[PDF] N° 3864 ASSEMBLÉE NATIONALE 16 mars 2022 DE FORCES »





Previous PDF Next PDF



« Le maintien de lordre au regard des règles de déontologie » —

1 déc. 2017 c) Les forces chargées du maintien de l'ordre sont confrontées à la ... 1. Dans le ressort de la Préfecture de police de Paris. 2.



N° 3864 ASSEMBLÉE NATIONALE

16 mars 2022 DE FORCES » POUR LA GESTION DES CRISES SUR LE TERRITOIRE ... ii. Un dispositif de protection du territoire national gradué « dans la ...



Mise en page 1

les forces de police à statut militaire au sein des missions civiles de le rôle de la gendarmerie jordanienne dans la gestion des crises. . . . . . . .



Le Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale 2013

C. Les moyens de la prévention et de la gestion des crises des forces bien entrainées bien équipées et bien renseignées. Elles devront.



SCHÉMA NATIONAL DINTERVENTION

Les forces d'intervention spécialisée de la gendarmerie et de la police nationales agissent pour leur part immédiatement après la primo-intervention pour 



Repenser la défense face aux crises du 21e siècle - Institut Montaigne

dernier par les forces armées maliennes ayant renversé le président Ibrahim première ligne dans la gestion de crise la pandémie de Coronavirus a.



La gestion

27 janv. 2020 les forces de police. (première catégorie) la gendarmerie mobile et les CRS. (deuxième catégorie) et les forces armées.



Livre blanc de la sécurité intérieure

la répartition des forces avec les caractéristiques des territoires par une révision du régime de la police d'État et une adaptation des critères liés aux.



RAPPORT D´INFORMATION

24 juil. 2018 1. Une grande diversité d'aléas sur l'ensemble des territoires . ... C. LES FORCES ARMÉES UN APPUI PRÉCIEUX EN CAS DE CRISE MAJEURE



Guide daide à la préparation et à la gestion des tensions

25 avr. 2012 1. Organisation nationale et territoriale de la gestion de crise. 17. III Préparation du système de santé aux SSE : le dispositif ORSAN.

N° 3864 ASSEMBLÉE NATIONALE N 3864
______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION

DU 4

OCTOBRE

1958

QUATORZIÈME

LÉGISLATURE

Enregistré

la

Présidence

de l'Assemblée nationale le 22 juin 2016.

RAPPORT D'INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l'article 145 du Règlement PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES en conclusion des travaux d'une mission d'information (1) sur la présence et l'emploi des forces armées sur le territoire national

ET PRÉSENTÉ PAR

MM. OLIVIER AUDIBERT TROIN ET CHRISTOPHE LÉONARD,

Députés.

(1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page. La mission d'information sur la présence et l'emploi des forces armées sur le territoire national est composée de : - MM. Olivier Audibert Troin et Christophe Léonard, rapporteurs ; - M. Jean-Jacques Candelier, Mmes Nathalie Chabanne et Geneviève Fioraso, MM. Charles de la Verpillière, et Philippe Meunier, membres. - 3 -

SOMMAIRE

___ Pages

INTRODUCTION ........................................................................................................... 9

PREMIÈRE PARTIE : L'OPÉRATION SENTINELLE, ENTRE

CONTINUITÉ ET RUPTURE

.................................................................................... 15 I. LES ARMÉES CONSTITUENT DEPUIS LONGTEMPS UN " RÉSERVOIR DE FORCES » POUR LA GESTION DES CRISES SUR LE TERRITOIRE

NATIONAL ..................................................................................................................... 15

A. S'IL EST PLUS VISIBLE DEPUIS 2015, LE RECOURS AUX ARMÉES POUR LA PROTECTION DU TERRITOIRE NATIONAL N'EST PAS

NOUVEAU EN SOI ................................................................................................. 15

1. Dans les milieux maritime et aérien, les armées assurent déjà " en première

ligne » la protection du territoire ............................................................................ 16

a. La posture permanente de sûreté aérienne ............................................................ 16

i. L'espace aérien, un milieu dans lequel les armées sont les forces " primo- intervenantes »

.................................................................................................. 17

ii. Une mission permanente, qui mobilise une part substantielle des moyens de l'armée de l'air

............................................................................................................. 19

b. La posture permanente de sauvegarde maritime ................................................... 20

i. Une mission interministérielle confiée à la marine nationale ....................................... 20

ii. Un dispositif de protection du territoire national gradué " dans la profondeur » du milieu marin

