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LACTION POSITIVE FACE AU PRINCIPE DE LÉGALITÉ DE

Pénot Édouard Dubout et Sophie Robin-Olivier qui me font l'honneur de Le droit social



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LACTION POSITIVE FACE AU PRINCIPE DE LÉGALITÉ DE

Pénot Édouard Dubout et Sophie Robin-Olivier qui me font l'honneur de Le droit social



Notice biographique

2001 à 2011 : Professeur à l'Université de PARIS NANTERRE Co-directeur du Réseau universitaire européen « Droit de l'espace de liberté sécurité justice ...



ANNEXE A

2001 à août 2011 : Professeur à l'Université de PARIS X – NANTERRE. (Paris Ouest-Nanterre La Défense) o Droit des obligations - Cours de 2e année de licence 



La responsabilité sociale des entreprises et les relations de travail

08-Oct-2021 École de Droit Social de Montpellier. Présentée par Louisa RENNARD. Le 16 décembre 2019. Sous la direction de Madame le professeur Christine ...



le périmètre du droit social européen - transeuropexpertseu

Redéfinir le périmètre du droit social européen ? Sophie ROBIN-OLIVIER Professeur à l’Université Paris Ouest – Nanterre la Défense On évoque souvent les difficultés (voire le déclin) de « l’Europe sociale » sous l’effet notamment des

ÉCOLE DOCTORALE DE DROIT DE LA SORBONNE

L'ACTION POSITIVE FACE

AU PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT

EN DROIT DE L

'UNION EUROPÉENNE

Thèse pour l'obtention du doctorat en droit

Présentée et soutenue publiquement le 7 février 2019 par

Aurélia de Tonnac

Sous la direction de Mesdames les Professeures Laurence Burgorgue-Larsen et

Gwénaële Calvès

Membres du Jury :

Madame Laurence Burgorgue-Larsen,

Professeure à l'Université Paris I - Panthéon-Sorbonne

Madame Gwénaële Calvès,

Professeure à l'Université Cergy-Pontoise

Monsieur Édouard Dubout,

Professeur à l'Université Paris II - Panthéon-Assas (rapporteur)

Madame Anastasia Iliopoulou-Pénot,

Professeure à l'Université Paris-Est Créteil (rapporteur)

Madame Sophie Robin-Olivier,

Professeure à l'Université Paris I - Panthéon-Sorbonne L'Université n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions émises dans cette thèse, elles doivent être considérées comme celles de l'auteur.

À ma mère.

REMERCIEMENTS

Mes premières pensées reconnaissantes sont pour Mesdames les Professeures Gwénaële Calvès et Laurence Burgorgue-Larsen qui m'ont guidée, avec bienveillance et précision, durant quatre années. Leurs conseils furent les premiers et derniers jalons de ce travail. Je remercie les Professeurs Anastasia Iliopoulou- Pénot, Édouard Dubout et Sophie Robin-Olivier qui me font l'honneur de participer au jury de soutenance. J'exprime ensuite toute ma gratitude à celles et ceux qui m'ont entourée et ont rendu le quotidien plus agréable, à tous mes amis chers, notamment Olivier et Charlotte sans qui les journées n'auraient pas été les mêmes, et au personnel de la bibliothèque Cujas qui facilite tant la vie des chercheurs. Mes remerciements visent aussi tout particulièrement celles et ceux qui ont accepté la tâche difficile de la relecture, avec enthousiasme, Sabrina, Maxime, ainsi que les courageuses non- juristes et amies infiniment précieuses, Adèle et Joanne. Un grand merci à Camille, amie, colocataire, relectrice et vaillante conseillère dans les moments de doute qui ont ponctué le parcours. Un grand merci à Adrien pour sa magnifique générosité et son énergie contagieuse dans la dernière ligne droite. Un grand merci enfin à mes parents, Marie-Laure et Jean-Philippe, et à mon frère Raphaël, à qui je rends hommage du fond du coeur.

LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS

Sigles et abréviations généraux :

aff. : affaire chron. : chronique comm. : commentaire cons. : considérant

éd. : édition

Ibid. : Ibidem, au même endroit

JO : Journal officiel (France)

JOCE : Journal officiel des Communautés

européennes

JORF : Journal officiel de la République

française

JOUE : Journal officiel de l'Union

européenne obs. : observations

Op. cit. : Opere citato, oeuvre précitée

p. / pp. : page / pages pt / pts : point / points trad. : traduction s. : suivantes vol. : volume

§ / §§ : paragraphe / paragraphes

Traités :

CDPH : Convention relative aux droits des

personnes handicapées

CEDAW : Convention pour l'élimination

de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes (selon l'abréviation de la Convention en anglais)

CIEDR : Convention internationale pour

l'élimination de toutes les formes de discriminations raciales

PIDCP : Pacte international relatif aux

droits civils et politiques

PIDESC : Pacte international relatif aux

droits économiques, sociaux et culturels

TCE : Traité instituant la Communauté

européenne TCEE : Traité instituant la Communauté

économique européenne

TFUE : Traité sur le fonctionnement de

l'Union européenne

TUE : Traité sur l'Union européenne

Organisations internationales, organes :

CNCDH : Commission nationale

consultative des droits de l'Homme (France)

CNIL : Commission nationale de

l'informatique et des libertés (France)

CSA : Conseil supérieur de l'audiovisuel

(France)

OIT : Organisation internationale du

Travail

ONU : Organisation des Nations Unies

Juridictions et comités :

Ass. : Assemblée

BVerfGE : Cour constitutionnelle fédérale

(Allemagne)

Cass. : Cour de cassation (France)

CDH : Comité des droits de l'Homme

CE : Conseil d'État (France)

CEDH : Cour européenne des droits de

l'Homme

Com. EDH : Commission européenne des

droits de l'Homme

Com. IDH : Commission interaméricaine

des droits de l'Homme

Cou. IDH : Cour interaméricaine des droits

de l'Homme

CJCE : Cour de justice des Communautés

européennes

CJUE : Cour de justice de l'Union

européenne

GC : Grande chambre

QPC : question prioritaire de

constitutionnalité

Sect. : section

Trib.UE : Tribunal de l'Union européenne

TFPUE : Tribunal de la fonction publique

de l'Union européenne

Revues et éditeurs :

AJDA : Actualité juridique droit

administratif

CDE : Cahiers de droit européen

D. : Recueil Dalloz

HRLR : Human Rights Law Review

JCP : La semaine juridique

JCP E : La Semaine Juridique édition

entreprise

JCP G : La semaine juridique édition

générale

JCP S : La semaine juridique édition

sociale

JDE : Journal de droit européen

JEDH : Journal européen des droits de

l'homme LGDJ : Librairie générale de droit et de jurisprudence

PUAM : Presses universitaires d'Aix-

Marseille

PUF : Presses universitaires de France

RDLF : Revue des droits et libertés

fondamentaux

RDP : Revue du droit public

RDSS : Revue de droit sanitaire et social

RDT : Revue du droit du travail

Rev. Aff. Eur. : Revue des affaires

européennes

Rev. Science crim. : : Revue de science

criminelle

RFDA : Revue française de droit

administratif

RMCUE : Revue du Marché commun et de

l'Union européenne

RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil

RTDE : Revue trimestrielle de droit

européen

RTDH : Revue trimestrielle des droits de

l'homme

SOMMAIRE

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE.

L'ACTION POSITIVE AUTORISÉE PAR LE PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE

TRAITEMENT

TITRE 1. LA DÉROGEABILITÉ DU PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT CHAPITRE 1. La règle générale de l'égalité de traitement stricto sensu CHAPITRE 2. La dynamique des différences de traitement légitimes TITRE 2. LE RAPPORT PARTIELLEMENT DÉROGATOIRE DE L'ACTION POSITIVE AU PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT CHAPITRE 1. La place prépondérante des mesures d'action positive dérogatoires CHAPITRE 2. L'adoption discrétionnaire des mesures d'action positive

SECONDE PARTIE.

