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Étude sur le marché du travail
BELGIQUE
Etudes sur le marche du travail
Belgique
Préparée Par
L'Université Catholique de Louvain
Institut de Recherches économiques et sociales
Novembre 1996
Ce rapport a été financé et préparé pour l'usage interne de laCommission Européenne, Direction
Générale pour l'Emploi, les Rélations
Industrielles et les Affaires Sociales. Il ne reflète pas nécessairement la position officielle de la Commission. De nombreuses autres informations sur l'Union européenne sont disponibles sur Internet via le serveur Europa (http://europa.eu.int).Une fiche bibliographique figure
à la fin de l'ouvrage.
Luxembourg: Office des publications officielles des Communautés européennes, 1997ISBN 92-827-8757-5
© CECA-CE-CEEA,
Bruxelles • Luxembourg, 1997
Reproduction autorisée, sauf
à des fins commerciales, moyennant mention de la sourcePrinted in Belgium
Ont collaboré à la rédaction de ce rapport :Personnel scientifique et académique
Patrick CHAUSSEPIED
Isabelle
DE GREEF
David DE LA
CROIXPhilippe
DE VILLÉ
Christian HUVENEERS
Philippe MONFORT
Marthe NYSSENS
Pierre
PICARD
Henri SNEESSENS
BrunoVAN DER LINDEN
Vincent
VANDENBERGHE
Quentin
WIBAUT
Personnel administratif et logistique
Anne DAVISTER
Jean-François DEL VIGNE
Jan LADANG
Nicole MERNIER
Cécile MODAVE
Anne-Marie SC ALLI ET
Claudine STAGE
Françoise WAGNER
Nous remercions le Hoger lnstituut voor de (Katholieke UniversiteitLeuven), qui a
collaboré à la préparation de la section V.1.AVANT-PROPOS
Vingt années de chômage élevé en Belgique. Ce qui paraissait intolérable est devenu réa
lité. Quelle est la genèse de cette situation? Comment comprendre sa persistance? Toutes les politiques menées ont-elles échoué? Un avenir différent est-il possible? Telles seront les questions abordées par cette étude économique.Si une place est accordée dans ce rapport à la description des faits et des institutions, celle
ci est volontairement restreinte. L'essentiel de notre effort a porté sur la compréhension des mécanismes qui engendrent ces faits et sur l'analyse des effets des institutions en place. De cet effort d'analyse et de compréhension découlent des orientations qui nous paraissent ouvrir la voie à un avenir différent. Nous remercions la Direction générale "Emploi, relations industrielles et affaires sociales" de la Commission Européenne qui nous a confié cette étude.La structure générale du rap
port correspond aux prescriptions établies par la Commission afin d'assurer une homogé néité de présentation entre les analyses réalisées dans les divers Etats membres.Bruno Van der Linden
TABLE DES MATIERES
page INTRODUCTION : SUR QUELQUES TRAITS CARACTERISTIQUES DE L 1 ECONOMIE BELGE ........................................................................ ................. 11. ANALYSE DU MARCHE DU TRAVAIL ET EVOLUTIONS
PREVISIONNELLES
............. 131.1. Démographie et population active ................................................................ 13
1.2. Structure de la population active .................................................................. 31
1.3. La dynamique des ajustements : créations et destructions
d•emploi & matching ........................................................................ ................. 641.4. Salaires : niveaux et évolutions de longue période ................................. 69
1.5. Les causes du chômage : première analyse ............................................. 76
1.6. Politique et perspectives macro-économiques ....................................... 1 02
Il. LES INSTITUTIONS DU MARCHE DU TRAVAIL ......................... 13311.1 . Le système institutionnel belge ................................................................... 133
11.2. La négociation collective ........................................................................
....... 137 Ill. LA LEGISLATION DU MARCHE DU TRAVAIL .............................. 175111.1 . La protection de 1•emploi ........................................................................
....... 175111.2. La régulation du temps de travail ............................................................... 183
111.3. Le salaire minimum ........................................................................
................. 201 IV. LES POLITIQUES DU MARCHE DU TRAVAIL .............................. 2o1 IV .1 . Politiques passives ........................................................................ ................. 211 IV.2. Les mesures actives ........................................................................ ............... 232 V. AUTRES POLITIQUES LIEES AU MARCHE DU TRAVAIL ...... 261 V .1 . Education et formation : les systèmes éducatifs en Belgique ............ 261V.2. Taxes et bénéfices ........................................................................