..................................................................................................... 23

2. Dans le milieu terrestre, les armées ont depuis longtemps pour mission de

renforcer les forces de sécurité intérieure en cas de crise ...................................... 28

a. Un cadre juridique et une organisation déjà anciens ............................................. 28

i. Un cadre juridique traditionnel, organisé autour du principe de subordination de la force armée à l'autorité civile et de la " règle des quatre "i" » .................................. 28 ii. Une chaîne de commandement spécifique : l'organisation territoriale interarmées de défense (OTIAD) .............................................................................................. 32

b. Une place importante dans le contrat opérationnel des armées .............................. 34

i. La protection du territoire national, y compris en milieu terrestre, a continuellement fait partie des missions assignées aux armées par leur contrat opérationnel ................ 35

ii. Ce contrat opérationnel a déjà été mis en oeuvre pour des missions de protection ......... 36

- 4 -

B. LES ARMÉES CONSTITUENT SOUVENT LE PRINCIPAL

" RÉSERVOIR DE FORCES » À LA DISPOSITION DU GOUVERNEMENT POUR GÉRER LES CRISES TELLES QUE LES

ATTENTATS DE 2015 ........................................................................................... 41

1. Les armées ont montré leur capacité à remplir leur fonction de " réservoir de

forces » lors de la crise résultant des attentats de 2015 .......................................... 42

a. Un " réservoir de forces », ultima ratio de l'État .................................................. 42

b. Le déploiement des armées sur le territoire national en janvier 2015 a bien montré la réactivité des forces et leur capacité à s'adapter au contexte de l'opération

.......................................................................................................... 47

i. Un déploiement massif et remarquablement rapide ................................................... 47

ii. Une adaptation rapide au contexte de la mission ...................................................... 50

2. Le recours aux armées pour assurer des missions de protection dans les

situations de crise devient d'ailleurs fréquent dans de nombreuses démocraties

occidentales ............................................................................................................ 58

a. Le cas du Royaume-Uni : de l'opération Banner à l'opération Temperer .............. 59

i. Le cadre général du recours aux forces armées ......................................................... 60

ii. Les enseignements de l'opération Banner en Irlande du Nord .................................... 63

iii. L'opération Temperer de protection de la population contre le terrorisme .................. 69

iv. La place de l'opération Temperer dans une stratégie globale de protection du territoire britannique .......................................................................................... 75

b. Le cas de la Belgique ........................................................................................... 77

i. Le cadre légal et doctrinal de l'engagement des armées belges sur leur territoire national

............................................................................................................ 77

ii. Le déploiement des armées belges depuis 2015 sur leur territoire ............................... 79

iii. Structures et procédures de gestion de crise ............................................................ 80

iv. L'impact de l'engagement des armées dans la vie politique et dans l'opinion publique

........................................................................................................... 85

c. Le cas particulier d'Israël ..................................................................................... 86

i. Une stratégie de protection du territoire national fondée sur un contrôle strict des frontières et des flux ......................................................................................... 87 ii. Une intense activité de renseignement intérieur, qui donne de la profondeur stratégique au dispositif de protection du territoire ................................................. 89

iii. La place des armées dans le dispositif de protection du territoire israélien .................. 93

iv. L'encadrement juridique de l'action des armées et des forces de sécurité sur le territoire israélien .............................................................................................. 98 - 5 - II. LE CHANGEMENT DE PARADIGME DE 2015 : L'ENGAGEMENT DURABLE ET MASSIF DES ARMÉES SUR LE SOL NATIONAL, JUSTIFIÉ PAR LA PERMANENCE ET L'INTENSITÉ EXCEPTIONNELLES

DE LA MENACE ........................................................................................................... 101

A. LA MENACE ACTUELLE, AUSSI INTENSE QUE DURABLE, APPELLE

DES MESURES DE PROTECTION QUI DÉPASSENT LES

HYPOTHÈSES INITIALES DES CONTRATS OPÉRATIONNELS ................ 102

1. La menace terroriste actuelle sur le sol national se caractérise par sa haute

intensité et son inscription dans la durée................................................................ 102

a. Une menace d'une intensité nouvelle : le terrorisme " militarisé » ........................ 103

b. Une menace durable ............................................................................................ 108