L'ACTION POSITIVE LIMITÉE PAR LE PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE

TRAITEMENT

TITRE 1. L'ÉTENDUE CIRCONSCRITE DE L'ACTION POSITIVE CHAPITRE 1. L'hétérogénéité du champ d'application matériel de l'action positive CHAPITRE 2. La difficile détermination des bénéficiaires de l'action positive TITRE 2. LE CONTRÔLE JURIDICTIONNEL STRICT DES MESURES D'ACTION

POSITIVE DÉROGATOIRES

CHAPITRE 1. Le contrôle de l'objectif des mesures d'action positive CHAPITRE 2. Le contrôle de la proportionnalité des mesures d'action positive

CONCLUSION GÉNÉRALE

1 " Il serait dangereux de s'habituer à une opposition entre le droit, qui serait rigide, inhumain, sclérosé et l'équité qui représenterait l'humanisme, le bon sens, la vie. Tout système doit tendre à la confusion maximale entre l'équité et le droit » 1. " Les peuples démocratiques ont un goût naturel pour la liberté. [...] Mais ils ont pour l'égalité une passion ardente, insatiable, éternelle et invincible »2.

1 G. BRAIBANT, " Le droit et l'équité dans la protection des citoyens à l'égard de l'administration », in Itinéraires.

Études en l'honneur de Léo Hamon, Paris, Economica, 1982, p. 104.

2 A. de TOCQUEVILLE, De la démocratie en Amérique, Tome 2, Paris, GF-Flammarion, 1981, p. 122.

2 3

INTRODUCTION

1. " C'est l'exception qui confirme la règle », nous enseigne la sagesse populaire3.

Comme si une règle devenait véritablement acceptable, crédible ou performante dès l'instant

où elle se trouvait assortie d'une ou plusieurs exceptions. Telle est en tout cas la situation où

semble rendu le principe de l'égalité de traitement en droit de l'Union européenne. Il est " fondamental »

4, se situe " au coeur de nos pratiques juridiques »5, en est la " pierre

angulaire »

6 et la " charnière »7, mais il n'échappe pas aux règles dérogatoires visant à écarter

son application. Face à la persistance des discriminations et inégalités dans les faits, profondes

et structurelles

8, le principe d'égalité, proclamé et reproclamé dans de multiples instruments,

chancelle. Des règles y dérogent en prétendant souvent apporter remèdes, béquilles et solutions

miraculeuses pour mettre fin aux comportements discriminatoires injustes. Ce principe porte en

lui-même deux limites desquelles découlent d'éventuelles régimes spécifiques ou dérogatoires,

il " ne joue qu'entre des individus placés dans des situations identiques [ou plus précisément

comparables

9] et à la condition qu'aucune considération d'intérêt général n'incite à déroger à

l'exigence d'un traitement identique » 10.

2. Reparler du principe d'égalité, pourquoi et comment ? " Bien des choses ont été

écrites, résumées, développées, contredites, débattues, à tel point que la source pourrait être

considérée comme tarie »

11. Détourner l'attention sur l'action positive, figure européenne

3 L'expression provient de l'ancienne règle du droit latin " exceptio probat regulam in casibus non exceptis »,

" l'exception prouve la règle dans les cas non-exclus ».

4 Conclusions de l'avocate générale Mme Juliane KOKOTT présentées le 30 septembre 2010, aff. C-236/09, pt 38

et CJCE, 18 janvier 2001, Commission/Italie, C-162/99, pt 23 où la Cour parle de " principes généraux de droit

constitutionnel, tel le principe général d'égalité de traitement ».

5 J. PORTA, " Non-discrimination, égalité et égalité de traitement - à propos des sens de l'égalité », in I. VACARIE,

G. BORENFREUND (dir.), Le droit social, l'égalité et les discriminations, Paris, Dalloz, 2013, p. 9.

6 C. TOBLER, Limites et potentiel du concept de discrimination indirecte, Luxembourg, Office des publications

officielles des Communautés européennes, 2009, p. 5.

