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3 Le devoir général de loyauté entre les parties

devoir de loyauté entre les parties, modulable selon le degré des liens dans le cas d’espèce b) Le devoir général de loyauté entre les parties, dérivé du principe de bonne foi Le principe de droit substantiel le plus fondamental dans la procédure judiciaire consiste en cela



LE DEVOIR DE LOYAUTE, CONTRAINTE OU OPPORTUNITE

loyauté, que le juge s’appuiera pour analyser l’équilibre d’un contrat Mais la loyauté est plus que cela puisqu’elle conditionne le bon fonctionnement de l’économie de marché Ce devoir de loyauté, présent dans le droit des contrats mais qui s’étend également aux



Octobre 2006 Bonne foi et loyauté - Lavery

1 le devoir de loyauté; et 2 le devoir de coopération Le devoir de loyauté Le devoir de loyauté est fondé sur la confiance que doivent avoir les parties l’une envers l’autre En raison de la nature de certains contrats dont l’exécution s’étend sur une plus longue période, tels les contrats



Gouvernance et parties prenantes - Le Devoir

l’obligation de loyauté s’adressait à la société et non aux parties prenantes En parallèle, elle a souligné l’absence de principe établissant «que les intérêts d’un groupe



ENTENTE DE CONFIDENTIALITÉ ET DE LOYAUTÉ CETTE ENTENTE DE

Devoir de loyauté de l’Employé L’Employé s’engage à éviter toute activité pouvant créer un conflit d’intérêts avec la Compagnie ou ses Filiales L’Employé s’engage, pour toute la durée de son emploi auprès de la Compagnie, à demeurer loyal envers la Compagnie et ses Filiales, à ne pas poursuivre, participer, assister ou



Le devoir de coopération comme principe directeur du contrat 1

différence entre les intérêts respectifs des parties était perçue comme une source d’opposi-1 Cet article est rédigé à partir de notre thèse sur « Le devoir de coopération dans le contrat », Lille II, 1998 2 En abandonnant le sort du contrat à la volonté des parties, la doctrine classique avait



Le droit de savoir - Lavery

de ce devoir de diligence (Syndic de) c WiseLoyauté • nature : agir au mieux des intérêts de la société comme entreprise socialement responsable • bénéficiaires du devoir de loyauté : la société, mais les intérêts des parties intéressées (« stakeholders ») peuvent devoir être considérés



Droit des entreprises - IEC-IAB

rence entre parties En principe, l'insertion d'une clause de non-concurrence dans l'acte de nomina-tion d'un gérant ou d'un adminis-trateur ou dans les statuts est par conséquent licite De telles clauses tendent souvent à concrétiser ou étendre l'interdiction légale de concurrence Une clause de non-concurrence peut aussi

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www.igopp.orgGouvernance et parties prenantes

L'obligation du conseil d'administration

d'agir dans l'intérêt de la société _

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Dépôt légal - Juillet 2014

Bibliothèque et Archives nationales du Québec

ISBN 978-2-924055-22-9 (version imprimée)

ISBN 978-2-924055-23-6 (version électronique)

Gouvernance et parties prenantes

: l'obligation du conseil d'administration d'agir dans l'intérêt de la société

Imprimé au Canada

Design par Karine Bellerive

Droits d'auteurs © Yvan Allaire et Stéphane Rousseau / 2014 Ce document est disponible gratuitement sur le site www.igopp.org La reproduction d'extraits est autorisée à des ns non commerciales avec mention de la source. Toute reproduction partielle doit être dèle au texte utilisé.

Gouvernance et parties prenantes :

L'obligation du conseil d'administration d'agir

dans l'intérêt de la société _

Rapport rédigé par

Yvan allaire, Ph. D. (MIT), MSRC

Président exécutif du conseil

Institut sur la gouvernance (IGOPP)

et

Stéphane Rousseau, S.J.D., LL.M.

Professeur titulaire

Chaire en gouvernance et droit des affaires

Université de Montréal

3

Table des matières

_

Sommaire exécutif4

Introduction8

I. Le devoir d'agir dans l'intérêt de la société : la dénition de l'objectif guidant les administrateurs10 A. La conception de l'intérêt social fondée sur la primauté des actionnaires10 B. La conception de l'intérêt social fondée sur l'intérê t

à long terme de l'entreprise14

C.

