie et d'histoire, se révèle un outil peu efficace pour l'ana- lyse des textes littéraires. Enfin, constitué essentiellement de textes de poésie, son corpus permet difficilement d'extrapoler les résultats à d'autres genres littéraires comme le roman ou le théâtre. En voulant établir la continuité entre les récits de la tradition orale et le roman, Mohamadou Kane 5 poursuit l'héritage de Jahn, tout en ouvrant une piste qui sera suivie par de nombreux critiques après lui. Dès lors se fonde une école - les traditionalistes - dont l'hypothèse de départ est celle que Kane lui-même a posée: le roman africain est une continuation des textes de la littérature orale 6 . Dans cette optique, la critique ne se montrera attentive qu'à saisir et à révéler les seuls liens de continuité entre la littérature orale et les oeuvres écrites pour mieux comprendre les problèmes du roman africain. Cette injonction métho- dologique oriente le critique sénégalais vers le rejet de tout rapport de la littérature africaine avec d'autres littératures: "Quel que puisse être, par la suite, son degré d'adaptation à la culture française, il sera tou- jours impossible d'expliquer ses oeuvres en faisant abstraction de son ?. Mohamadou Kane, Roman africain et tradition, Abidjan/Dakar, Les nouvelles édi- tions africaines, ????. ?. Amadou Koné, Des textes oraux au roman moderne. Les avatars de la tradition orale dans le roman ouest-africain, Francfort, IKO Verlag, ????. origine. C'est en cela d'ailleurs que réside la différence entre le roman- cier africain et le romancier étranger qui écrit sur l'Afrique 7 .» De la critique afrocentriste, on peut tirer quatre observations. Dégagée à partir des thèmes des oeuvres, cette africanité se présente davantage comme le choix idéologique du critique. Elle est plus discur- sivement manifestée par la modalité du devoir-être du sujet critique que par celle de l'analyse syntaxique et stylistique des oeuvres. La critique afrocentriste établit ainsi ses principes de lecture du roman africain à partir des seules références aux récits de la littérature orale, en écartant par là celles qui mettraient le roman africain en rapports intertextuels avec les textes produits par d'autres espaces culturels, surtout le roman de type européen. En second lieu, ces critiques veulent rassembler tous les romans des écrivains africains - et Dieu sait s'ils sont nombreux! - sous un seul schéma, avec leurs motifs et leurs topoï constants. Il suffirait ainsi de projeter ce schéma sur chaque roman pour vérifier, et toujours confir- mer, son africanité, même si, comme le disait si bien Roland Barthes à propos des formalistes, "le texte y perd sa différence 8

». Cette quête de

l'originalité africaine, qui fonctionne narrativement à la manière du vieux récit du mythe du bon sauvage, accrédite une vision manichéenne de l'écriture. Selon cette vision, le roman de type européen dégraderait les modèles traditionnels de la culture africaine. Ceux-ci seraient donc restés à l'abri de la contamination et pourraient ainsi régénérer l'art en général 9 ?. Mohamadou Kane, "Sur les formes traditionnelles du roman africain», Revue de littérature comparée, n o ??, p. ???-???; la citation se trouve à la p. ???. ?. À ce propos, Barthes disait qu'une telle situation conduit le lecteur à un choix incontournable: "Il faut donc choisir: ou bien placer tous les textes dans un va-et-vient démonstratif, les égaliser [...], les forcer à rejoindre inductivement la Copie dont on les fera ensuite dériver; ou bien remettre chaque texte [...] dans son jeu avec les autres textes» (S/Z, op. cit., p. ?). ?. Sur ce malentendu de la valorisation excessive de l'africanité, Bernard Mouralis a fait une mise au point qui situe bien le propos: "Parallèlement, la découverte, au début du ?? e siècle, des arts non européens - notamment les arts africains et océaniens - qui

ne relevaient pas jusqu'alors du champ de l'histoire de l'art allait élargir la réflexion déve-