7 O. JOUANJAN, " Égalité », in D. ALLAND, S. RIALS (dir.), Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF,

2003, p. 585.

8 S. FREDMAN, " Breaking the Mold: Equality as Proactive Duty », American Journal of Comparative Law, vol.

60, n° 1, 2012, p. 265.

9 Selon le terme privilégié dans le cadre du droit de l'Union.

10 B. SEILLER, " Contribution à la résolution de quelques incohérences de la formulation prétorienne du principe

d'égalité », in Mélanges en l'honneur de Jean-François Lachaume, Paris, Dalloz, 2007, p. 985.

11 L. PREUD'HOMME, " Le principe de non-discrimination dans l'Union européenne », Rev. UE, n° 591, 2015, p.

483.
4

proche de l'affirmative action née aux États-Unis12 et qu'un traducteur français à l'esprit

résolument chagrin choisit de nommer " discrimination positive »13, voilà un subterfuge qui ne

trompe pas. Nous voulons parler une fois encore d'égalité, ce " terrain fertile d'interprétations »

14, ce " principe de soubassement »15 des sociétés démocratiques16. Nous

parlerons aussi de la discrimination, terme " introduit par la pratique internationale et par le langage juridique anglo-américain »

17. Elle occupe aujourd'hui une place centrale18 dans tous

les raisonnements sur l'égalité, si bien que c'est désormais le " principe de non-discrimination »

qui suscite un intérêt croissant dans la doctrine française19. Dans son sens originel, la discrimination n'est ni positive ni négative

20, mais sa connotation péjorative l'a aujourd'hui

emporté

21. Une discrimination est une distinction malveillante, " stigmatisée à raison de son

motif »

22, entre des individus que tout invite à traiter de manière identique. Le droit cherche

même à se confronter aux " situations de discriminations »

23, indiquant un processus de

12 Pour des études de référence, voir G. CALVÈS, L'affirmative action dans la jurisprudence de la Cour Suprême

des Etats-Unis. Le problème de la " discrimination positive », Paris, LGDJ, 1998, 380 p. et D. SABBAGH, L'égalité

par le droit. Les paradoxes de la discrimination positive aux États-Unis, Paris, Economica, 2003, 452 p.

13 François STASSE se demande " quelle mouche a donc piqué le premier traducteur français du concept américain

d'affirmative action ? », in " Pour la discrimination positive », Pouvoirs, n° 111, novembre 2004, p. 119.

14 M. BRILLAT, Le principe de non-discrimination à l'épreuve des rapports entre les droits européens, Paris,

Institut Universitaire Varenne, 2015, p. 7.

15 M.-F. CHRISTOPHE TCHAKALOFF, " Égalité et action positive en droit européen », Pouvoirs, n° 82, septembre

1997, p. 91.

16 Voir P. BOURETZ, " Sur la philosophie politique de l'égalité », in Conseil d'État, Rapport public 1996 sur

l'égalité, Paris, La documentation française, 1997, p. 477.

17 M. BOSSUYT, L'interdiction de la discrimination dans le droit international des droits de l'homme, Bruxelles,

Bruylant, 1976, p. 7.

18 L'article 14 de la Convention européenne des droits de l'Homme ; l'article 21 de la Charte des droits

fondamentaux de l'Union européenne ; l'article 7 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948

parle d'égalité et de non-discrimination.

19 M. DRÉANO, La non-discrimination en droit des contrats, Paris, Dalloz, 2018, 835 p. ; I. GOULET, Vers un

principe de non-discrimination en droit du travail ?, Thèse pour le doctorat en droit, sous la direction de B.