Sommaire21

II. Comment tenir compte de l'intérêt à long terme de l'entre prise ?22 A.

Le devoir de prudence et diligence22

B.

L'obligation de traitement équitable27

C.

La règle de l'appréciation commerciale29

D.

Mise en œuvre 31

III. Démarche proposée à un conseil devant prendre une décision m ettant en cause 32 A.

Grille d'analyse32

B.

Application : l'exemple d'une délocalisation33

Conclusions36

À propos de l'IGOPP38

Prises de position de l'IGOPP39

4

Gouvernance et parties prenantes

: L'obligation du conseil d'administration d'agir dans l'inté rêt de la société

Sommaire exécutif

_

En droit canadien, l'obligation des administrateurs d'agir au mieux des intérêts de la société inclut le

devoir de traiter de façon juste et équitable chaque partie prenante touchée par les actes de la société.

Quelles sont les parties prenantes dont les attentes devraient être prises en compte ? Comment un conseil devrait-il arbitrer entre les attentes divergentes de différentes parties prenantes ? Où se situe l'intérêt des actionnaires en regard des intérêts des autres parties prenantes ? Dans quel intérêt les administrateurs doivent-ils exercer leur pouvoir de gérer les affaires de la société

Procédant à un examen du droit pertinent ailleurs, notamment en Grande-Bretagne et aux États-Unis,

pour ensuite décortiquer les jugements pertinents des cours canadiennes, ce texte tente d'apporter

des réponses à ces questions qui plongent beaucoup d'administrateurs dans une profonde perplexité.

L'INTÉRÊT DE LA SOCIÉTÉ

Ainsi, l'intérêt de la société est un concept large et contextuel puisqu'il réfère à une entité ayant une

existence perpétuelle. Pour cette raison, selon la Cour suprême, l'obligation de loyauté " ne se limite pas à la valeur des actions ou au prot à court terme ». Selon la Cour, dans une perspective économique, ce concept réfère à " la maximisation de la valeur de l'entreprise ». En termes plus simples, il enjoint les administrateurs à agir de manière à faire de la société une " meilleure entreprise ».

La référence à la maximisation de la valeur de l'entreprise suggère que la Cour suprême a cherché à

rendre compte de la diversité des intérêts qui sont réunis dans la société par actions. Ce faisant, elle a

refusé de réduire l'intérêt de la société à sa valeur boursière.

En effet, en agissant dans l'intérêt de la société, les administrateurs prendront des décisions bénéciant

généralement du même coup à l'ensemble des parties prenantes à long terme. Dans certaines

circonstances, leurs décisions feront toutefois des gagnants et des perdants parmi les parties prenantes.

La Cour suprême a reconnu cette réalité dans l'arrêt BCE en signalant que, même dans ces cas,

l'obligation de loyauté s'adressait à la société et non aux parties prenantes. En parallèle, elle a souligné

l'absence de principe établissant " que les intérêts d'un groupe - ceux des actionnaires, par exemple - doivent prévaloir sur ceux d'un autre groupe 1 de parties prenantes.

1 BCE Inc. c. Détenteurs de débentures de 1976, 2008 CSC 69, par. 84.

5

LES PARTIES PRENANTES ET TRAITEMENT ÉQUITABLE

Il est vrai que la Cour s'est abstenue de formuler des indications guidant les administrateurs dans la

hiérarchisation des intérêts, laissant cette question à leur appréciation commerciale. Cependant,

rappelons que la Cour suprême a placé l'accent sur l'entité juridique pour dénir l'intérêt de la société.

Cette approche favorise une perspective à long terme dans la prise de décision. Dans son ensemble, la jurisprudence relative au recours en cas d'abus (le " recours pour oppression »)

conrme que l'obligation des administrateurs d'agir au mieux des intérêts de la société inclut le devoir de

traiter de façon juste et équitable chaque partie intéressée touchée par les actes de la société. Il n'existe

pas de règles absolues. Il faut se demander chaque fois si, dans les circonstances, les administrateurs

ont agi au mieux des intérêts de la société, en prenant en considération tous les facteurs pertinents,

ce qui inclut, sans s'y limiter, la nécessité de traiter les parties intéressées qui sont touchées de façon

équitable, conformément aux obligations de la société en tant qu'entreprise socialement responsable.