.................. 298V .3. Politiques industrielles ........................................................................
........... 306VI. SYNTHESE DU DIAGNOSTIC ET ORIENTATIONS
PROPOSEES
......................... 353Vl.1. Une synthèse du diagnostic ........................................................................
. 355Vl.2. Orientations proposées ........................................................................
.......... 363 Vl.3. Conclusion : nous avons besoin d·un nouveau contrat social ........... 382 BIBLIOGRAPHIE ........................................................................ ................................ 385INTRODUCTION: SUR QUELQUES TRAITS
CARACTERISTIQUES
DE L 1ECONOMIE BELGE
L'objet de cette section est de souligner certaines caractéristiques structurelles de l'écono mie belge: une très large ouverture aux échanges internationaux; une étroite intégration, économique et institutionnelle, dans l'UnionEuropéenne;
des finances publiques dont la profonde détérioration pendant les années 70 et le début des années80 a laissé en héritage une énorme dette;
une structure politique et administrative de type fédéral; une forte tradition de concertation sociale qui a trouvé sa traduction institutionnelle dans une législation, des institutions et des procédures organisant les relations entre les partenaires sociaux. Ces traits de l'économie belge influent, indirectement pour les premiers, plus directementpour le dernier, sur le fonctionnement du marché du travail et méritent à ce titre d'être
évoqués en commençant cette étude.
1. L 1 archétype d 1 une petite économie ouverte Avec un PIB de l'ordre de 200 milliards d'Ecus en 1995, la Belgique appartient au groupe des petites économies de l'Union Européenne. Elle "pèse" à peine plus de 1/lOème du poids économique de l'Allemagne et représente moins de3,5% du PIB de l'Union.
Surtout, cette économie est très largement ouverte aux échanges extérieurs. Si l'on en juge par le ratio "Moyenne des exportations et importations de biens et services 1 PIB ", laBelgique, avec un ratio de
70% en 1995, est le pays le plus ouvert de l'Union Européenne
après le Luxembourg.Ceci étant, pour élevé qu'il soit, le degré d'ouverture de l'économie belge ne constitue pas
une anomalie. On observe en effet que l'ouverture des économies européennes aux échan ges extérieurs varie en raison inverse de leur taille, mesurée par leurPIB, et proportion
nellement à leur niveau de développement, tel que le reflète lePIB par tête. L'application
aux données belges de la relation entre le degré d'ouverture d'une part, lePIB total et le
PIB par tête d'autre part, relation estimée sur la base des données relatives à 12 pays de
l'Union Européenne sur les années 1991-1993, conduirait à un ratio d'ouverture de la Belgique de 67 % en 1995, chiffre relativement proche de la valeur effectivement observée. Par ailleurs, et ceci est plus singulier, les échanges extérieurs de l'Union Economique Belgo-Luxembourgeoisel, se signalent par une très forte proportion de biens intermédiai res. En 1995, ceux-ci représentaient les deux-tiers des importations totales en valeur et près de 60 % des exportations. S'agissant des importations, cela ne surprend guère.Une économie hautement industriali
sée, mais de petite taille et pauvre en richesses minérales exploitables dans des conditionscompétitives, doit nécessairement se procurer à l'étranger l'essentiel des matières premiè
res et des demi-produits que transforment ses industries.En revanche, le poids des pro
duits intermédiaires dans les exportations de marchandises de l'UEBL n'a rien d'inélucta ble ; il est le reflet d'une structure industrielle qui fait la part belle aux industries chi mi gues et de première transformation des métaux. Cette large ouverture aux échanges extérieurs associéeà une forte concentration des
échanges sur des produits réputés pour leur forte élasticité-prix font de la Belgique un archétype de petite économie ouverte2. Cette situation porte des conséquences importantes sur la dynamique de l'économie belge et sur la conduite de la politique économique. D'une part, elle crée une forte dépendance entre la croissance de l'économie belge et celle de ses principaux partenaires commerciaux.On peut illustrer cette liaison par le graphique
ci-dessous, qui met en parallèle la croissance du PIB de la Belgique et celle de ses six principaux partenaires commerciaux (Allemagne, France,Pays-Bas, Royaume-Uni, Italie,
Espagne) pondérés par le poids de chacun d'eux dans les exportations de l'UEBL en 1990.2 Les statistiques de commerce extérieur publiées par l'Institut des Comptes Nationaux n'isolent pas les
échanges
extérieurs de la Belgique de ceux du Luxembourg.Cf. Huveneers ( 1996).