TEYSSIÉ, Université Paris II Panthéon-Assas, 2001. En droit européen : M. BRILLAT, Le principe de non-

discrimination à l'épreuve des rapports entre les droits européens, op. cit. ; H. KOMBILA IBOUANGA,

L'interaction des principes de proportionnalité et de non-discrimination dans le système juridique de l'Union

européenne, Thèse pour le doctorat en droit, sous la direction d'A. LEVADE, Université Paris-Est Créteil, 2013 ;

F. FINES, C. GAUTHIER, M. GAUTIER (dir.), La non-discrimination entre les européens, Paris, Pedone, 2012, 286

p. ; L. POTVIN-SOLIS (dir.), Le principe de non-discrimination face aux inégalités de traitement entre les

personnes dans l'Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2010, 700 p. ; A. EZAHRAOUI, Le juge européen des

droits de l'homme et le principe de non-discrimination, Thèse pour le doctorat en droit, sous la direction de C.

APOSTOLIDIS, Université de Bourgogne, 2004.

20 L'origine latine du mot est " discriminare » qui signifie simplement " distinguer ».

21 O. DE SCHUTTER, " Egalité et différence : le débat constitutionnel sur la discrimination positive aux États-

Unis », RTDH, n° 7, 1991, p. 347.

22 A. LYON-CAEN, " Variations sur la discrimination ou le pluriel derrière le singulier », in I. VACARIE, G.

BORENFREUND (dir.), Le droit social, l'égalité et les discriminations, Paris, Dalloz, 2013, p. 52.

23 G. CALVÈS, " Discrimination » in S. MESURE et P. SAVIDAN, Le dictionnaire des sciences humaines, Paris,

PUF, 2006, p. 282.

5 glissement " du général au particulier, du simple au complexe »24. " Sans le fait, la non-

discrimination s'évanouit au fur et à mesure qu'on la cherche »25. Mais une telle factualisation

du droit

26 ne se fait pas sans heurt et " les rapports entre le droit et la discrimination sont

ambivalents »

27. La lutte contre les discriminations représenta néanmoins dans l'élaboration du

droit social de l'Union européenne le précieux compromis " entre le système anglo-saxon de

caractère libéral, la tradition continentale de type étatique direct et le modèle scandinave de

dialogue social permanent »

28. Elle constitua également, sur le fondement de la nationalité, un

terrain fructueux de développement et d'enrichissement du statut de citoyen européen29.

3. " La revendication de l'instauration de discriminations positives ou d'un droit à la

différence mais simultanément la volonté de promouvoir l'égalité des chances pénètrent chaque

jour davantage le débat politique »

30. Dans ce simple constat sont mêlées plusieurs notions

difficiles à saisir : discrimination positive, droit à la différence et égalité des chances. Elles ne

semblent pas renvoyer aux mêmes réalités mais leur définition n'est pas aisée à établir avec

certitude. L'attention portée à l'existence de discriminations néfastes dans la société conduit

assez inévitablement le législateur à rechercher des voies pour accélérer leur disparition comme

pour les compenser tant qu'elles existent. Ainsi le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

31 et un certain nombre de directives dans le champ du droit social32 précisent que

" le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un État membre de maintenir ou d'adopter

des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser des désavantages » liés à l'un des

motifs sur lesquels il est par ailleurs interdit de discriminer. Cette catégorie de mesures est

dénommée " action positive » par les directives et fait partie de l'" intervention rectificatrice »33

24 P. de MONTALIVET, " Le principe d'égalité face aux exceptions », in A. VIDAL-NAQUET, M. FATIN-ROUGE

STEFANINI (dir.), La norme et ses exceptions. Quels défis pour la règle de droit ?, Bruxelles, Bruylant, 2014, p.

223.

25 X. BIOY, " L'ambiguïté du concept de non-discrimination », in F. SUDRE, H. SURREL (dir.), Le droit à la non-

discrimination au sens de la Convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 53.

26 Robert POST parle plus généralement de " transformation du droit », in " Les fonctions de la non-

discrimination » in M. MERCAT-BRUNS (dir.), Discriminations en droit du travail. Dialogue avec la doctrine

américaine, Paris, Dalloz, 2013, p. 78.

27 B. TRANCHANT " Les nouveaux champs de la non-discrimination », in F. FINES, C. GAUTHIER, M. GAUTIER

(dir.), La non-discrimination entre les Européens, Pedone, 2012, p. 113.