L'obligation de traitement équitable des parties prenantes lors de prise de décision par les administrateurs

ne doit pas être surestimée. Du point de vue substantiel, le recours pour oppression protège uniquement

les droits et les intérêts des détenteurs de valeurs mobilières, des créanciers, des dirigeants et

des administrateurs. La portée du recours ne s'étend pas aux droits et aux intérêts des autres parties

prenantes, tels que les employés. Du point de vue procédural, ces autres parties prenantes n'ont pas

l'intérêt de plein droit pour intenter le recours pour oppression. De fait, les études démontrent que les

tribunaux leur ont rarement reconnu l'intérêt pour intenter ce recours. En somme, l'état du droit fait en

sorte que l'obligation de traitement équitable des parties prenantes autres que celles énumérées dans

la loi n'a pas de véritable effectivité.

Ainsi, la Cour suprême enjoint les conseils d'administration de prendre des décisions dans l'intérêt à

long terme de la société, sans favoriser l'une ou l'autre partie prenante, mais ne donne aucun recours

aux parties prenantes (autres que les actionnaires, créanciers, administrateurs et dirigeants) si elles se

sentent lésées par une décision.

les stakeholders dans sa dénition de l'intérêt de la société. De l'autre, soit par omission ou

inadvertance, elle ne remédie pas aux lacunes de la LCSA en matière de recours. Au nal, cela limite donc l'effectivité des arrêts en faveur des parties prenantes.

Toutefois, des recours pourront être intentés par des actionnaires adhérant à la perspective de la

maximisation de la valeur à long terme, des investisseurs institutionnels appliquant une stratégie

d'investissement socialement responsable ou des parties prenantes, comme les syndicats de travailleurs,

détenant par ailleurs des actions de la société. 6

Gouvernance et parties prenantes

: L'obligation du conseil d'administration d'agir dans l'inté rêt de la société

LE DEVOIR DE S'INFORMER

Les administrateurs sont tenus d'agir avec prudence et diligence dans l'exercice de leurs fonctions.

Pour respecter leur devoir de prudence et diligence, les administrateurs ont l'obligation de se renseigner

adéquatement relativement à la décision à prendre en obtenant toute l'information importante

raisonnablement disponible dans les circonstances.

Dans le contexte contemporain d'engins de recherche, de profusion de sources d'information facilement

accessibles, l'obligation de consulter " toute l'information raisonnablement disponible » place haute la barre de la responsabilité du conseil.

Au cours des dernières années, les tribunaux ont statué que les administrateurs ne pouvaient pas

considérer que leur obligation de se renseigner était automatiquement remplie s'ils se satisfaisaient des

renseignements transmis par les dirigeants de la société pour prendre une décision.

Par ailleurs, même si les administrateurs ont consulté des experts, cette consultation n'a pas pour

effet de les exonérer de leur obligation de prudence et de diligence lors de la prise de décision. Les

administrateurs devaient aussi maintenir une supervision de la préparation de l'opinion sur laquelle ils

sont susceptibles de fonder leur décision par la suite. LA RÈGLE DE L'APPRÉCIATION COMMERCIALE (BUSINESS JUDGMENT RULE)

Les membres de conseils d'administration sont aussi protégés par la règle de l'appréciation commerciale

business judgment rule »), laquelle consiste en un principe de déférence guidant les tribunaux lors de

la révision des décisions d'affaires.

La déférence judiciaire résultant de l'application de la règle de l'appréciation commerciale est assujettie

à deux conditions. La première condition concerne la qualité du processus décisionnel. Elle exige

que les administrateurs aient suivi un processus raisonnablement prudent et diligent pour prendre la

décision. Parmi les éléments qui attestent d'un tel processus, signalons le sérieux et la durée des

délibérations, de même que l'obtention de toute l'information raisonnablement accessible et pertinente

pour la décision. La seconde condition implique : Le volet substantiel de la règle implique l'examen de la raisonnabilité de la décision des administrateurs.