2. Les mesures de protection qu'appelle cette menace dépassent ce que

prévoyaient les contrats opérationnels ................................................................... 110

a. La difficulté ne résidait pas tant dans le volume des forces déployées que dans leur " capacité à durer » ...................................................................................... 110 i. L'installation " dans la durée » de l'opération Sentinelle crée des tensions dans la gestion des effectifs de l'armée de terre ................................................................ 110

ii. Les tensions liées à la mise en oeuvre du plan Cuirasse ............................................. 112

b. La tension dans la gestion des effectifs s'est traduite par des " renoncements » maîtrisés

............................................................................................................. 115

i. Des " renoncements » à certaines activités ............................................................... 116

ii. Des renoncements toutefois maîtrisés ..................................................................... 118

B. DES MESURES D'ADAPTATION DE LA PROGRAMMATION ET DE LA

DOCTRINE MILITAIRES ....................................................................................... 121

1. L'actualisation de la loi de programmation militaire traduit l'inscription dans la

durée de l'opération Sentinelle ............................................................................... 121

a. Une refonte du contrat opérationnel de protection du territoire ............................. 121

i. Un haut volume d'engagement : jusqu'à 10 000 hommes en cas de crise ..................... 122

ii. Une inscription des mesures de protection dans la durée : jusqu'à 7 000 hommes en permanence

..................................................................................................... 122

b. Des moyens revus à la hausse .............................................................................. 122

i. Une manoeuvre des ressources humaines complètement réorientée .............................. 122

ii. Des moyens budgétaires supplémentaires ............................................................... 124

2. Une adaptation du cadre juridique, conceptuel et doctrinal de l'engagement des

armées sur le territoire national : le rapport au Parlement ..................................... 125

a. Un cadre juridique ajusté à la marge : l'adaptation des règles d'emploi de la force à la tactique des " cavales meurtrières » des terroristes ............................... 126

i. L'état du droit lors de la publication du rapport au Parlement ..................................... 126

ii. Le cadre légal de l'emploi de la force a déjà été adapté au nouveau mode d'action des

terroristes que constituent les " cavales meurtrières » ............................................. 130 - 6 - iii. Un vif débat sur l'opportunité d'assouplir davantage le cadre légal de l'emploi de la force pour l'adapter aux menaces ......................................................................... 132

iv. Un cadre juridique à stabiliser .............................................................................. 139

b. Une fonction stratégique de protection " à repenser » ........................................... 140

i. Notre stratégie de défense et de sécurité nationale plaçait le risque terroriste au

premier plan

..................................................................................................... 140

ii. Une refonte annoncée de la fonction stratégique de protection ................................... 140

c. De nouvelles " postures » des armées, au premier rang desquelles une " posture de protection terrestre » (PPT) ............................................................................ 143 d. Une nouvelle posture de cyberdéfense et des " capacités permanentes » de soutien sanitaire et pétrolier ................................................................................ 146 e. Des principes d'engagement des armées sur le territoire national visant à exploiter au mieux leurs savoir-faire spécifiques, plutôt qu'à les employer en " supplétifs » des forces de sécurité intérieure ..................................................... 147

i. Les spécificités des armées depuis leur professionnalisation ....................................... 147

ii. Les principes d'engagement des armées sur le territoire national ................................ 148

iii. Une rupture par rapport à la " logique Vigipirate » .................................................. 150

f. Un périmètre de missions large mais clairement défini ......................................... 150

i. Aller au-delà des missions actuelles de Sentinelle ..................................................... 150

ii. Des missions exclues : les opérations judiciaires et le maintien de l'ordre ................... 151

SECONDE PARTIE : PROPOSITIONS POUR PASSER DE

SENTINELLE À UNE VÉRITABLE POLITIQUE DE PROTECTION

TERRESTRE DU TERRITOIRE NATIONAL AVEC LE CONCOURS

DES ARMÉES

................................................................................................................ 153

I. LA MISE EN OEUVRE DE LA NOUVELLE DOCTRINE D'EMPLOI DES ARMÉES EN MILIEU TERRESTRE SUR LE TERRITOIRE NATIONAL

CONSTITUE ENCORE UN DÉFI ............................................................................... 153

A. LA DOCTRINE N'A QUE PEU ÉVOLUÉ SUR DEUX SUJETS POURTANT MAJEURS : LA GOUVERNANCE INTERMINISTÉRIELLE

DU DISPOSITIF ET L'EXPLOITATION DE L'INFORMATION

OPÉRATIONNELLE ............................................................................................... 154

1. Le recueil, le traitement, le partage et l'utilisation de l'information

opérationnelle ......................................................................................................... 154

a. L'utilisation d'informations opérationnelles pertinentes, dans les limites fixées par le cadre légal, constitue une condition d'efficacité des armées sur le territoire national