loppée à partir de la prise en compte des "primitifs" européens. On appréciait ainsi le vitalisme, voire la barbarie, de ces oeuvres exotiques que l'on opposait volontiers à l'as-

thénie et à l'esprit de décadence qui paraissaient caractériser alors la production occiden-

tale. [...] Les cubistes trouvaient d'abord dans l'Art nègre des formes qui les intéressaient parce qu'elles représentaient pour eux des solutions à un grand nombre de problèmes

techniques qu'ils se posaient» (L'Europe, l'Afrique et la folie, Paris, Présence africaine, ????,

p. ??). Sans entrer dans la complexité du discours anthropologique de l'élection du sauvage et ses multiples implications, retenons que l'exaltation et la volte-face des anthropologues réapparaissent presque trait pour trait à la fin des années cinquante, comme en témoigne

Janheinz Jahn. De fait, dès le début du ??

e siècle, le mythe du bon sauvage du ????? e siècle, Et l'africanité, sans que l'on sache exactement ce que signifie ce terme, acquiert la fraîcheur d'une virginité rétinienne, de telle manière que l'exalter, c'est la poser comme une contre-valeur exemplaire face aux productions culturelles européennes. D'après ces critiques, il existe un fossé qui sépare le royaume du salut - l'originalité africaine - du royaume du mal - la dégénérescence de l'art européen - entre les- quels il ne peut y avoir d'autre choix que l'adhésion ou la répudiation. Ces critiques ont non seulement choisi l'Afrique, ses littératures et ses cultures, mais surtout le bon côté de son histoire, de son écriture et de son art. C'est ce phénomène que Frantz Fanon appelle, dans Peau noire, masques blancs, un manichéisme délirant qui consiste à inverser simple- ment les égalités "Blanc-bon», "Noir-mauvais» du mythe du barbare à civiliser élaboré par les anthropologues du ??? e siècle 10 Troisièmement, ce culte de l'essentialité africaine va même à l'en- contre du projet des écrivains, comme en témoigne la réponse de Sony Labou Tansi à propos de son héros dans Les yeux du volcan 11 . Interrogé sur la connexion entre le comportement bizarre du héros et ses origi- nes africaines, l'auteur précise: C'est un fou qui n'a pas de couleur. Africain ou Européen, peu importe. Je crois d'ailleurs que nous devons commencer à réfléchir autrement. Jusqu'à présent, nous autres Africains, avons été très archaïques. Les identités ne doivent pas devenir des handicaps. Moi je suis kongo, mais j'ai aussi une capacité d'ouverture sur les autres, la capacité d'accepter les différences. Donc, mon savant n'a pas de couleur. Sa première préoccupation, c'est le travail qu'il fait et non la couleur de sa peau ou la longueur de ses cheveux 12 De fait, comme l'art d'écrire découle de l'art de lire, il est logique de se demander si l'oeuvre du romancier africain ne résulterait pas également de l'encyclopédie du lecteur-écrivain. Et comme on le sait, celle-ci se constitue à partir d'un mégatexte transgressant les frontières des genres et des oeuvres littéraires ou autres auquel l'auteur pourrait avoir accès qui s'était transformé en mythe du barbare à civiliser au ??? e siècle, est remis à l'honneur avec les travaux des anthropologues négrophiles, notamment Frobénius et Delafosse.

Mais alors qu'au ???

e siècle l'Africain était le sauvage à civiliser, au début du ?? e siècle, il

devient l'homme des origines au contact duquel l'Europe est appelée à se régénérer, du

moins en critique littéraire et artistique. Ici et là, on retrouve ce même slogan d'un art au

plus haut degré de la pureté originelle. Une nouvelle téléologie travaille le discours criti-