Pour conclure, le risque de responsabilité pour les administrateurs sera le plus élevé lorsqu'ils

omettent de se renseigner adéquatement relativement aux incidences de leur décision sur l'ensemble des parties prenantes et que, de ce fait, celle-ci n'est pas raisonnable et a des conséquences défavorables pour la société.

Sommaire exécutif

7

UNE DÉMARCHE

Note texte se termine par une proposition de démarche en quatre étapes que pourrait adopter un conseil d'administration pour être pleinement conforme aux dispositions des lois canadiennes

1. Déterminer l'objectif poursuivi et l‘intérêt de la société dans le cadre d'une décision

spécique;

2. Établir un processus décisionnel qui soit rigoureux et fasse usage de toute

l'information " raisonnablement accessible 3. Apprécier les attentes raisonnables des parties prenantes pouvant exercer des recours contre la société; 4. Identier les options qui, selon le jugement d'affaires des administrateurs, servent le mieux les intérêts à long terme de l'entreprise.

L'examen d'un exemple hypothétique, une délocalisation, permet d'illustrer cette démarche ainsi que le

type de questions que devrait soulever un conseil d'administration. 8

Gouvernance et parties prenantes

: L'obligation du conseil d'administration d'agir dans l'inté rêt de la société

Introduction

_

Indubitablement, aucune société commerciale ne peut survivre sans afcher des résultats économiques

favorables. Pour réussir en longue durée, l'entreprise doit faire appel au talent, à l'expérience et

l'engagement de tout son personnel. Elle doit protéger sa bonne réputation comme employeur,

fournisseur de biens et services, acheteur et citoyen des régions et des pays où elle mène ses activités.

Elle doit se montrer digne de la conance de toutes les parties prenantes nécessaires à son succès.

À une certaine époque, cette afrmation aurait été qualiée de lapalissade.

Cette façon de concevoir le rôle et la responsabilité de l'entreprise, répandue au cours des années 1950

à 1980, reposait sur des dirigeants et des conseils d'administration préoccupés de maintenir un sain

équilibre entre les intérêts des employés, des actionnaires, des clients et de la société en générale. Ni

les marchés nanciers, ni les actionnaires n'exerçaient une inuence signicative sur les décisions de la

grande entreprise en raison de la fragmentation de l'actionnariat et d'un nancement selon des sources

internes à l'entreprise.

Dans les meilleures circonstances, cet arrangement industriel a produit d'excellentes entreprises durant

cette période : IBM, Dupont, GM et beaucoup d'autres aux États-Unis; Bell Canada, Alcan, les banques à charte canadiennes, Canadien Pacique et autres au Canada 2

Quelles que furent leurs obligations juridiques, au cours des années 1950-1980, les directions de grandes

entreprises ainsi que leurs conseils d'administration (formés alors d'une majorité de membres provenant

de la direction) comprenaient qu'elles devaient prendre en compte l'intérêt de parties prenantes tout

autant que l'intérêt des actionnaires.

UN CHANGEMENT DE CONTEXTE

Pour un ensemble de raisons, cette combinaison de loyauté réciproque et de responsabilité envers les

parties prenantes » s'effrite graduellement depuis le début des années 1980. Les grandes entreprises,

les unes après les autres, ont répudié ce contrat psychologique, social et économique entre l'entreprise,

son personnel, ses actionnaires et tous les autres commettants. Les " clauses » essentielles de ce

contrat, l'arbitrage entre les intérêts des parties prenantes, la pérennité d'emploi, les promotions

exclusivement internes et la rémunération établie selon des règles d'équité interne ont subi l'assaut de

nouvelles réalités économiques et sociales. 2

Voir Allaire et Firsirotu, " L'entreprise stratégique » (Gaétan Morin, éditeur, 1993), " Stratégies et moteurs de

performance » (Chenelière-McGraw Hill, 2004), " Plaidoyer pour un nouveau capitalisme », (IGOPP, 2009)