................................................................................................ 154

i. Le cloisonnement des informations, parfois au-delà de ce que prévoit la loi, constitue aujourd'hui un facteur limitatif de l'efficacité de l'opération Sentinelle .................... 155 ii. Pourtant, la gestion de l'information d'intérêt opérationnel est au coeur des savoir- faire militaires, particulièrement dans un contexte de prévention d'actes terroristes .... 157 - 7 - b. Une clarification des conditions d'utilisation de l'information opérationnelle serait cohérente avec la volonté d'exploiter mieux les savoir-faire des armées qui sous-tend la nouvelle doctrine ....................................................................... 158 i. La nouvelle doctrine ne comprend pas de développements ambitieux s'agissant de la gestion de l'information opérationnelle dans l'emploi des armées sur le territoire national

............................................................................................................ 158

ii. Une clarification des règles de gestion de l'information est souhaitable, dans le cadre général fixé par la loi et dans le souci d'optimiser l'action des armées ...................... 159

2. L'articulation des armées avec les forces de sécurité intérieure ............................. 159

a. Aux niveaux opératif et tactique, la coordination sur le terrain de forces complémentaires constitue un enjeu majeur pour l'efficacité du dispositif national de protection .......................................................................................... 160

i. La coordination des armées et des forces de sécurité intérieure sur le terrain est encore

peu structurée

.................................................................................................... 160

ii. L'accent doit être mis sur la complémentarité des différentes catégories de forces

déployées sur le terrain ....................................................................................... 162 b. Au niveau stratégique, une politique plus ambitieuse de coordination de la planification et de la conduite des opérations de sécurité intérieure est nécessaire

........................................................................................................... 166

i. Les dispositifs actuels de planification et de conduite des opérations restent cloisonnés . 167

ii. Un dispositif permanent interministériel de planification " à froid » et de conduite des opérations pour la gestion des crises serait utile ................................................ 173 B. LA MANOEUVRE EN COURS PRÉSENTE PLUSIEURS DÉFIS .................... 175

1. Deux principaux défis techniques : réussir la manoeuvre du recrutement et

privilégier les modes d'action véritablement militaires ......................................... 175

a. Réussir la manoeuvre des ressources humaines ..................................................... 176

i. La " remontée en puissance » des forces pour la protection du territoire national constitue une manoeuvre d'une ambition inédite .................................................... 176

ii. Les premiers résultats sont globalement conformes aux prévisions ............................. 187

b. Privilégier les modes d'action véritablement militaires ......................................... 190

i. Un dispositif initialement très majoritairement statique.............................................. 190

ii. Des facteurs d'inertie ........................................................................................... 190

iii. Les inconvénients de la posture statique ................................................................ 194

iv. Des expérimentations prometteuses de modes d'action plus dynamiques de la force

Sentinelle

......................................................................................................... 198

2. Un défi politique : prendre la responsabilité d'une gestion souple du volume

des forces engagées ................................................................................................ 200

a. Un effet de cliquet affectant les effectifs engagés ................................................. 201

b. Un effet de cliquet affectant les niveaux d'alerte .................................................. 201

II. APRÈS L'HEURE DE LA RÉACTION AUX CRISES, CELLE DES CHOIX STRATÉGIQUES ET POLITIQUES DE LONG TERME ........................................ 204 A. VERS UNE REFONTE PLUS COMPLÈTE DE LA PROGRAMMATION

MILITAIRE EN COURS ......................................................................................... 204

- 8 -

1. Pour prendre en compte les nouvelles mesures d'effectifs annoncées après le

13 novembre ........................................................................................................... 205

2. Pour prendre en compte l'ensemble des implications de la posture de

protection terrestre, y compris sur les ressources financières, les

infrastructures, les équipements et le soutien des forces ........................................ 205

a. L'armement de la force sur le territoire national ................................................... 206

i. Des besoins très limités en matière d'armement ........................................................ 206

ii. Des besoins en matière de mobilité de la force......................................................... 207

b. L'impact de la posture de protection terrestre sur les besoins d'infrastructures du ministère de la Défense .................................................................................. 209

c. La question du financement des opérations intérieures ......................................... 211

i. Un financement satisfaisant pour l'exercice 2015...................................................... 211

ii. Un parallèle avec les OPEX qui gagnerait à être établi par les textes .......................... 213