que: le renouveau artistique passe par la rencontre et la reconnaissance de l'originalité africaine. ??. Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Paris, Seuil, ????. ??. Sony Labou Tansi, Les yeux du volcan, Paris, Seuil, ????. ??. Sennen Andriamirado, "Sony Labou Tansi, qu'écrivez-vous?», Jeune Afrique, n os ????, ????, p.???. au cours de l'élaboration de son oeuvre. Car, après tout, les romanciers africains ne lisent pas que les contes de Mamadou et Bineta 13 Autant la critique afrocentriste privilégiait les motifs des récits oraux de la tradition orale africaine ou des thèmes sociaux liés à l'histoire récente du continent, autant la critique eurocentriste insiste sur la comparaison du roman africain avec les oeuvres européennes. Cette critique soutient l'idée selon laquelle il existe des règles immuables propres au genre romanesque que tout le monde doit respecter (y compris l'écrivain africain) s'il veut écrire un bon roman 14 . Ce courant s'oppose donc aux thèses de l'africanité. En analysant le roman de Chinua Achebe, No Longer at Ease 15 , Keith Waterhouse énonce par exemple son jugement à partir de l'esthétique du roman réaliste: "I suppose the heart of the matter is that simplicity is all we ask in the novel [...]. Later when the chronicles of change are more or less complete, some very fortunate writers will be able to fill the framework in, wallowing in the new luxuries of characterisation, motivation, depth, psychology and all the rest of it 16 Bien qu'avec une analyse plus poussée sur le plan linguistique, Makhily Gassama, dans son ouvrage Kuma. Interrogation sur la littérature nègre de langue française, soutient l'idée que le roman africain se base sur le modèle occidental sans vraiment l'égaler 17 Derrière ce discours généralisant se cache un présupposé de l'imma- turité du roman africain, genre dont les techniques seraient encore non maîtrisées. C'est ce que Jean-Pierre Ndiaye reproche à Saidou Bokoum 18 "L'élaboration de tout roman suppose que l'on possède ou maîtrise la technique de l'écriture de la langue dans laquelle on s'exprime [...]. Le roman est toujours une construction, une architecture. Dans Chaîne, le

??. Mamadou et Bineta est le titre générique de manuels scolaires de français à l'école

primaire coloniale en Afrique française: Afrique occidentale française (AOF) et Afrique

équatoriale française (AEF).

??. Amadou Koné se livre à une décapante et salutaire déconstruction d'une telle vision eurocentriste, déconstruction qui est la bienvenue même si elle est entachée d'une certaine valorisation des seules formes esthétiques de l'Afrique traditionnelle (Des textes oraux au roman moderne, op. cit.). ??. Chinua Achebe, No Longer at Ease, London, Heinemann, ????. ??. Keith Waterhouse, The New Statesman, vol. ??, ????, p. ???. ??. Makhily Gassama, Kuma. Interrogation sur la littérature nègre de langue française, Abidjan/Dakar, Les nouvelles éditions africaines, ????. ??. Saïdou Bokoum, Chaîne, Paris, Denoël, ????. matériau va dans tous les sens 19 .» Plus loin, le critique reproche au romancier de s'être inspiré de la pire paralittérature occidentale sans être capable de maîtriser les techniques du nouveau roman et du roman fantastique. Que peut-on retenir de ces deux tendances de la critique africaine du roman? Tout d'abord, les deux courants tendent à réduire la liberté créatrice de l'écrivain en voulant l'enfermer dans une africanité ou une européanité dont les formes sont répertoriées et fixées à l'avance. Une contrainte donc non seulement pour les romanciers, mais aussi pour toute critique soucieuse de situer les oeuvres africaines dans le contexte culturel du ?? e siècle, caractérisé par la multiplicité des traits généri- ques et interculturels. Ensuite, malgré les apparences, les deux tendances fonctionnent de la même façon. Elles ont, en effet, la même prétention classique des anthropologues du ??? e siècle: le roman européen reste le modèle du roman africain. En fait, elles répercutent aujourd'hui le même discours qu'hier, car si la critique afrocentriste se contente de renverser les pré- misses de la thèse eurocentriste, celle-ci poursuit allègrement la ligne tracée depuis le ???quotesdbs_dbs23.pdfusesText_29
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