9 Au fur et à mesure que les fonds de placement de toute nature sont devenus les actionnaires

majoritaires » des sociétés cotées en Bourse, que les conseils d'administration furent peuplés en

majorité, comme le veut l'orthodoxie de la gouvernance, par des membres " externes » et indépendants,

et que les dirigeants furent richement rémunérés, en grande partie par des options sur le titre de

l'entreprise, alors les marchés boursiers et nanciers devinrent la partie prenante dominante, parfois la

seule qui compte. Les fonds institutionnels, devenus les actionnaires majoritaires des grandes entreprises, veulent

être traités comme les propriétaires de l'entreprise. Pour s'assurer que les intérêts des actionnaires

deviennent prioritaires pour le dirigeants, ceux-ci reçoivent des rémunérations variables liées au prix de

l'action, lesquelles s'avèrent extrêmement généreuses à la condition de mousser la valeur boursière de

l'entreprise.

Encore une fois, quel que fut l'encadrement juridique des responsabilités des conseils d'administration,

ceux-ci en vinrent à comprendre qu'ils étaient surtout responsables de " maximiser la valeur des actionnaires ».

C'est ainsi que pendant une trentaine d'années, le leitmotiv, l'impératif premier, de la gouvernance

des sociétés publiques dans les pays anglo-saxons se déclina sous forme de " création de valeur pour l'actionnaire ». Or, la loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) stipule clairement que les conseils d'administrations doivent agir dans l'intérêt de la société 3 . La Cour suprême du Canada a interprété la portée de cette responsabilité dans deux jugements relativement récents : Magasins à rayons Peoples Inc. c. Wise (2004) et BCE Inc. c. Détenteurs de débentures (2009).

Ces deux jugements sont péremptoires

: le conseil, dans sa démarche de prise de décision, ne doit

accorder aucun traitement préférentiel aux intérêts des actionnaires ni à ceux de toute autre partie

prenante mais doit exclusivement agir dans l'intérêt de la société dont ils sont administrateurs.

Cependant, ni la LCSA, ni les jugements de la Cour suprême n'offrent de lignes directrices pour éclairer

les conseils d'administration sur l'application pratique de ces énoncés dans des situations concrètes.

Ainsi, lorsque les intérêts de diverses parties prenantes sont opposés, comment devrait-on comprendre

l'intérêt de la société ? Comment le conseil devrait-il procéder pour établir un arbitrage équitable entre

les intérêts de diverses parties prenantes et lesquelles ont droit à une telle considération

Ce texte tente de répondre à ces questions, lesquelles sont d'une importance cruciale pour tout

administrateur de sociétés canadiennes. 3

Ainsi que dans une trentaine d'États américains où le législateur, poussé à agir par les vagues de prise de contrôle

hostiles » des années 1980, accorda aux conseils l'autorité, parfois le devoir, de prendre en compte les intérêts de

multiples parties prenantes dans leur évaluation de l'à-propos de rejeter ou non une offre d'achat.

10

Gouvernance et parties prenantes

: L'obligation du conseil d'administration d'agir dans l'inté rêt de la société I. Le devoir d'agir dans l'intérêt de la société : la dénition de l'objectif guidant les administrateurs _

Dans quel intérêt les administrateurs doivent-ils exercer leur pouvoir de gérer les affaires de la société

Cette question centrale de gouvernance est débattue dans la littérature et la jurisprudence depuis plus

d'un siècle. Selon l'approche classique, soutenue par un courant théorique provenant de l'économie

nancière, les administrateurs doivent agir dans l'intérêt des actionnaires.

Depuis le début du XXIe siècle, les scandales nanciers, les cas d'irresponsabilité sociale et la crise

nancière ont contribué à alimenter la remise en cause de la primauté des actionnaires. Cette remise

en cause s'appuie sur des cadres théoriques qui proposent une conception plus large de l'intérêt de la

société fondée sur l'entreprise. Comme nous le verrons ci-dessous, l'évolution du droit des sociétés de

tradition anglo-américaine témoigne de cet élargissement de la notion d'intérêt de la société.

A. LA CONCEPTION DE L'INTÉRÊT SOCIAL FONDÉE SUR LA PRIMAUTÉ

DES ACTIONNAIRES

En droit anglo-américain des sociétés, le devoir d'agir dans l'intérêt de la société a été interprété

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