B. LA QUESTION DE LA JUSTE PLACE DES ARMÉES DANS LA PROTECTION DU SOL NATIONAL À LONG TERME .................................... 214

1. Quels champs de compétence respectifs pour les armées et les forces de

sécurité intérieure ? ................................................................................................ 214

a. " Les armées ont-elles leur place sur le territoire national ? » ............................... 214

i. La question récurrente de l'état de guerre................................................................. 214

ii. Une question sans véritable pertinence ................................................................... 216

b. Où les armées ont-elles leur place sur le territoire national ? ................................ 219

2. Quelles places respectives pour les militaires d'active et les réservistes ? ............. 220

a. Des réserves engagées dans une profonde transformation ..................................... 220

b. Un engagement prioritaire des réservistes de l'armée de terre sur le territoire national

............................................................................................................... 222

TRAVAUX DE LA COMMISSION ........................................................................... 225

ANNEXE : AUDITIONS ET DÉPLACEMENTS DE LA MISSION

D'INFORMATION

.............................................................................................. 251 - 9 -

INTRODUCTION

La doctrine d'emploi de nos armées sur le sol national fait l'objet d'une réflexion intense depuis le lancement de l'opération Sentinelle en janvier 2015, et son évolution est encore en cours au moment où est publié ce rapport. Non que le recours aux armées sur le territoire national constitue en soi une nouveauté : notre pays a en la matière une longue tradition et, dans les milieux maritime et aérien, les armées sont même en première ligne pour assurer la protection du territoire national. Mais avec l'opération Sentinelle, l'engagement

des armées ௅ pour l'essentiel, l'armée de terre ௅ sur le sol national a pris une tout

autre dimension : la menace terroriste est plus intense que jamais, et les effectifs engagés sont plus que décuplés par rapport au dispositif ௅ d'ailleurs devenu assez routinier ௅ du plan Vigipirate. Nos armées ont contribué au plan Vigipirate pendant vingt ans ; l'opération Sentinelle doit-elle durer, elle aussi, telle quelle, plusieurs décennies ? Pour les rapporteurs, c'est impossible. Avec l'opération Sentinelle, l'engagement militaire sur le territoire national a changé d'échelle ; il ne saurait durer qu'en changeant aussi de modèle. Tel est l'enjeu de la réflexion doctrinale en cours. Bien entendu, les rapporteurs ne prétendent pas refonder eux-mêmes cette doctrine ; mais leurs travaux ont pour objet d'y apporter une contribution, en l'état actuel de leurs réflexions. Ce rapport a ainsi pour vocation de marquer une étape dans le mouvement de refondation doctrinale de l'engagement des armées au service de la protection du sol national, dans la lignée des précédents travaux parlementaires. En effet, l'actualisation de la loi de programmation militaire, le 28 juillet 2015, avait déjà marqué une étape de ce mouvement ; la discussion en séance publique le 16 mars 2016 d'un rapport au Parlement remis par le Gouvernement sur ce sujet en a constitué une autre. Les bases d'une " posture de protection terrestre » des armées ont ainsi été posées ; la définition de son contenu reste en cours. Mais ce mouvement ne pourra être vu comme abouti qu'avec l'adoption d'une programmation militaire renouvelée ௅ que ce soit par " réactualisation » de l'actuelle loi de programmation militaire ou par le vote d'une nouvelle loi. - 10 - C'est dans ce cadre que les rapporteurs veulent montrer comment, s'il est décidé que nos armées participent durablement à la protection du sol national, il convient de leur donner les moyens de le faire en tirant au mieux parti de leurs savoir-faire militaires. Les militaires n'ont pas à servir de supplétifs aux policiers ou aux gendarmes : leur plus-value professionnelle est ailleurs, ils ont d'autres savoir-faire à apporter à la protection du territoire national. Cela suppose d'aller plus loin qu'il n'est envisagé à ce jour en diverses matières : l'exploitation de l'information d'intérêt opérationnel, la mise en place de structures de planification et de commandement des opérations, des missions aux effectifs cohérents avec des contrats opérationnels équilibrés, et une posture cohérente avec les compétences des militaires, complémentaires de celles des forces de sécurité intérieure. Cela suppose également que la société s'adapte, elle aussi, à la menace terroriste qui pèse sur elle. Et pour ce faire, il importe avant tout d'étayer les travaux de doctrine en cours par un investissement politique largement partagé, notamment avec le vote d'une programmation militaire tirant toutes les conséquences de l'engagement des armées sur le sol national. Plus largement, c'est aussi la résilience de la société dans son ensemble qu'il convient de développer. - 11 -