page2 Graphique 1. Croissance économique comparée de la Belgique et de ses principaux partenaires commerciaux1986 1987 1988 1989 1990 1991 1 992 1 993 1 994 1995
._ __ __.1 PartenairesBelgique
D'autre part, elle fait de l'évolution des coûts de production une variable déterminante de la politique économique. Tout dérapage des coûts de production en Belgique relativement aux pays partenaires se traduit inéluctablement, soit par des pertes de parts de marché et donc par un manque à gagner en termes de croissance, soit encore, plus vraisemblable ment compte tenu du caractère price-taker de la majorité des entreprises exposéesà la
concurrence internationale, par une détérioration de la rentabilité des entreprises et, par suite, par un amoindrissement de leur potentiel de développement.Sont concernés ici au premier chef les coûts salariaux. Dès lors en effet que le franc belge
participe du Système Monétaire Européen et conserve une parité stable avec les monnaies des pays constituant le noyau dur de ce système, les coûts des consommations intermédiai res importées des entreprises belges varient parallèlementà ceux que supportent leurs
concurrentes allemandes, françaises ou néerlandaises. La compétitivité-coût des entrepri
ses dépend alors essentiellement de l'évolution des salaires et/ou de la productivité du tra
vail en Belgique comparativement aux évolutions enregistrées dans les pays partenaires. En pratique, la contrainte extérieure a été très prégnanteà la fin des années 70 et au début
des années80, la compétitivité des entreprises belges étant alors gravement détériorée. Les
mesures prises entre 1982 et 1984, associant une dévaluation du franc belgeà un gel des
salaires, ont permis de rétablir la situation1. Depuis 1984, la balance commerciale est
demeurée constamment positive et dégage depuis le début des années90 des excédents
régulièrement croissants.Voir, plus loin, graphique 11.2.5.
page 3 Graphique 2. Balances commerciale et des paiements courants 500400
300
200
100
0 -1 00 -200
80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95
D Paiements courants B Balance commerciale
2. Une économie étroitement intégrée dans 1·union
Européenne
La très large ouverture de l'économie belge aux échanges internationaux se double d'une prédominance des pays de 1 'Uni on Européenne parmi les partenaires commerciaux de laBelgique. Il est vrai que celle-ci a été dès l'origine partie prenante à la construction éco
nomique de l'Europe. Elle a participé dès sa fondationà la Communauté Economique du
Charbon et de l'Acier (CECA) et a été en 1958 un des six membres fondateurs de laCommunauté Economique Européenne.
Or l'expérience a montré que l'adhésion à celle-ci stimule le développement des échanges mutuels entre les pays membres. En 1995, les pays de l'Union Européenne ont absorbé 75% des exportations de l'UEBL et fourni à celle-ci une proportion égale de ses importations. Ici encore, ce ratio, pour élevé qu'il soit, n'est pas inexplicable. Un test économétrique portant sur 12 pays de l'UnionEuropéenne de 1991
à 1993 montre en effet que le poids des échanges intra-européens dans le commerce extérieur de ces pays est corrélé positivement auPffi par tête et négati
vement à la taille des économies. L'application de cette relation aux indicateurs belges pour l'année 1995 conduirait à un poids relatif des échanges intra-européens dans le com merce extérieur total de 73 Les trois principaux partenaires commerciaux de l'UEBL, l'Allemagne, la France et les Pays-Bas, concentrent sur eux seuls la moitié des exportations et des importations. page4 Echanges extérieurs de l'UEBL en 1995 en milliards de francs (et en milliards d'Ecus)Exportations Importations
Tous pays 4876,5 4447,3
(127,9) (116,7)Union Européenne 3650,7 3356,1
(95,8) (88,0)Trois principaux partenaires 2467,3 2383,1
(64,7) (62,5)Source : Institut des Comptes Nationaux
A cette intégration par les échanges s'ajoute une étroite coopération de la Belgique avec
ses partenaires dans le domaine monétaire. Ici encore, la Belgique a été dès l'origine partie
prenante des dispositifs mis en place pour coordonner les politiques monétaires et stabili ser les taux de change des pays membres de la Communauté Européenne, qu'il s'agisse du "Serpent monétaire" dans la seconde moitié des années70 ou du Système Monétaire
Européen à partir de 1979.