28 D. BORRILLO, " La politique antidiscriminatoire de l'Union européenne », in Lutter contre les discriminations,

Paris, La Découverte, 2003, p. 139.

29 À ce sujet, voir le travail d'Anastasia ILIOPOULOU, Libre circulation et non-discrimination, éléments du statut

de citoyen de l'Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2008, 795 p.

30 B. SEILLER, " Contribution à la résolution de quelques incohérences de la formulation prétorienne du principe

d'égalité », in Mélanges en l'honneur de Jean-François Lachaume, Paris, Dalloz, 2007, p. 980.

31 Article 157 §4 du TFUE.

32 Article 7 §1 et 2 de la directive 2000/78 ; article 5 de la directive 2000/43 ; article 6 de la directive 2004/113 ;

article 3 de la directive 2006/54 ; article 5 de la directive 2010/41.

33 D. SABBAGH, L'égalité par le droit. Les paradoxes de la discrimination positive aux États-Unis, Paris,

Economica, 2003, pp. 1-2.

6 prévue par le législateur de l'Union pour permettre aux États de prendre en compte les " désavantages » particuliers qui touchent certains individus, pour diverses raisons. Nous

devons rechercher d'abord à définir plus précisément l'action positive, mais nous nous heurtons

ici à deux difficultés fondamentales. I. Les deux difficultés de la notion d'action positive

4. L'action positive lance deux défis particuliers à ceux qui s'aventurent à l'étudier.

D'abord, elle s'inscrit au sein d'une multitude d'autres notions proches, issues de contextes

différents, selon les États et les ordres juridiques considérés. Sans distinguer clairement toutes

ces notions, l'action positive apparaît comme polysémique (1). Elle est ensuite fortement polémique (2).

1- Une notion polysémique

5. Vu l'imprécision du droit primaire et dérivé, nous sommes bien tentés de donner une

définition de l'action positive dans nos propos introductifs, même si celle-ci pourra être amenée

à évoluer tout au long du travail jusqu'à nos propos conclusifs. L'on trouve des éléments utiles

à la compréhension à différents endroits du droit de l'Union. L'article 2, paragraphe 4 de la

directive 76/207

34, aujourd'hui abrogée, présentait les mesures d'action positive, sans les

nommer encore, comme des " mesures visant à promouvoir l'égalité des chances entre hommes et femmes, en particulier en remédiant aux inégalités de fait qui affectent les chances des femmes ». Une recommandation du Conseil compléta ensuite de manière évasive l'objectif

d'égalité des chances par celui de " promouvoir la mixité dans l'emploi », par des " mesures

générales et spécifiques appropriées »

35 dont elle fournissait quelques exemples36. Désormais,

l'article 157, paragraphe 4 du TFUE autorise des " mesures prévoyant des avantages

spécifiques destinés à faciliter l'exercice d'une activité professionnelle par le sexe sous-

représenté ou à prévenir ou compenser des désavantages dans la carrière professionnelle ». La

34 Directive 76/207/CEE du Conseil, du 9 février 1976, relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de

traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne l'accès à l'emploi, à la formation et à la promotion

professionnelles, et les conditions de travail, JOCEE n° L 39, 14.2.1976, pp. 40-42.

35 Recommandation 84/635/CEE du Conseil du 13 décembre 1984 relative à la promotion des actions positives en

faveur des femmes, JOCEE n° L 331, 19 décembre 1984, pp. 34-35, § 1).

36 Ibid., § 4).

7 directive 2006/54

37 renvoie à cette disposition du Traité. Enfin, la directive 2004/11338, et les

directives 2000/43

39 et 2000/7840 pour les autres motifs que le sexe, en donnent une définition

proche. Le terme même d'" action positive » est un premier problème puisque dans d'autres contextes juridiques, l'on trouve des appellations différentes pour des outils similaires ou proches : l'affirmative action aux États-Unis, la discrimination positive dans le contexte français et au-delà

41, les mesures spéciales en droit international onusien42.