PRINCIPALES PROPOSITIONS DES RAPPORTEURS

1. Le " statique » doit être l'exception.

Les gardes dynamiques (fût-ce dans un périmètre restreint de " garde dynamique à vue ») sont tactiquement plus efficaces que les gardes statiques, " consomment » moins d'effectifs, et permettent de tirer un meilleur profit des techniques de contrôle de zone que maîtrisent les armées. Le rapport entre les effectifs déployés en mode dynamique et en position statique pourrait donc utilement tendre vers un ratio de 80 % / 20 %. Renoncer à une posture pour l'essentiel statique doit permettre de libérer des effectifs, qui seront utiles pour des missions de contrôle de zone sur tout le territoire national, c'est-à-dire aussi hors des centres urbains ௅ notamment aux frontières et dans les zones rurales.

2./ Respecter le contrat opérationnel de protection (7 000 hommes).

Les mêmes causes produisent les mêmes effets. L'actualisation de la loi de programmation militaire a établi un équilibre entre les effectifs de la force opérationnelle terrestre et le nombre maximal d'hommes déployés sur le territoire national : 7 000 dans la durée, 10 000 pour une durée d'un mois au maximum. Or cet effectif maximal est maintenu depuis déjà sept mois et demi, au lieu d'un. Aussi l'équilibre qui sous-tend le contrat opérationnel est-il de nouveau rompu. Il convient donc soit d'augmenter en conséquence les effectifs de la force en les portant à 86 000 au lieu de 77 000, soit de ramener l'effectif de Sentinelle au niveau prévu par le contrat opérationnel.

3./ Mieux exploiter l'" information d'intérêt opérationnel »

L'exploitation de l'" information d'intérêt opérationnel » (pour ne pas dire : du " renseignement » au sens large) est une des conditions de succès et de sécurité de tout engagement militaire ; d'ailleurs, les forces de sécurité intérieure auraient elles aussi un grand profit à tirer de tout ce qu'observent les militaires. Or, aujourd'hui, aucune procédure formelle n'organise l'échange d'informations

entre les armées et les forces de sécurité intérieure sur le sol national. Pour faciliter

cet échange, il convient donc d'établir un cadre doctrinal clair et partagé, dans le respect de la légalité.

4./ Créer un centre interministériel d'opérations sur le territoire national

La gestion des crises sur le territoire national relève du Premier ministre, et, par délégation, du ministre de l'Intérieur. Mais ces crises appellent une réponse interministérielle, associant étroitement la défense et l'intérieur au moins, ainsi que la santé, les transports, voire l'énergie, etc. Aujourd'hui, une structure interministérielle existe au niveau politique : la cellule interministérielle de crise. Mais il n'existe aucune structure interministérielle de planification et de conduite des opérations sur le territoire national, à l'image de ce que fait le centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) pour les opérations - 12 - extérieures des armées. D'ailleurs, l'opération Sentinelle aurait-elle eu sa forme actuelle si elle avait fait préalablement l'objet d'une planification interministérielle approfondie ? Un centre interministériel d'opérations pourrait a minima planifier " à

froid » la réaction à différents scénarios de crise (répartition des rôles entre les

forces ; modalités d'échange d'informations ; interconnexion des systèmes de communication, entraînements conjoints ; création de centres interservices d'entraînement à l'image du dispositif ACIER (1) dans les Ardennes, etc.). A maxima, un tel centre pourrait assurer la conduite des opérations sur le territoire national, de façon plus organisée que le dispositif improvisé en 2015 dans le fumoir du ministre de l'Intérieur.

5./ Rendre l'opération Sentinelle plus attractive pour les personnels.

La condition des personnels est un facteur déterminant de leur moral et de leur " fidélisation ». L'amélioration des conditions d'hébergement, qui est en cours, en participe ; reste à ce que la suractivité qu'entraîne Sentinelle trouve une juste compensation financière " nette », c'est-à-dire tenant compte des règles fiscales applicables aux opérations intérieures, mais pas aux OPEX.

6./ Accentuer l'effort sur la cyberdéfense et le renseignement.