En juin
1990, allant au-delà des obligations imposées par l'appartenance du franc belge au
SME, les autorités monétaires belges se sont donné pour objectif de stabiliser le taux de change du franc par rapport au deutschemark dans une fourchette réduite de1.25 % de
part et d'autre de son taux-pivot. Cette décision, si elle a accentué la subordination de fait de la politique monétaire belge à la politique monétaire allemande, la Banque Nationale de Belgique étant amenée à calquer les modifications de ses taux directeurs sur celles prati quées par la Bundesbank, elle a eu pour contrepartie positive un renforcement immédiatde la crédibilité de la politique monétaire belge. Le différentiel des taux à trois mois entre
les marchés monétaires allemand et belge a pu ainsi être ramené de plus de2% au prin
temps1990 à 0,5 % en fin d'année et moins de 0,1 % un an plus tard. Depuis lors, hormis
dans les périodes de vive tension sur les marchés des changes européens, il n'y a pratiquement plus aucun différentiel de taux sur les échéances à court terme entre le marché
belge et le marché allemand. page 5Graphique 3.
3.5 3 2.5 2 1 .5 0.5 0 -0.5 - 1 88Différentiel des taux à trois mois entre le franc belge et le deutsche mark sur le marché des euro-devises
89 90 91 92 93 94 95
Aujourd'hui, la Belgique est candidate au processus d'unification monétaire européen. Les pouvoirs publics prennent les mesures nécessaires pour que le pays satisfasse fin 1997 aux conditions que le Traité de Maastricht impose aux pays désireux de participer dès 1999 à l'espace monétaire unifié. Enfin, il est à peine besoin de rappeler que la Commission des Communautés Européennes a son siège à Bruxelles et que le Parlement Européen se réunit à Bruxelles en sessions extraordinaires.3. Une très lourde dette publique
Dans la seconde moitié des années 70, dans un contexte difficile marqué par une grave crise des industries traditionnelles de la filière charbon-acier et du textile, par une forte inflation, une rapide montée du chômage et une grande instabilité politique, les pouvoirspublics, soucieux de soutenir l'activité, ont laissé filer le déficit des administrations publi
ques. Celui-ci a culminéà 13,0% du PIB en 1981.
Des efforts ont été engagés dans les années suivantes pour contenir le besoin de finance ment des administrations publiques, puis tenter de le réduire. De fait, à partir de 1985, le solde primaire, hors intérêts de la dette, devient positif. page 6 6 4 2 0 -2 -4 -6 - 8 -1 0 -1 2 -1 4 Graphique 4. Besoin de financement des administrations publiques (en % du PIB)80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95
•••11 Solde primaire ._1 __ _,1 Charge des intérêts ----•--Solde global Mais entre-temps, l'accumulation des déficits a provoqué une explosion de la dette publi que, d'un niveau déjà relativement élevé de62% du PIB en 1975 à près de 120% en
1984. Dès lors que, à partir du début des années
80, la hausse des taux d'intérêt a porté
ceux-ci à des niveaux sensiblement supérieurs au taux de croissance de l'économie, etdonc à la progression spontanée des recettes fiscales, cette lourde dette a suscité l'appari
tion d'un phénomène de "boule-de-neige" : malgré le redressement du solde primaire, lacharge des intérêts tendait à creuser le déficit global des administrations et par là même à
entretenir le gonflement de la dette.Dans la seconde moitié des années
80, alors même que l'accélération de la croissance éco
nomique permettait une sensible réduction du besoin de financement des administrations publiques, de9,0% du PIB en 1985 à 5,8% en 1990, le poids de la dette publique a con
tinué de s'alourdir jusqu'en 1988 et n'a régressé que marginalement en 1989 et1990. Le
graphique ci-dessous illustre cette dynamique du besoin de financement et de la dette. page 7Graphique 5.
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