6. Les multiples définitions de l'action positive. En raison de la place essentielle

qu'occupe l'égalité dans les systèmes juridiques occidentaux et de la quantité de travaux qui lui

ont été consacrés

43, la discrimination positive " est devenue un passage obligé, une figure

imposée de bon nombre de thèses, soit indirectement, soit directement »

44. Le résultat est une

profusion de définitions et certainement le règne de la confusion. Certains arrivent peut-être à

37 Directive 2006/54/CE du 5 juillet 2006 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité des chances et de

l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail, JOCE n° L 204/23, 26.7.2006,

pp. 23-36.

38 Directive 2004/113/CE du Conseil du 13 décembre 2004 mettant en oeuvre le principe de l'égalité de traitement

entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services, JOCE n°

L 373, 21.12.2004, pp. 37-43.

39 Directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité

de traitement en matière d'emploi et de travail, JOCE n° L 303 du 02/12/2000, pp. 16-22.

40 Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de

traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique, JOCE n° L 180, 19/07/2000, pp. 22-

26.

41 Les termes sont occasionnellement employés par la Cour de justice et par ses avocats généraux. CJCE, 6 juillet

2000, Abrahamsson et Anderson, C-407/98 ; CJUE, 17 juillet 2008, Coleman, C-303/06.

Conclusions de l'avocat général Mme Christine STIX-HACKL, présentées le 28 novembre 2002, aff. C-186/01, pt

11 ; Conclusions de l'avocat général M. M. POIARES MADURO présentées le 29 juin 2004, aff. C-319/03, pt 42.

42 Article 2 §2 de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discriminations raciales,

adoptée le 21 décembre 1965 par la résolution 2106 A (XX) de l'Assemblée générale de l'ONU. Voir P.

THORNBERRY, " Special measures under the Convention », in The international Convention on the Elimination

of All Forms of Racial Discrimination. A Commentary, New York, Oxford University Press, 2016, pp. 204-234.

Article 4 §1 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes,

adoptée le 18 décembre 1979 par la résolution 34/180 de l'Assemblée générale de l'ONU. Pour une analyse

complète, voir I. BOEREFIJN, F. COOMANS, J. E. GOLDSCHMIDT (dir.), Temporary special measures.

Accelerating De Facto Equality of Women under Article 4(1) UN Convention on the Elimination of All forms of

Discrimination Against Women, Belgique, Intersentia, 2003, 258 p.

43 Sans les citer tous, en droit de l'Union européenne : A. ILIOPOULOU, Libre circulation et non-discrimination,

éléments du statut de citoyen de l'Union européenne, Bruxelles, Bruylant, 2008, 795 p. ; D. MARTIN, Egalité et

non-discrimination dans la jurisprudence communautaire. Etude critique à la lumière d'une approche

comparatiste, Bruxelles, Bruylant, 2006, 669 p. ; R. HERNU, Principe d'égalité et principe de non-discrimination

dans la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, Paris, LGDJ, 2003, 555 p. ; S. ROBIN-

OLIVIER, Le principe d'égalité en droit communautaire. Etude à partir des libertés économiques, Aix-en-

Provence, PUAM, 1999, 552 p. ;

En droit français : G. PELLISSIER, Le principe d'égalité en droit public, Paris, LGDJ,1996, 143 p. ; F. MELIN-

SOUCRAMANIEN, Le principe d'égalité dans la jurisprudence du conseil constitutionnel, Aix-en-Provence,

PUAM, 1997, 397 p. ; P. MAZIÈRE, Le principe d'égalité en droit privé, Aix-en-Provence, PUAM, 2003, 477 p.

44 J. CHEVALLIER, " Réflexions sur la notion de discrimination positive », in Mélanges en l'honneur de Gérard

Cohen-Jonathan, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 415. 8 se rassurer en assénant que " ce concept est univoque »

45 ; telle n'est certainement pas notre

idée de départ. La discrimination positive, " bien qu'utilisée couramment, a rarement fait l'objet

d'un véritable effort de définition »46 dans le droit positif, et au niveau doctrinal, son problème

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