La stratégie de protection du territoire national doit être globale. Les armées y contribuent, notamment avec Sentinelle ou toute autre forme que pourra prendre la posture de protection terrestre. Leurs missions intérieures constituent un volet majeur de cette stratégie, sans pour autant la résumer. L'effort doit être poursuivi également en matière de cyberdéfense ௅ érigée en " posture permanente des armées » dont le contenu reste lui aussi à préciser ௅ et de renseignement, l'accent devant être mis sur son partage entre services. Cyberdéfense et renseignement permettent en quelque sorte de donner de la profondeur stratégique à notre dispositif de protection du territoire.

7./ Développer la résilience de la société française.

Les gestes de premier secours et les comportements à tenir en cas d'attaque s'apprennent, et l'apprentissage passe aussi par des exercices réguliers. C'est ainsi la résilience de la société française qu'il faut affermir. L'engagement de citoyens dans les réserves militaires y contribue ; il doit continuer à être favorisé, et la fonction publique doit donner l'exemple en la matière. Pour aller plus loin, les rapporteurs proposent que soit constitué un groupe de travail étudiant l'idée de rendre obligatoire une journée universelle de réserve par an, pendant laquelle les Françaises et les Français apprendraient et mettraient à jour ces compétences. Un tel dispositif pourrait remédier aux limites souvent soulignées de la journée " défense et de citoyenneté », qui n'a guère de suites. (1) Acronyme de Ardennes complexe interservices d'entraînement à la réalité. - 13 -

8./ Éviter le piège de l'" effet de cliquet »

Doit-on maintenir indéfiniment 7 000 ou 10 000 militaires sur le sol national ? Vigipirate a été marqué par une sorte d'" effet de cliquet » ௅ une fois prises des mesures de protection, il s'est avéré très difficile d'en " réduire la voilure ». Cet effet commence à jouer pour Sentinelle, avec un effectif maintenu à

10 000 hommes au lieu de 7 000. Or il recèle un piège : une part croissante de nos

armées est accaparée par des missions qui relèvent en temps normal des forces de sécurité intérieure et ce, au détriment de leur potentiel opérationnel. Certes, le niveau de la menace le justifie aujourd'hui. Mais c'est dès à présent qu'il convient de préparer le " retour à la normale » à long terme, quitte à renforcer progressivement les unités mobiles de la police et de la gendarmerie. Pour ce faire, il faut étudier sérieusement l'idée que les textes ou la doctrine établissent un lien entre l'effectif militaire engagé sur le sol national et le niveau de la menace, défini par référence aux degrés d'alerte du plan Vigipirate ou à l'état d'exception en vigueur. - 15 -

PREMIÈRE PARTIE :

L'OPÉRATION SENTINELLE, ENTRE CONTINUITÉ ET RUPTURE Le lancement de l'opération Sentinelle, en réponse aux attentats survenus à Paris en janvier 2015, a été perçu et décrit par une large part des observateursquotesdbs_dbs31.pdfusesText_37
[PDF] Enquête de lectorat Bulletin INFO SANTÉ ENVIRONNEMENT INTÉRIEUR, 2007 RESULTATS

[PDF] Le secteur des EHPAD Définition, évolution et organisation

[PDF] UNIVERSITE DU MANS Référence GALAXIE : 4163

[PDF] Accord d adaptation AXA France sur. l organisation et l aménagement du temps de travail

[PDF] Accès Client IndemniPro

[PDF] PLAN DE PREVENTION DES RISQUES DE MOUVEMENTS DE TERRAIN VERSANT NORD DU MONT CANISY SUR LA COMMUNE DE BENERVILLE SUR MER PIECE 3 REGLEMENT

[PDF] RÈGLEMENT DE FONCTIONNEMENT LA SOURIS VERTE

[PDF] Gestion de votre compte Extranet :

[PDF] Maitrise de la procréation et Assistance médicale à la procréation

[PDF] Stages : Nouvelles dispositions

[PDF] Programmes de Mars Repères pour organiser une progressivité des apprentissages. Octobre 2015.

[PDF] Territoires de santé et réponse aux besoins en imagerie

[PDF] Rémunération des CE et assujettissement aux cotisations sociales

[PDF] F o r m a t i o n à d i s t a n c e e t e n p r é s e n t i e l

[PDF] DROIT FISCAL. La taxe sur les salaires est un impôt dû par les employeurs établis en France qui ne LA TAXE SUR LES SALAIRES